TOME 1 - Chapitre 31

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Directive n°4 : Avouer ses erreurs c'est avancer dans le bon sens.

Confortablement installée près de la cheminée, dans l'un des fauteuils en cuir du petit salon, je profite de la soirée pour me détendre, faire le point, être tranquille. Il ne reste du feu que quelques braises rougeoyant dans le noir. Je me penche et attrape un tisonnier pour les remuer, puis ajoute une bûchette dans l'âtre. Calcifer, reconnaissant, émet un ronronnement de plaisir. La flambée repart de plus belle, dansant avec une frénésie dévorante. Peu à peu, la chaleur emmaillote la pièce d'une tiédeur enveloppante, chassant dans les recoins, le froid et les ombres.

Il y a trop de choses auxquelles je dois penser, c'est épuisant... Tout serait plus simple si je m'en tenais à la partie émergée de l'iceberg, mais je n'y arrive pas. Résultat, plus je cherche à déterrer les atrocités perpétrées par ma famille, plus d'obscurs secrets sortent des méandres du passé.

Un frisson me parcourt l'échine. Je me frotte vigoureusement les mains au-dessus du foyer incandescent. J'admire ses reflets d'un rouge doré, pareils à un coucher de soleil.

Je vais devoir procéder avec logique, si je veux y voir plus clair. Cependant, je ne peux m'empêcher d'appréhender mes futures découvertes. La vérité peut être dure, cruelle, je ne suis pas sûre d'en ressortir indemne.

— Matriarche ?

Je sursaute et me retourne vivement. Deux agents de sécurité et une servante apparaissent dans l'encadrement de la porte. Si les hommes affichent une prestance indéniable dans leur costard noir, la femme semble déterminée à disparaître sous terre. Tête baissée, elle reste prostrée, comme une biche résignée devant le chasseur.

Merde ! Ça n'annonce rien de bon !

— Qu'y a-t-il ?

Les gardes du corps, blonds aux yeux bleus, s'inclinent respectueusement, puis s'écartent sur le côté en me désignant la domestique.

— Pardonnez-nous de vous déranger, mais nous voulions vous signaler une intrusion.

Mon cœur s'emballe brusquement. Je détaille avec un intérêt inquiet la servante. D'allure fluette, de taille moyenne, elle porte une robe noire à manches longues et tablier blanc. Ses cheveux, d'un roux lumineux, sont tressés en deux nattes. Mal à l'aise, sa main droite triture nerveusement les doigts de sa main gauche. Elle garde obstinément les yeux rivés au sol comme si elle craignait de croiser mon regard et de se transformer en statue de pierre.

— « Une intrusion » ? je répète, perplexe.

Cette jeune femme serait une tueuse à gages ?

Refoulant mon trouble, je serre les poings et me rapproche d'elle.

— Comment vous appelez-vous ?

Elle relève subitement la tête, visiblement surprise par ma question. Des taches de rousseur ressortent sur son visage blême. Ses iris marron brillent d'une intelligence triste.

— Béatrice, made... matriarche, balbutie-t-elle la mine défaite.

— Et depuis combien de temps travaillez-vous ici, Béatrice ?

— Deux jours.

Mais alors... Ce n'est pas une intruse, mais une nouvelle...

Je pivote vers les agents de sécurité, un peu déroutée par leur méprise.

— Vous faites erreur, Messieurs. Cette jeune femme n'a rien à se reprocher.

L'un des hommes réajuste nerveusement sa cravate et prend la parole :

Sang Remords (T.1 - ☑ /T.2 - en cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant