Sang Remords (T.1 - ☑ /T.2 - en cours)

TOME 1 - Chapitre 20

Pense-bête n°6 : Le mieux est parfois l'ennemi du bien.

— Tu as demandé à me voir ?

— Oui, Nathan. Je voulais encore te remercier de m'avoir sauvé la vie.

Ses yeux marron brillent d'un éclat qui me liquéfie sur place. Il me scrute de son regard perçant, pendant que je perds tous mes moyens. Affreusement gênée, je reporte mon attention sur la bibliothèque de mon aïeul.

Les ouvrages sont classés méthodiquement, rangés sur des étagères allant du sol au plafond, courant le long de tous les murs de la pièce. Je considère le dos des livres à ma hauteur, les parcourant du bout du doigt dans un geste faussement désinvolte.

— Une blessure par balle, une égratignure au visage... Et te voilà déjà sur pieds ! commente-t-il avec un sifflement admiratif. Je suis impressionné, Super Girl !

Je me retourne pour lui faire face.

— C'est grâce à ton père.

— Et à ses secrets, complète-t-il sur un ton de conspirateur.

Étrange... Dois-je comprendre qu'il ignore tout de l'existence du vampire ?

— C'est un excellent médecin.

Un sourire ironique étire ses lèvres.

— Un faiseur de miracles, ouais... Mais comme tu peux le constater, nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne, dit-il en désignant l'arête de son nez légèrement tordue et l'hématome violet qui enfle sur sa joue droite.

— Je suis désolée.

Il hausse les épaules et enfouit ses mains dans les poches arrière de son jean.

— T'inquiète pas, je m'en remettrai. J'espère néanmoins que ça te servira de leçon.

Je bredouille un « oui » du bout des lèvres.

— À propos, j'aimerais bien connaître les raisons qui t'ont poussé à t'aventurer aussi loin toute seule...

Je détourne le regard.

— Je voulais simplement me promener, je plaide d'une voix lasse.

— Je n'en crois pas un mot ! objecte-t-il. Mon paternel s'imagine que tu t'es jetée dans la gueule du loup par bêtise, pour ma part, je suis persuadé qu'il y a autre chose !

Perspicace...

— Je veux pas m'étaler sur le sujet.

— Cela ne te dérange pas qu'on te prenne pour une petite écervelée suicidaire ? me raille-t-il en me sondant avec insistance.

— Pas le moins du monde ! je clame avec dédain. Tu es libre de penser ce que tu veux !

Vas-y, sous-estime-moi, ça m'arrange...

— Arrête d'essayer de noyer le poisson !

Je laisse échapper un long soupir désabusé.

— C'est bon t'as gagné, Nathan ! Je capitule ! (Je baisse la tête, les nerfs en pelote.) Je saturais, j'admets en grinçant des dents. J'étais en colère contre la terre entière, le destin, moi... J'avais envie de tout envoyer balader, j'en pouvais plus. Je voulais fuir mes responsabilités...

Et me défouler...

— Autrement dit, tu aurais pris tous ces risques à cause d'une stupide crise existentielle ? résume-t-il, condescendant.