Chapitre 39 : Il n'y a aucun souci à se faire

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Je le regarde avec une tête de six pieds de long. Je dois forcément halluciner, je ne vois que ça. Amaël, s'excuser, cela relève presque du miracle !

— Je n'aurais jamais dû t'envoyer dans ta maison. Pardonne-moi, Kaelia, me dit-il avec une voix chevrotante.

Il ne m'a pas accoutumé à entrapercevoir ce côté émotif et soucieux des autres. Ce changement d'attitude est si soudain, et contraire à son comportement habituel, que je suis prise au dépourvu.

— Ce n'est pas grave, lui réponds-je en ne sachant pas quoi lui dire. Tout va bien se passer !

— J'ai commis une énorme erreur qui pourrait te coûter la vie. Si jamais, il t'arrivait quelque chose, je ne pourrai jamais me le pardonner.

— Qu'est-ce que ce gamin âgé d'une dizaine d'années peut bien faire de toute façon ? Ce n'est pas comme s'il allait mener une armée à tes trousses. Il ne m'a pas aperçu rentrer dans la maison. Personne ne se doute que je suis sur Malurn. Et puis, je ne suis personne ici, personne ne sait mon existence mise à part les rebelles, rétorqué-je avec un faux sourire pour tenter de remonter le moral d'Amaël.

En y réfléchissant, c'est vrai qu'un gamin de cet âge-là ne peut pas avertir les gardes du roi que je suis là en ne m'ayant pas vu et encore moins en déclarant avoir remarqué Amaël près de la demeure de mon père. Tout le monde le prendrait pour un fou ou un jeune qui cherche juste à avoir l'attention des adultes.

— Au contraire, il peut tout faire, murmure Amaël tout en scrutant le sol avec un regard vide et un air dépité.

Le voir dans cet état-là me perturbe énormément. Je n'ai jamais eu l'occasion de connaître Amaël sous cette facette. D'habitude, il est si sûr de lui, en plus d'être un emmerdeur avec un sourire en coin. Son attitude me rend mal à l'aise. Je pose ma main sur son épaule en espérant que mon toucher le rassurera comme le sien apaise mon âme.

— Je suis vraiment contente que tu aies pris le temps de me montrer la maison de mes parents. Cela me fait chaud au cœur, merci énormément, Amaël, lui soupiré-je à l'oreille avant de lui faire un tendre baiser sur la joue.

Le contact de mes lèvres sur sa peau me crée comme une onde électrique, une sensation de chaleur. Bien que celle-ci soit agréable, Amaël s'écarte en un éclair et pose son regard sur le mien. La tristesse, que je peux lire à travers ses yeux, a fait place à une autre émotion que je ne saurais qualifier, mais les étincelles, qui les habitent d'habitude, sont de retour.

— Elle est exactement comme dans mes rêves. Comment cela se fait-il que je m'en souvienne à la perfection de l'extérieur alors que je n'y ai vécu qu'un an à peine ? lui demandé-je. A-t-on des super pouvoirs sur Malurn ?

Amaël ne m'a pas quitté des yeux depuis que j'ai osé lui faire un bisou sur la joue pour le remercier. Ma question a dû l'amuser, car son sourire refait surface et celui-ci s'étire au fur et à mesure. Est-ce que cet énergumène ne serait pas à l'origine de la vision de ma maison ?

— J'ai une mémoire de super héros ou alors c'est toi qui m'as fait imaginer ma propre demeure ?

Son sourire se veut de plus en plus franc. L'instant où Amaël perd ses moyens et ses émotions semblent révolues alors que celui-ci ne date que de quelques secondes. Sa capacité à changer aussi rapidement de comportement m'impressionne.

Au vu de son attitude, je me doute bien qu'il est derrière tout ça. Je n'ai donc pas de super-mémoire, j'avoue être un peu déçue. Mais le fait qu'Amaël est songé à reproduire ma maison dans mes rêves est surprenant. Il n'est peut-être pas sans cœur en fin de compte.

— Avançons ! Nous avons pas mal de routes à parcourir, finit-il par dire en m'invitant à le suivre à nouveau.

Il fuit presque instantanément mon regard et reprend la marche dans ce tunnel étroit. Je commence à imaginer qu'il n'apprécie pas spécialement que quelqu'un croie qu'il fait attention aux autres. Monsieur a un trop fort d'amour-propre. Je tiens quand même à exprimer ma gratitude et ma voix se perd dans le silence qui règne sous terre.

— Je ne te pensais pas capable d'une si gentille attention. Comme quoi, tu n'es pas un abruti fini finalement. Je t'en remercie.

Mes mots ne le font pas se retourner, mais je vois ses muscles dorsaux se contracter et ses épaules s'affaissent de plus en plus, comme si mes paroles ont suffi à apaiser ses maux et sa tristesse.

Après quelques heures à marcher dans le froid et l'humidité du tunnel, nous finissons par arriver dans une petite clairière où trône un chalet en chaud devant le lit d'une rivière. Il donne un certain charme à l'endroit. La végétation est totalement l'opposé de celle à côté de Malurn, plus verdoyante. Les fleurs sont aussi bien différentes. Les coquelicots ont été remplacés par des jonquilles et des primevères au couleur du soleil. L'atmosphère qui règne ici est si paisible que l'on entend les oiseaux gazouiller dans les arbres. Je me demande à quelle distance nous nous trouvons de la ville.

— Pourquoi m'as-tu amené dans cet endroit et non pas chez tes parents, Amaël ?

— Ton arrivée sur Malurn a été compromise et je suis sûr, ou presque, que le gamin est allé prévenir les gardes que tu es sur Malurn. Le fait que je me ramène à la demeure de Soen n'est pas dû à un hasard. Le roi le sait, en plus il voit bien que nous sommes de plus en plus actifs ces derniers temps. Il vaut mieux que l'on reste ici pour le moment et que l'on attende de voir ce qu'il va se passer.

— Mais tes parents ne sont pas en danger chez eux ?

— Ne t'inquiète pas pour eux, mon père a vu pire qu'une descente chez lui pour fouiller dans sa maison afin de nous trouver. Et puis, ma mère usera de ses charmes pour les faire partir. Il n'y a aucun souci à se faire pour eux.

— Tu as l'air bien sûr de toi quand même. Et si, ils viennent jusqu'ici ?

— Personne ne connaît l'existence de cet endroit mise à part les hommes de ma famille. Et mon père ne vendra pas la mèche même sous la torture, me dit-il en me souriant, pas stressé pour deux sous.

— Si tu le dis, lui réponds-je absolument pas convaincue.

Amaël se dirige vers plusieurs pots de fleurs bordant l'entrée de la maison en bois. Il soulève l'un d'entre eux pour récupérer la clef permettant d'ouvrir le chalet. À croire que les cachettes terrestres sont les mêmes sur Malurn.

— Je t'en prie entre, déclare Amaël après avoir poussé l'imposante porte.

La décoration intérieure est très rustre et très différente de celle de mes parents. On voit très bien que la touche féminine n'a pas été ajoutée à l'endroit. Seuls des fusils sont accrochés au mur accompagné d'une charmante tête de cerf. Je devine assez aisément que je me trouve dans une maison de chasseur.

— Fait comme chez toi ! intervient Amaël. Je dois passer un rapide coup de fil à Borac pour qu'il enquête sur le gamin de ce matin.

***

Coucou !

J'espère que vous allez tous très bien. Me revoilà aujourd'hui pour un nouveau chapitre j'espère que celui-ci vous plaira. La suite s'annonce de plus en plus mouvementée et puis la fin commence à pointer progressivement le bout de son nez... Mais je ne vous en dis pas plus, je vous laisserais le plaisir de lire cela les semaines qui arrivent :)

Comme d'habitude, n'hésitez pas à commenter ainsi qu'à voter cela me ferait plaisir et me permettrait de savoir si vous appréciez toujours votre lecture ;)

Bisous et à bientôt :)

Dans les songes de Kaelia [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant