ÉPILOGUE

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où es-tu Vincent ?
Es-tu vivant ?

Es-tu mort ?


« Vincent ? »

Il n'est plus là. Je le savais déjà : il fait si froid et noir

« Vincent ! »

Et l'angoisse à hauteur de mon amour

« Vincent ! Vincent ! Vincent ! »

Je m'élance sur la plage en hurlant son nom, sans rien y voir dans ses ténèbres, mais même s'il faisait plein jour, les larmes m'aveugleraient. Mes pieds s'écorchent sur des cailloux , ils me font vaciller et je me redresse d'autant plus vite, en continuant de hurler ce nom, comme une litanie, pour remplir la nuit

 Vincent ! Vincent ! Vincent ! 

Si je me tais, ce sera la fin. Je ne peux plus rien faire sinon hurler, lutter contre l'oubli et sa disparition en remplissant l'air de la seule musique de son nom

 Vincent ! Vincent ! Vincent ! 

Il n'existera plus de musique, sans lui

VINCENT !

Comment le retrouver à présent ? Et s'il s'était échoué dans l'océan ? Peut-être que là seulement, il vivrait ce qu'il a toujours souhaité vivre : devenir lui-même une musique au mouvement profond et épique. Éphémère. Il m'a dit un jour vouloir être un de mes battements. Je frissonne, hors de moi, déchiré de spasmes

Encore un pas sur la plage, et un autre et je ne sais plus où je suis


Il fait si noir


Noire dans le noir, son ombre ; froid dans le froid, son souffle ; et un petit quelque chose d'imperceptible,

Il est là


Son regard est planté droit devant lui. Que regarde-t-il ? Il n'a plus rien à voir. Je me souviens qu'il craint le noir. Autrefois, nous avons su y dessiner des fantasmagories auxquelles il croyait et qui l'ont élancé. Je sais que cette nuit, aussi loin qu'il regarde, il ne voit devant lui qu'un immense désert noir. Mais son regard y est planté, imperturbable, comme un défi. À moi, il a toujours paru héroïque, comme un chevalier. Il n'existe en moi aucune part d'ombre qui ne soit illuminée par sa puissance

Mais je vois qu'il est en train de partir. Il commence à se confondre dans l'ombre comme un souvenir


Je peine à croire que j'ai connu cela

Jusqu'au bout, alors, Vincent, tu seras


Insaisissable


« Eh, Vincent, tu le vois ?

Notre avenir. »


Et il regarde, il regarde, vraiment.


« Merci de t'être incarné quelques temps pour moi »


Et après c'est

La fin



Elle m'emplit, semblable à une âme, tandis qu'un fracas électrise l'intérieur nos têtes pour renverser toute l'ombre


Je vois dans ses yeux, invisibles dans le noir, se lever 

La première lumière, la première seconde du monde


Et il pousse un hurlement qui n'a plus rien d'humain,

qui est au-delà de l'humain.


« Vous m'entendez ? C'est ma nouvelle chanson ! »

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