TOME 1 - Chapitre 4

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Leçon de survie en terrain hostile no 4

Ne pas se laisser abattre par l'adversité.

(Ou l'art de dissimuler sa peur !)

Grand-père doit plaisanter, ce n'est pas possible autrement... Il a beau être sévère, jamais il n'arriverait à de tels extrêmes.

Rassurée par cette pensée, je me tourne vers mon père. Nos regards se croisent et là, ma naïveté m'explose au visage comme une bombe à fragmentation.

La tyrannie familiale vient souvent gâcher mon existence, et pourtant, j'ai appris à m'en accommoder. Par la force des choses, j'ai développé un esprit rebelle. J'ai cru pendant longtemps que mes actes n'engageaient que moi, je viens seulement de saisir l'ampleur de mon erreur...

— Je suis désolée, papa.

Il esquisse un faible sourire. Son visage porte l'expression d'un désespoir muet et résigné. Un douloureux sentiment de culpabilité me ronge le cœur.

Mon Dieu... Qu'est-ce que j'ai fait ?

Des ricanements désagréables confirment mes craintes : ma vie et celle de mes proches sont sur le point de changer de manière radicale. À compter de ce soir, rien ne sera jamais plus pareil.

Le médecin, accompagné de son infirmière et de plusieurs membres du personnel de maison, font alors leur entrée dans le salon. Tout le monde s'écarte pour leur laisser le passage. Charles Guérin s'incline respectueusement devant Yvan et les quatre vieillards.

— Monsieur, tout est prêt, déclare-t-il avec solennité. Nous n'attendons plus que vos ordres.

— Très bien, procédez comme convenu.

Le docteur hoche la tête d'un air approbateur et pivote sur lui-même pour s'adresser à tous les Overney-Lecomte.

— Les hommes natifs de la famille à ma droite, les femmes, à gauche. Veuillez vous mettre en rang et retrousser vos manches pour nous faire gagner du temps. Les autres, écartez-vous pour libérer la place. (Personne n'ose bouger. L'incompréhension nous accable.) Allez, dépêchez-vous ! Nous n'allons pas y passer la nuit !

Des murmures envahissent la pièce, et finalement, tel un troupeau de dociles moutons, tout le monde s'organise conformément aux consignes. J'en profite pour rejoindre ma mère et ma petite sœur, avec mon père. Nous nous enlaçons tendrement. Les émotions s'entremêlent, je retiens mes larmes. Mon paternel ne laisse rien paraître de son inquiétude. Il essaye de nous ménager, mais son extrême pâleur trahit la gravité de la situation. Une boule d'effroi se forme progressivement dans le creux de mon ventre.

Je vais entraîner tout le monde dans ma chute...

— Vous devriez vous mettre en rang comme les autres, préconise-t-il d'un ton morne.

Soudain angoissée, Laura éclate en pleurs. Notre père la prend dans ses bras pour la réconforter. Il lui tapote le dos en chuchotant que tout ira bien.

J'aimerais tellement y croire...

— Viens, Suzie, m'interpelle ma mère. Olivier a raison, faisons un effort de coopération.

— C'est pas ce qui nous sauvera. Je marmonne entre mes dents serrées.

— Peut-être, mais une chose est sûre : l'heure n'est plus à la révolte. Il faut calmer les tensions, si nous voulons avoir une petite chance de nous en sortir.

— Tout est de ma faute... (Ma voix se casse dans un sanglot.) Si seulement, j'étais moins... Pardon, maman. Je me sens tellement coupable...

Ma mère me saisit par les épaules et me fait pivoter afin que je me retrouve face à elle. Son expression devient sérieuse, une ride apparaît entre ses sourcils.

Sang Remords (T.1 - ☑ /T.2 - en cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant