Cœur froid

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Godric's Hollow. 31 octobre 1981.


Une silhouette sombre, dissimulée sous une cape noire, arriva dans le petit village calme. Avec le froid piquant qui régnait, il n'y avait personne d'autre dans l'unique rue.
Près de lui, un homme, petit et légèrement bedonnant, se tenait replié sur lui-même, obséquieux. D'une main tremblante, il pointa un espace qui apparaissait vide devant eux et tendit un morceau de parchemin.


La silhouette s'en saisit d'une main pâle, faisant trembler le plus petit des deux, et lut ce qui était inscrit. L'instant suivant, une maison apparut à leurs yeux, comme par magie. C'était une petite maison simple, pourvue d'un étage, à l'air chaleureuse. Le genre de maison parfaite pour accueillir une gentille famille, avec des enfants criant et riant dans chaque pièce.


L'homme sous la cape émit un grognement satisfait, et fit un geste brusque du bras pour inviter celui qui l'accompagnait à quitter les lieux. Comme il hésitait, l'homme ricana.
- Tu veux peut être entrer avec moi Queudver ? Leur montrer que tu es la cause de leur chute ?
Il n'en fallut pas plus pour décider le dénommé Queudver à fuir les lieux, alors que l'homme sous la cape ricanait d'un air mauvais. Il savait que le couard qui avait rejoint ses rangs n'aurait jamais osé faire face à ses anciens amis...

Une bourrasque de vent décida la silhouette à avancer lentement. Il était venu pour une raison précise, pour prouver au monde magique qu'il était puissant. Plus puissant qu'une prophétie idiote. Comme si un bébé pouvait venir à bout de lui... L'idée même était ridicule.


D'un pas lent mais décidé, il avança vers la petite maison, détaillant les lieux avec curiosité. Le genre d'endroit qui l'avait fait rêver quand il était petit. C'était le rêve qu'il faisait parfois, qu'une famille vienne et l'emmène dans un tel endroit. Mais personne n'était jamais venu pour lui, et il avait fini par repousser cet espoir insensé.
Depuis qu'il menait ses Mangemorts, il se faisait un devoir de réduire en cendres les jolies maisons de moldus de ce style. De leur montrer que leur cocon de bonheur ne les protégerait pas finalement, il était plus puissant que tout ça. Il n'avait peut être pas eu tout ça, mais... il avait tellement plus.


Devant la porte de la maison, il leva sa baguette et lança un Bombarda pour la faire exploser. Le battant de bois sortit de ses gonds, lui laissant le passage. A l'intérieur, des cris de panique s'élevèrent et il savoura le moment.
Il repoussa le capuchon de sa cape, dévoilant des yeux rougeoyants - un abus de magie noir avait fini par colorer ses pupilles - et une peau pâle. Ses cheveux noirs contrastaient avec son teint, lui donnant un air presque fantomatique.

Il entra sans se presser, certain de la conclusion de cette journée. D'ici peu, les occupants de cette maison seraient morts, et lui serait encore plus puissant. Impossible à arrêter.
L'homme se posta devant lui, vociférant, baguette sortie. Il le toisa un bref instant, pouvant presque sentir la peur émaner de lui. L'instant d'après, il jeta l'impardonnable.


Un éclair vert, et James Potter était au sol. Mort.
Les yeux grands ouverts, ses traits montraient la peur qu'il avait ressenti durant ses derniers instants. D'un air indifférent, Voldemort l'enjamba, sans le moindre sentiment. Ni haine, ni joie. Ni tristesse, ni soulagement. Il était une coquille vide, avec un coeur froid. Il ne vivait que pour le pouvoir, que pour gagner et atteindre enfin des objectifs.


En entendant du bruit à l'étage, il commença à gravir les marches, toujours de son pas lent. Il tuerait l'enfant, et laisserait la mère en vie si elle se montrait raisonnable. Il savait que l'un de ses mangemorts l'appréciait, et lui offrir la femme même si elle était une sang-de-bourbe pourrait renforcer son allégeance...

Il arriva devant une porte, sur laquelle des lettres en bois coloré annonçaient "Harry". La chambre de l'enfant miracle de Dumbledore. Il lança de nouveau un Bombarda, et entra, ignorant les sanglots de la mère. Le gosse était dans son petit lit, pleurant, les mains tendues vers sa mère.


Il offrit à Lily de vivre. Calmement. Il lui proposa de quitter la maison, et de laisser son enfant. Il ne la poursuivrait pas.
Mais elle hurla, refusant. Elle se plaça devant son fils, le suppliant. Offrant sa vie pour sauver son fils.


Même s'il n'avait aucuns sentiments, Voldemort reconnut le courage de cette mère prête à tout pour son enfant. C'était stupide, mais il y avait une certaine beauté dans son sacrifice.
Il leva sa baguette lentement, pour lui laisser le temps de changer d'avis. De sauver sa propre vie : après tout, elle pourrait avoir autant d'autres enfants qu'elle le voulait !


Mais Lily Potter resta fermement campée devant lui, protégeant de son corps Harry. Lui offrant encore et encore sa vie, pour sauver son fils.
Avec un soupir presque ennuyé, il jeta le sort de mort. Lily fut nimbée d'une lueur verte, de l'exacte teinte de ses yeux. Puis elle s'effondra comme une poupée de chiffon, ses yeux grands ouverts fixant le vide. Derrière elle, dans le petit lit, le gamin s'était hissé sur ses jambes potelées et hurlait en tendant le bras à travers les barreaux.


Voldemort prit le temps de le dévisager. Un petit garçon visiblement en parfaite santé, gâté et ne manquant de rien. Entouré d'amour. Sous une masse de cheveux noirs en désordre, il rencontra deux yeux verts. Vert absinthe, vert Avada.
Ainsi, c'était là l'espoir de la lumière. Le sauveur annoncé par une prophétie, celui qui était né pour le défier et le vaincre. L'enfant n'avait rien de spécial. Il était un bébé comme tant d'autres, magiques ou moldus. Un bambin sans défenses, et il allait assurer son avenir en mettant un point final à sa courte vie.


Harry Potter ne grandirait jamais, ne deviendrait jamais puissant, et ne le tuerait jamais, lui, Lord Voldemort.
En tuant cet enfant, il allait supprimer tout espoir pour asseoir sa domination. Il avait atteint une certaine forme d'immortalité en créant des horcruxes, faisant de lui l'être le plus invulnérable qui puisse exister.


Avec un rictus satisfait, Voldemort leva lentement sa baguette et prononça les deux morts qui devaient changer la face du monde.
L'enfant face à lui avait cessé de hurler et il le fixait les yeux pleins de larmes. Il ne semblait pas vraiment effrayé. Juste curieux.


Le rayon lumineux vert fusa de sa baguette et il y eut une explosion lumineuse d'une force sans précédent.

Tu es mon doubleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant