Chapitre 45 : Ce n'est qu'une question d'heures

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— Toujours rien ? demandé-je à Borac, adossé au mur en pierres à mes côtés.

Pour la dixième fois en quelques minutes, il regarde encore une fois son téléphone afin de s'assurer qu'il n'a pas reçu de messages provenant d'Amaël ou de Loukas. Au vu de son air, je crois qu'il commence à en avoir marre que je lui pose la question à tout bout de champ. Je peux le comprendre, mais je n'en peux plus d'être assise, là, dans cette pièce froide et humide, où la lumière n'est presque pas présente. L'environnement austère ne m'aide pas à arrêter de ruminer sur tout ce qu'il se passe en ce moment.

— Non, toujours pas, comme il y a deux minutes. Tu devrais être fatigante quand tu étais gamine ! s'esclaffe-t-il en reposant son téléphone au sol.

— Absolument pas, j'étais adorable. Une enfant rêvée d'après ma mère, réponds-je avec un sourire narquois.

Elle n'aurait certainement jamais dit ça de moi, j'en suis presque persuadée, mais, ça, il ne pourra jamais le savoir. Petite, je posais souvent, très souvent, les mêmes questions à quelques minutes d'intervalle. Cela avait le don de l'agacer profondément et elle n'était pas la seule. Papy Ali a malheureusement connu cette facette de moi. À l'époque, je ne pouvais pas m'en empêcher, c'était plus fort que moi. Et puis, j'ai entendu dire que, presque, tous les enfants agissaient pareils.

Aujourd'hui, ce n'est pas mon comportement de gamine qui revient, mais plutôt l'ennui et le stress. J'ai comme l'impression qu'il faut que je demande s'il a reçu un message. C'est presque une obligation venant de ma part pour me faire me sentir mieux, cela me donne de l'espoir que tout va bien se passer. Certes, cela l'agace, mais, moi, ça m'est presque vital, même si mon attitude me paraît bizarre.

— Il est quelle heure ? osé-je demander en faisant face au visage de Borac, qui se décompose à cause d'une autre question posée de ma part.

— Presque vingt et une heures. Cela fait exactement onze heures et quarante-trois minutes et treize secondes qu'on attend, me nargue-t-il subtilement. Si jamais, tu t'amuses à avoir la même requête dans une minute, tu peux prendre mon foutu téléphone et regarder par toi même !

— Tu es d'une humeur massacrante ! Je suis ravie de passer ma journée en ta joyeuse compagnie. Dis-moi, tu es toujours aussi grognon ?

— Qu'en ta présence, princesse, me répond-il en m'adressant un sourire pour la première fois depuis des heures.

Au fur et à mesure des minutes passées avec lui, j'ai finalement réussi à cerner ce personnage. Il suffit de lui envoyer une petite pique sur son comportement ou ses gestes et il retrouve le sourire. À croire qu'il est joyeux que quand il peut avoir de la répartie et que la discussion est à son avantage.

— Cela fait combien de temps que tu connais, Amaël ? le questionné-je pour avoir plus d'informations, tout en essayant d'être discrète.

— Depuis qu'il porte des couches, je dirais. D'ailleurs, elle lui allait comme un gant, raconte-t-il en rigolant à gorge déployée. Sa mère et la mienne sont très bonnes amies et étant donné que leurs deux fils sont nés la même année, elles nous ont réunis ensemble dès le plus jeune âge. Je n'ai, malheureusement, pas eu le choix que de le supporter tout au long de ses longues années communes.

— Le supporter ?

— Il n'est pas facile à vivre comme tu as dû le remarquer. Quand monsieur a une idée en tête, il est presque impossible de la lui enlever. C'est le mec le plus têtu que je connaisse et encore le mot têtu ne le définit pas à cent pour cent. Mais, dis-moi, tu es bien curieuse !

Je ne peux m'empêcher de rougir et d'essayer de camoufler mon visage dans mes genoux même si je sais que l'obscurité de la pièce masque parfaitement mon anxiété face à sa question. Malheureusement pour moi, bouger pour dissimuler ma gêne a eu raison de moi et Borac me le fait bien savoir.

Dans les songes de Kaelia [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant