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By haevav

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De toute sa vie Jungkook, un jeune pianiste, n'a connu qu'un amour : un violoniste du nom de Choi Minjun, trè... More

Note de l'auteure
Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
interlude I
Interlude II
Chapitre 26

Chapitre 11

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By haevav

Cette après-midi, tandis que Taehyung n'était pas présent, j'avais sorti mon carnet et ma page s'était retrouvée remplie de questions sans réponses. Je m'étais réveillé le matin même dans son lit, allongé sur les draps, mais lui, n'était plus là. J'avais couru vers ma chambre pour noter tout ce qu'il s'était produit la veille et les derniers jours. Une page entière était noircie, mais aucune réponse ne succédait aux interminables questions. Chaque nouveau jour, j'avais l'impression de me tenir un peu plus éloigné d'un but qui aurait dû se rapprocher. La vérité était que je n'étais pas bien plus avancé qu'au tout début, lorsque j'avais mis un premier pied dans cette maison. Je commençais à trouver le temps dangereusement long.

C'est vers quinze heure qu'il apparut dans la maison. Il portait une chemise blanche élégamment rentrée dans un pantalon fluide noir. Ses fin pectoraux étaient quelque peu moulés dans cette dernière, si bien que par décence, je baissai les yeux. Après nous avoir salué, il s'affaira au violon, jouant quelques accords comme si Sohee et moi n'étions pas là puis il reposa l'instrument là où il l'avait pris. C'est là qu'il m'appela.

- Jungkook.

Je me tournai vers lui, curieux.

- Cette après-midi nous allons voir Min Yoongi.

Je penchai légèrement la tête sur côté.

- Nous ? demandai-je en jetant un regard en coin à Sohee.

Celle-ci haussa les épaules et alors je compris qu'elle n'était pas plus au courant que moi. Le musicien se tourna vers moi, m'observant de toute sa hauteur, car bien qu'il n'était pas beaucoup plus grand que moi, son aura et sa posture le grandissaient considérablement.

- Toi et moi.

Je n'eus pas le temps de faire la moindre remarque qu'il se tourna vers la brune.

- Sohee.

La jeune femme se retourna vers le musicien, l'air surprise qu'il l'ait appelé alors qu'il le faisait si rarement.

- Oui ? dit-elle tout bas, l'air presque fragile.

- Veux-tu venir voir Yoongi avec nous ?

Il avait la tête légèrement penchée sur le côté et un air parfaitement sérieux collé au visage. Je me demandai pourquoi un si long silence suivit sa proposition, puis je me rappelai la haine que semblait avoir la brune envers le pianiste.

- Je ne suis pas sûre...

- La décision te reviens. Mais je suis sûr qu'il aimerait te revoir.

Il se retourna et je pus jurer l'entendre souffler "et toi aussi".

Puis il quitta la pièce pour gagner sa chambre. Sohee retourna à sa tâche, pliant du linge mais j'arrivai à discerner son tourment par delà sa mine parfaitement placide. Je ne savais pas exactement ce qu'il y avait eu entre elle et le pianiste, je ne connaissais pas l'origine de leur conflit, mais je voyais à son regard que la hache de guerre n'avait jamais été enterrée. Je m'approchai d'elle doucement mais j'eus l'impression qu'elle ne me voyait pas, trop absorbée dans ses pensées. Lorsque je posai une main sur son bras, elle sursauta. Je lui souris alors.

- C'est à mon tour de te faire sursauter.

Et elle me sourit en retour.

- Désolée, j'étais ailleurs.

- Vas y. lui dis-je en ne rompant pas notre échange visuel.

Elle pencha légèrement la tête, mais je savais qu'au fond, elle avait parfaitement compris.

- Viens avec nous. Viens voir Min Yoongi.

Son sourire se renfrogna et toute trace de joie quitta son visage. Ses sourcils se relevèrent et je compris enfin que ce n'était pas la colère qui la retenait, c'était la peur.

- Tu penses que je devrais.

- Tu en as envie ?

Elle parut surprise par ma question. Je le vis à sa bouche qui s'entrouvrit et à ses yeux stupéfaits. Elle garda le silence un instant, en scrutant le mur, l'air peu sûr, puis finalement, elle baissa les yeux vers le sol et hocha la tête presque imperceptiblement.

- Alors vas-y. finis-je.

Elle ne répondit rien mais lorsque le soir venu, je la vis arriver apprêtée et pouponnée devant moi, prête à partir, je compris qu'elle m'avait écouté. Je ne pouvais rien lui dicter, ses choix resteraient les siens quoiqu'il advienne, mais aiguiller quelqu'un lorsqu'il est perdu ou qu'il s'apprête à prendre la moindre décision est la moindre des choses à faire. Et voir qu'elle avait prêté de l'attention à mes propos ce soir là fit germer chez moi l'idée que peut-être que mes opinions avaient finalement de la valeur.

Elle me sourit, je lui souris à mon tour et lui tendis le bras pour qu'elle enroule le sien autour du mien. Nous avançâmes vers le taxi garé devant l'entrée bras-dessus bras-dessous en souriant comme des imbéciles parce finalement, nous étions heureux d'y aller ensemble. Néanmoins, lorsque nous entendîmes les pas du musicien derrière nous, nous nous lâchâmes et montâmes sagement dans la voiture.

Durant le trajet qui s'avéra aussi silencieux que je l'avais prédit, je regardai Sohee en pensant à à quel point elle m'était précieuse et à quel point, à cet instant, elle pouvait être jolie. Jimin aurait été fou en la voyant ainsi. Jimin... Et là, mon coeur se serra un peu plus fort qu'il n'aurait dû le faire.

Au bout de quinze minutes de trajet fluide, nous descendîmes du taxi tous les trois. Le musicien prit la tête, et nous le suivîmes en silence. Il s'arrêta devant un bâtiment d'environ quatre étages et sonna à l'interphone après avoir sélectionné le numéro d'appartement 18. Une minute sépara la réclamation de l'autorisation à monter; le violoniste n'eut même pas à parler pour que monsieur Min lui ouvre. La porte se déverrouilla et nous nous engouffrâmes alors dans l'immeuble. Deux étages plus haut se trouvait le palier de l'appartement 18, celui de Min Yoongi.

La porte s'ouvrit sur un homme plus petit et menu que dans mes souvenirs. Sa peau était pale et ses cheveux noirs de jais offraient un contraste qui marquait la moindre imperfection de sa peau. Ses cernes n'en ressortaient que plus violettes et il en allait de même pour les veines qui parcouraient son cou. Il nous observa quelques secondes sans rien dire, et je vis que son regard était davantage porté vers la brune à mes côtés que sur le musicien. Le malaise était palpable et heureusement, il fut rompu par le propriétaire des lieux.

- Entrez.

Il s'écarta du passage et je suivis Kim Taehyung dans l'appartement sans trop m'éloigner de lui. L'intérieur me surpris de par sa modestie. Même si le pianiste n'était probablement pas riche, je savais qu'il avait les moyens de s'offrir bien mieux que ça. Les pièces n'étaient pas bien grande et on pouvait dire à l'état des lieux qu'il vivait ici seul. Mais ce qui me surpris le plus, ce fut toutes les couleurs du salon. Sur les murs étaient disposés des tableaux abstraits et colorés, le canapé était turquoise et les murs d'un côté blancs et d'un autre, décorés d'une tapisserie aux motifs de vague. C'était loin de l'image que l'on pouvait se faire de cet homme aux yeux sombres qui semblaient renfermer de la froideur. Min Yoongi était en fait, un homme haut en couleur.

Le violoniste prit place sur le canapé mais Sohee et moi ne bougeâmes pas. Pour ma part, j'étais trop gêné d'être en ce lieu où je n'avais rien à faire. Pour la brune, cela restait encore un mystère. L'hôte arriva quelques instants plus tard et s'assit sur une chaise en face de nous. Il semblait désintéressé, fixant la pièce comme s'il la découvrait pour la première fois. Ce fut Kim Taehyung qui brisa le silence le premier.

- Tu as regardé les concerts ? Le dernier était rediffusé.

- Non. répondit aussi platement qu'honnêtement l'ancien pianiste.

Cette réponse arracha un soupir au violoniste qui s'enfonça un peu plus dans le canapé. Je restai debout, gêné par la situation et mon embarras grandit lorsque je sentis les yeux de chat du pianiste me sonder.

- On s'est déjà croisé ?

Pris de court, mes yeux croisèrent les siens. J'avais plusieurs options, et aucune ne me semblait mieux que l'autre. Potentiellement, il y avait deux lieux où il aurait pu me croiser : le premier étant le café lorsque je suivais encore Taehyung et le second, sur scène, lorsque je jouais encore pour Minjun. Je vis à ses yeux plissés qu'il ne me remettait pas mais je ne me payai pas le luxe de me sentir soulagé pour autant. Si jamais il arrivait à se souvenir de m'avoir vu en compagnie de Minjun, j'étais foutu. Et je me rendis compte à cet instant que mon mensonge vivait sur le fil d'un rasoir, en permanence à la limite d'être découvert. Ce jeu qui n'en était pas un devenait de plus en plus dangereux.

- Vous m'avez sûrement vu au café, je suivais souvent monsieur Kim avant. J'étais un grand fan.

Le dénommé m'envoya un regard en coin que j'ignorai délibérément. Min Yoongi m'observa un temps sans rien dire, les yeux toujours plissés et un air dubitatif placardé au visage, puis finalement, il hocha la tête.

- Ça doit être ça, oui.

Puis il se désintéressa de moi, ce qui, pour une fois, ne me dérangea pas le moins du monde. Les deux musiciens se lancèrent alors dans une discussion sur la condition du pianiste dont je me sentais exclu, mais pour le mieux. Sohee, dans un coin de la pièce, regardait Min Yoongi avec défiance, se sentant probablement dévastée par son dédain.

"Il est incroyablement insensible..."

Ses mots ne m'avaient pas échappé, elle éprouvait pour lui une haine visible, non dissimulée. La question était alors de savoir pourquoi elle avait accepté de nous suivre jusqu'ici. Au fur et à mesure de leur discussion, je remarquai que les yeux noirs du pianistes se posaient de temps à autre sur elle. Mais il n'avait pas l'air de la provoquer ni de la déprécier. Je voyais autre chose dans ce regard. Des regrets, de la culpabilité, peut-être même une forme de colère. Dans leurs yeux flottaient les mêmes sentiments, simplement à des degrés différents. Et je compris après encore plus de temps que le sentiment premier n'était pas la culpabilité mais la rancune. Et tout à coup, la scène me parut bien plus intéressante.

Sohee détourna les yeux vers moi et je baissai les miens, honteux d'avoir surpris un échange qui m'avait semblé si intime. Un silence s'ensuivit, puis finalement, Taehyung prit la parole.

- Je te laisse discuter avec Jungkook.

Je sursautai presque en découvrant leurs regards posés sur moi. Et avant même que je n'ai pu répliquer quoi que ce soit, il s'éclipsa, suivi de près par Sohee qui m'envoya un dernier regard par dessus son épaule. Celui-ci suggérait des encouragements. Ainsi je me retrouvai debout, seul en compagnie du pianiste qui me terrifiait. Il m'avait déjà vu, si la mémoire lui revenait j'étais foutu. Il me sonda dans un silence qui me glaça le sang. Des sueurs froides me remontaient l'échine et je ne cessais de prier pour que le violoniste revienne au plus vite.

- Alors c'est toi qui me remplaces ?

Je relevai les yeux. L'expression du pianiste n'était pas mauvaise, juste songeuse. Il devait sûrement se demander ce qu'un gamin comme moi pouvait bien faire à sa place. Heureusement pour moi, il s'abstint de tout commentaire. J'hochai simplement la tête.

- S'il t'a choisi, c'est que tu dois être vraiment bon. Toutefois, je vais quand même te donner quelques conseils.

Cette fois la conversation m'intéressa davantage, je m'y sentis plus impliqué. Des conseils d'un pianiste aussi talentueux, on n'en recevait pas tous les jours.

- Ne copie pas les œuvres la lettre.

Je fronçai légèrement les sourcils, mais pas assez pour lui manquer de respect.

- Si tu penses que Taehyung attend de toi que tu copies bêtement les morceaux que tu joues tu fais fausse route.

Ma bouche s'entrouvrit toute seule, bêtement. Pendu à ses lèvres, j'attendis qu'il poursuive. Il croisa les bras et me fixa, droit dans les yeux.

- Vois les partitions qu'il te donne comme une base. C'est comme s'il faisait la moitié de la tâche et que tu devais la compléter. Evidemment, ça ne vaut que pour les morceaux "non classiques", on ne réinvente pas Beethoven.

- Et comment je peux faire pour les compléter ?

- Tu ne dois pas simplement le faire, tu dois le ressentir.

Face à mon air perdu, il soupira. Je commençai à craindre de l'agacer lorsqu'il se leva. À cet instant, je crus vraiment qu'il en avait fini avec moi mais lorsqu'il fut sur le point de passer par l'encadrement d'une porte plus loin, il se tourna vers ma personne.

- Tu viens ?

Je le suivis timidement et entrai dans une pièce, pas très grande, où en son sein trônait un piano droit en bois. Il s'assit sur le siège devant celui-ci et se tourna vers moi.

- La musique ce n'est pas un truc qui s'effectue sans réfléchir. Ce n'est pas un truc que l'on fait comme ça, sans raison. Quelque chose t'a amené ici, peu importe ce que c'est. Tu es là pour une raison. Tu dois t'en servir.

Je ne fus pas sûr de bien comprendre, mais je m'abstins de tout commentaire, parce qu'offenser Min Yoongi était la dernière chose que j'avais envie de faire. Je devais apprendre de lui, pas le contredire. Je n'avais strictement rien à lui enseigner. Il se saisit d'une partition qui trainait sur le pupitre du piano et me la tendit.

- Tu as déjà joué ce morceau ?

J'attrapai le bout de papier dans mes mains et lu à haute voix :

- Isabella's Lullaby... Non, ça ne me dit rien du tout.

- Rien du tout ?...

Il sembla hésiter un instant, perdu dans ses pensées, les yeux dans le vague, puis il les ancra de nouveau dans les miens avec plus de ténacité encore.

- Je ne sais pas si je devrais déjà te le dire, mais c'est le morceau qu'il a l'intention de présenter au prochain concours des arts internationaux.

Min Yoongi ne savait pas à cet instant, qu'il venait de me servir sur un plateau d'argent ce que je me démenais à chercher depuis maintenant des semaines.

Je dû cacher le flot d'émotion qui me parcoururent. Ca y était, j'avais enfin quelque chose de solide, pour la toute première fois. J'allais servir à Minjun un coup d'avance sur son adversaire. Connaître les morceaux proposés par les musicien à l'avance, c'était du pain béni. Lors du concours, dans la catégorie musique, deux morceaux devaient être proposés par le musicien. L'un était jugé sur la technique, l'autre sur le côté artistique. L'engouement autour du concours enflait au fur et à mesure que les semaines défilaient et rapprochaient de celui-ci. Il était donc de mauvaise augure de faire connaître aux autres musiciens mais également aux spectateurs les morceaux par avance car le risque de gâcher la surprise était élevé. En vérité, il s'agissait même là de la hantise de beaucoup d'artiste. Il n'y avait pas d'obligation, mais il était fortement conseillé de garder les morceaux  secrets. Si je brisais cette règle, Taehyung serait pour sûr déstabilisé.

- Regarde, je vais te jouer la version officielle.

- Mais... et votre épaule ?

Il leva un sourcils, comme si ma question était une ineptie.

- Jouer un morceau ne va pas me tuer.

Puis il se tourna face au piano, optant pour une posture droite. Evidement, il n'avait pas besoin de la partition, il connaissait le morceau par coeur. Il commença à jouer et je compris le gouffre qui nous séparait. Min Yoongi était né pour jouer, il avait le talent qui me manquait. Ses doigts courraient sur le clavier avec une aisance et un sentiment d'habitude qui me coupa le souffle. Son jeu était absolument parfait, il n'y avait rien à redire, alors lorsqu'il s'arrêta pour me faire face et attendre un commentaire de ma part, je ne sus que dire.

- Alors ? demanda t-il finalement pour expliciter ses attentes.

- C'était parfait.

Son visage se ferma quelques peu et je compris que je venais de donner la mauvaise réponse. Il secoua la tête avant de reprendre.

- C'était loin d'être parfait. C'était ennuyeux. Je pourrais m'endormir sur le clavier en jouant comme ça.

Je me pinçai les lèvres. Moi, je n'avais pas vu le problème.

- Maintenant, écoute.

Il se tourna de nouveau vers le piano pour reprendre la même posture que lorsqu'il avait joué la première fois. Il posa ses doigts sur le clavier sans enfoncer les notes et inspira un grand coup comme s'il cherchait à se préparer à quelque chose. Il ferma les yeux et commença à jouer. C'est là, que je compris toute la différence. Il joua exactement le même morceau, pourtant, la sonorité n'avait rien à voir. Il égrenait chaque notes pour créer de sublimes arpèges qui articulaient la mélodie d'une façon magnifique. Dans ma tête se joua le son du violon qui manquait à l'appel et tout devint plus limpide. La clef était là, sous mes yeux. Il continua quelques instants sous mon regard émerveillé, puis il donna le dernier coup avant de s'arrêter. Il rouvrit définitivement les yeux et se tourna vers moi. Il eut à peine le temps d'ouvrir la bouche que je le devançai.

- J'ai compris monsieur. C'est bon.

Il me regarda intensément, et pour la première fois, je vis ses lèvres se fendre en un sourire.


𝄞


Sur le chemin du retour, je ne pus m'empêcher de sourire. D'un, j'avais appris des connaissances de mon aîné. Et de deux, j'avais enfin obtenu une information. Bientôt, il n'y aurait plus d'angoisses, plus de crises, plus de peurs. Bientôt, il y aurait Minjun et moi. Peut-être que ce serait envers et contre tout, mais nous serions ensemble, c'était l'essentiel à mes yeux. Le regard insistant de Kim Taehyung pesait sur moi dans le reflet du rétroviseur intérieur et je ne parvenais pas à l'ignorer. Ce n'était pas le moment de culpabiliser. Pas si proche du but. Sohee, elle, avait l'air contrariée, peut-être même davantage qu'avant notre départ. En la regardant elle aussi, j'eus un pincement au coeur. Notre amitié serait bientôt de l'histoire ancienne. J'avais fait mes choix. J'aurais le temps de les regretter plus tard.

La voiture s'arrêta devant la maison du musicien, et nous descendîmes tous les trois en silence. Le violoniste s'avança le premier, et nous fîmes de même à sa suite. Durant le reste de l'après midi, chacun vaqua à ses occupations. Sohee balayait, les yeux dans le vague, je lisais sur le canapé et Kim Taehyung était absent. Je finis par poser mon livre, ennuyé et attristé par la condition de la jeune femme.

- Sohee ? demandai-je.

Elle se retourna vers moi, et curieusement, fut la première à parler comme si elle avait attendu ce moment.

- C'était une erreur. Je n'aurais jamais dû venir.

Mes sourcils se relevèrent sous la surprise. Je vis son visage perdre de ses couleurs au fur-et-à-mesure de ses paroles et du silence qui s'imposait et d'un coup, sans prévenir, une larme perla sur sa joue. Je restai figé, incapable d'esquisser le moindre geste vers elle.

- Je savais pourtant... mais je n'aurais pas dû.

Elle cacha ses yeux à l'aide de son avant bras et finalement, mon corps décida de réagir. Je me levai et la pris dans mes bras. Elle me serra contre elle en retour et je sentis mon t-shirt s'humidifier sous ses larmes chaudes. Nous restâmes ainsi un moment, et finalement, elle recula. Ses larmes ne cessèrent pas, mais leur intensité me sembla amoindrie.

- Je suis désolée. dit-elle en s'essuyant les yeux. Ce n'est rien, je ne sais pas pourquoi je pleure.

Puis un spectacle déchirant se produisit sous mes yeux; son sourire. Ses lèvres s'étirèrent et il eut l'air tellement vrai que je me sentis effrayé. Combien de fois faisait-elle semblant d'aller bien ? Combien de fois avais-je bien pu manquer de remarquer sa souffrance ?

- Enfin bon, je te laisse, je vais nettoyer là-haut.

Elle se tourna, mais je la retins par le bras. Elle me sonda un instant, de l'espoir plein les yeux et je restai de marbre, tentant de récolter du courage. Avec regret, je finis par lâcher son bras. Je ne pouvais pas la laisser se confier à moi en sachant ce que j'allais lui faire plus tard. Alors lâchement, je la laissai partir. C'était comme un au revoir anticipé. L'espoir quitta ses yeux, et une nouvelle fois, elle s'arma de son plus beau sourire avant de quitter la pièce. Mon coeur se brisa, mais la perspective d'un nouveau départ le répara instantanément.

Le soir venu, je finis de ranger mes affaires pour quitter la maison pour le week-end. J'étais encore en train de faire ma valise lorsque j'eus le sentiment d'être observé. Lorsque je me retournai, je découvris le musicien contre l'encadrement de ma porte ouverte. Je me raidis immédiatement. Il était rare qu'il vienne me rendre visite dans ma chambre, tellement que sa présence me fit trembler.

- Monsieur ? demandai-je avec crainte.

- J'aimerais te parler.

L'effet que ces trois petits mots me fit fut instantané. Les frissons redoublèrent, les battements de mon coeur également. Il entra dans la pièce sans bruit et je vis qu'il était légèrement nerveux à sa façon de faire rouler sa bague sur son annulaire. Néanmoins, il ne dit rien. J'arrêtais alors tout mouvement pour l'observer à mon tour. Je sentais mon coeur frapper ma cage thoracique avec frénésie. Dix minutes de plus et je m'évanouissais. Son regard m'inquiéta. Peut-être avait-il découvert quelque chose ? Je le craignais au plus haut point.

- Je te remercie.

Je restai bloqué quelques secondes avant d'avoir le courage de répondre.

- P-pardon ?

J'étais impressionné par son calme face à son malaise. S'il n'avait pas eu tic avec ses doigts, je n'aurais jamais deviné le malaise que cette conversation instaurait chez lui. Moi, ça se lisait sur mon visage, sur mon corps, sur mon être entier.

- Pour hier soir. D'être resté.

Je restai de marbre, ne sachant que répondre. Lui me regarda encore quelques instants avant de reculer.

- Tu peux rentrer chez toi. À lundi.

Puis il quitta la pièce aussi simplement qu'il y était entré. Je restai un instant sur place, perturbé par ses remerciements que je n'estimais pas mériter. La culpabilité commença alors à m'habiter. J'avais encore le choix, il était encore temps de faire machine arrière. Je serais le seul responsable de mes actes. Un doute m'assaillit, puis je pensai à Minjun, à nos années de relation et cela me suffit à prendre ma décision.

Je finis d'emballer mes affaires et bientôt, je quittai la maison. Sur le palier, je jetai un dernier regard derrière moi. C'était donc la dernière fois que je la verrais. Il aurait été mentir que de dire que je ne ressentais pas ce petit pincement au cœur caractéristique de lorsque l'on quitte quelque chose de cher à nos yeux. Je serrai les dents pour me forcer à ne pas revenir sur ma décision et partir, laissant le souvenir de cette maison derrière moi.

Le cheminement pour rentrer chez moi ne fut pourtant pas bien calme. J'aurais aimé être dénué d'empathie et capable de trahir sans la moindre gène. J'aurais aimé ne jamais éprouver de remords, mais je n'étais pas comme ça. Mon humanité freinait mes objectifs. J'arrivai finalement sur le palier de mon appartement miteux et encore une fois, le contraste se fit ressentir. A peine eus-je mis le pied dans celui-ci que je sortis mon téléphone de ma poche. Si j'attendais davantage, j'étais sûr que je ne le ferais pas. Je recherchai le numéro du journal que je souhaitais contacter, et le trouvai sans mal. Je passai mon numéro en "masqué" par précaution et entrai le numéro du journal sur mon écran. J'eus une dernière hésitation, peut-être le signe d'une dernière trace d'humanité chez moi, puis finalement, je cliquai sur le bouton pour appeler. Quatre tonalités résonnèrent, chacune correspondant à un souffle d'air pris par mes poumons. Finalement, quelqu'un décrocha et me demanda mon souhait. J'inspirai une dernière fois.

- Bonjour madame, j'ai une information à vous révéler sur Kim Taehyung.

Je sentis un gain d'intérêt se former de l'autre côté du combiné. Je déglutis, dans une tentative de ravaler la culpabilité, mais je n'y parvins pas. Elle me suivrait toute ma vie.

Perdu pour perdu, je poursuivis.

- Je sais quel morceau il jouera au prochain concours des arts.

Je n'étais pas fier de moi, j'étais même écoeuré, mais Minjun, lui, le serait. Et ça, ça n'avait pas de prix.

𝄞


Lorsque j'étais arrivé chez Minjun et que je lui avais parlé de ce que je venais de faire avec fierté, je m'étais attendu à un bon nombre de réactions, mais pas à celle-ci. Ses sourcils s'étaient d'abord froncés, puis les stigmates de la colère s'étaient insinuées sur son visage. J'avais perdu sur tous les plans, je le comprenais seulement maintenant. J'avais trahi Taehyung pour rien, ce fut le plus difficile à avaler. A présent je devais subir les répercussions de mes choix, et cela commençait pas laisser la vague de colère de Minjun déferler sur moi.

Ce dernier attrapa son verre encore rempli de vin rouge et le balança à travers la pièce. Celui-ci vint s'exploser contre le mur noir à ma droite, laissant tout de même une auréole sombre imprégner ce dernier. Mon sursaut fut immédiatement coupé par le cri qui suivit ce geste.

- Tu es complètement con, c'est ça ? Qu'est-ce qui t'as pris de faire ça sans me consulter ?

Il hurlait si fort que les veines de son front, dilatées, ressortaient. Son visage avait viré au rouge, ses yeux commençaient dangereusement à prendre la même teinte et pour la première fois en sa compagnie, j'eus sincèrement peur de lui et de ce qu'il pourrait me faire. Oserait-il lever la main sur moi ? Peut-être avait-il voulu me lancer le verre dessus ?

Il contourna le bar, brisant la distance qui nous séparait. Sans celle-ci, je me sentis plus vulnérable encore. J'avais peur, mes poumons saturaient, mes jambes me lâchaient et mon cerveau ne pouvait encaisser le choc. Qu'avais-je encore fait pour mériter cette rage ? Pour mériter la haine qu'abritaient ses yeux ? Il écourta encore la distance et attrapa ma mâchoire entre ses grandes mains, celles qui autrefois caressaient mes courbes avec délicatesse, et se mit à serrer. Le fer de ses bagues me fit affreusement mal, si bien que je dû me retenir d'hurler de douleur.

- Cette information que tu détenais, si tu me l'avais donné comme tu aurais dû le faire, j'aurais pu la sortir dans un moment opportun.

Je détournai les yeux. J'avais honte que ceux-ci soient baignés de larmes.

- Regarde-moi ! cria-t-il.

Un soubresaut me prit et les larmes se mirent à couler, à dévaler mes joues en masse. J'eus tellement peur que je lui obéis. Si ma vision n'avait pas été aussi floue, j'aurais affirmé avoir vu un sourire se dessiner sur ses lèvres.

- Si je l'avais livré aux journalistes deux jours avant le concours, j'aurais gagné. Mais toi... Toi, tu as préféré agir en précipitant les choses comme l'incapable que tu es.

Entre deux gémissements de douleur, je parvins à marmonner une sorte de "désolé" inintelligible qui ne sembla pas l'atteindre ni le toucher. Il m'observa encore un peu, allongeant la souffrance et l'humiliation, puis il finit par me lâcher.

Je m'effondrai par terre, au milieu du verre brisé. Mon premier réflexe fut d'attraper mes joues. Je ne réalisai pas encore les nombreuses entailles qui faisaient saigner mes mains et mes genoux. Parfois, la douleur intérieure surpasse la souffrance du corps. Puis parfois, on a carrément la sensation de se dissocier; que l'âme flotte au dessus du corps pour ne pas endurer ce que ce dernier peine à supporter. C'était ce que je ressentais, si bien, que je restai cinq minutes au milieu de la pagaille. La tête baissée, je parvins à voir l'ombre de Minjun repasser derrière le bar et bientôt j'entendis un bruit de liquide qui coule dans un verre. Je regardai impuissamment mon sang se mélanger au vin sur le sol, incapable de différencier les deux liquides.

Dans ma tête résonnaient les paroles de Minjun comme une boucle infernale, un torrent de pensées qui m'envahissait en un écho lointain. Puis mon corps et mon âme fusionnèrent de nouveau lorsqu'il se remit à parler.

- Tu vas rendre ton appartement.

Je relevai les yeux faiblement. Toujours sur le sol, je paraissais misérable face à cet homme grand et longiligne posé derrière le bar. Etais-je encore à l'état d'humain ? Méritais-je encore ce titre après avoir été traité ainsi ? Je n'étais plus sûr de rien.

- Q-quoi ?

Je l'observai boire son nouveau verre de vin d'une traite, insensible au fait que je pataugeai dans le précédent comme une loque.

- Dès que tu sors de chez Taehyung, tu viens ici. Puisque tu es incapable de faire quoique ce soit de bien quand tu es seul, tu ne le seras plus.

Le moi d'une semaine, d'un jour ou même d'une heure auparavant aurait sauté de joie. Il aurait vu son couple renaître de ses cendres, il aurait pris cela pour une ouverture vers une seconde chance. Le moi actuel n'avait même pas la force d'imaginer la suite.

Je le regardai, complètement vidé, lessivé. Il posa son verre sur le comptoir et fit de nouveau le tour de celui-ci. Mon coeur se remit à accélérer violemment. La peur dominait tout sur son passage, et il l'avait bien compris. C'était un outil puissant et dévastateur. Ainsi, il pouvait mettre quiconque à sa merci.

Heureusement, cette fois-ci, il resta à distance.

- Quoi ? Pourquoi tu tires cette gueule ? Tu préfères continuer à vivre seul dans ton appartement misérable ? Il feignit de s'adoucir. Allons, regarde-toi Jungkook. Tu es perdu sans moi.

Je restai sans voix. Oui, c'était vrai. Je n'étais rien sans lui. Je ne faisais rien de bien, mes initiatives tombaient à l'eau. Mais alors, pourquoi une dernière partie de moi continuait à tenter de me faire croire le contraire ?

Il sembla attendre une réaction de ma part, il n'en fut rien. Il secoua alors la tête avec un regard méprisant et quitta la pièce sans un dernier regard derrière lui. Il me laissa ainsi, encore trempé de vin, les mains lacérées. Je posai alors celles-ci devant moi pour tenter de me relever. Je ne parvins pas la première fois, retombant lamentablement au sol. Alors je m'accrochai au bar cette fois et parvins à me hisser sur mes jambes.

Presque automatiquement, je me mis à nettoyer le sol en pleurant toutes les larmes de mon corps. Lorsque je quittai la maison, il n'y avait plus la moindre trace de sang ou de vin, que ce soit sur le sol ou sur le mur. Minjun ne serait pas en colère, il ne recommencerait plus. Il avait juste craqué, j'avais été trop loin. C'était de ma faute, si j'avais bien fait les choses, il n'aurait jamais réagi comme ça. Il fallait que j'en sois convaincu. Je devais faire taire cette partie rebelle de mon esprit, c'était à cause d'elle que tout foirait.

J'éteignis les lumières, quittai le couloir. Dehors, il pleuvait. Je sortis mon téléphone de ma poche, il était minuit cinq. Je ne pouvais pas rentrer seul dans cet état. Je cliquai sur mes contacts et deux numéros s'affichèrent en premier. Park Jimin et Kim Taehyung. J'étais sûr que le musicien serait encore debout. Le blond dormait tôt. J'avais le choix. Pourtant, ma décision fut vite prise. Alors sans vraiment réfléchir plus que ça, je cliquai sur l'écran de mon téléphone, sur le bouton qui permettait de passer un appel. Seulement trois tonalités plus tard, je compris qu'on avait décroché. Et malgré mes larmes, je parvins à articuler.

- Jimin... tu peux venir me chercher ?



♪ ♪ ♪



NDA : J'aime beaucoup ce chapitre :)

C'est la première fois que je ressens une émotion en écrivant, vraiment, la fin m'a fait bizarre, j'avais l'impression d'être impliquée.

À votre avis, happy ou sad end ? 😈

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