✥ 十三 ✥

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Une soirée de fin d'été.

Le soleil se couche là-bas, au pied des montagnes. Il a l'air si éloigné. Et pourtant, il est si présent dans chaque coin du ciel rosé.
Je suis allongé sur l'herbe de la colline, au premier rang de ce spectacle que m'offre la nature chaque soir d'été. L'herbe s'agite doucement au passage du vent. Mes cheveux avec. Je suis apaisé. On entends les cloches de l'église sonner et les agriculteurs crier au loin sur leur bétail. Je ne veux jamais quitter cet endroit. J'inspire un bon coup de cet air si frais.
Puis je sens que sa main dégage les mèches qui vont dans mon œil. Tendrement, patiemment, il les chasse de mon front, une à une.
Je me tourne dans sa direction et lui adresse le plus beau de mes sourires.
Lui me regarde, aussi amoureusement que les jours précédents, avec son petit demi-sourire attendrissant. Le vent tiède souffle sur nous.

Mais au fond de moi, une petite voix hurle. Elle est trop enfouie en moi pour que je puisse lui accorder trop d'importance, mais elle est quand même bel et bien là. Elle hurle à longueur de temps, elle hurle plus fort chaque jour qui nous rapproche de l'automne. Chaque jour qui nous rapproche de la routine scolaire.

Je ne suis pas sot, M?r? n'est pas tombé du ciel. Il vient d'ailleurs. C'est ce qu'il y a de plus effrayant. Il vient d'ailleurs et y retourna forcément à un moment. Et le début d'une nouvelle année est logiquement le moment d'un retour chez soi.

Cette vérité flagrante, j'essaie de ne pas trop y penser. Je préfère rêver qu'il est éternel, et que, comme un ange gardien, il restera là pour toujours. Qu'on sera unis à jamais. Qu'on profitera de chaque jour comme d'un jour d'été.

Le vent souffle sur nous, plus fort, mais toujours aussi tiède.

Au fond de ses yeux noirs, il y a un fragment de tristesse constante. Comme un nuage sur un ciel orange. J'aimerais lui poser des milliers de questions. Sur lui. Sur sa vie, ses origines, ses parents. Mais je sens, je comprends bien, rien qu'à regarder dans ses magnifiques yeux, que ce n'est pas le moment. Que s'il part un jour, il vaut mieux profiter de la moindre petite minute passée ensemble comme si jamais il ne partirait plutôt que de se réveiller chaque matin en comptant les jours avant l'adieu.

M?r? me prends la main. Il me la serre très fort, comme s'il avait tout entendu de mon dialogue intérieur. Il a l'air très ému. Il me prend fort dans ses bras et me dit tout doucement, dans une autre langue :

"George Sand disait, Il n'y a qu'un seul bonheur dans la vie, d'aimer et d'être aimé. Peu importe où je serai, je t'aimerai tout entier d'un amour démesuré."

~ 𝒬𝓊𝒾𝑒𝓇𝑜 𝓈𝒶𝒷𝑒𝓇 𝓂𝒶𝓈 𝒹𝑒 𝓉𝒾. ~Where stories live. Discover now