Chapitre 4

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Mon monde s'arrêta brusquement, je ne voyais plus rien, n'entendait plus, Mia avait disparu de mon champ de vision et le vide s'était installé dans mon cerveau. J'essayais de réfléchir à quelque chose, de trouver quoi faire, une réaction, quelque chose à dire pour m'extirper seulement j'étais complètement bloquée. J'essayais de trouver les mots seulement j'avais complètement perdu la capacité de parler ou bien même de former des phrases, comme-si elles souhaitaient me pousser dans mes retranchements. Appelez-moi lâche si vous voulez, mais ma priorité à cet instant était de fuir, je n'étais pas prête et ma meilleure façon de fuir depuis ces onze années avaient été de m'enfermer dans le travail.

"On va passer à l'action parce que clairement il y a tout qui ne va pas, est-ce que tu peux dire, d'après tes observations, sur quoi on devrait se pencher."

Mia sembla prise de court par mon changement de conversation et de comportement toutefois elle ne me questionna pas et comme elle savait si bien le faire, elle rentra dans son rôle de professionnelle.

"Il y a un gros problème d'organisation, je pense que c'est pour ça qu'ils prennent autant de retard. Par exemple, ils s'occupent tous d'une table choisie un peu au hasard on dirait bien, du coup ils se retrouvent à s'occuper de prendre les commandes, les envoyer en cuisine, les servir, répondre à chacun de leurs désirs et faire l'encaissement, mais ils pourraient au moins faire une sorte de zone ? Parce que là, Ahmed, il a notre table, plus une en terrasse et deux autres en salle seulement les tables sont toutes éloignées entre elles c'est une perte de temps monstrueuse !

-Tu as raison, dans ce cas-là soit tu fais des zones avant le début du service comme tu l'as dit, sois tu répartis les tâches. Allons-y."

C'était à mon tour d'endosser mon rôle de PDG. Commis, cuistot, chef, Manager, serveuse, j'en avais fait des petits boulots et j'y avais toujours été très bonne. C'était mon travail, un domaine dans lequel je m'en sortais très bien. C'était ce que je faisais le mieux. Je m'étais levé avec des jambes en coton, flageolantes à l'idée qu'elle m'avait peut-être vu, ou peut-être pas. Je ne savais pas et cela me rendait incroyablement nerveuse. Néanmoins je gardai la tête haute et le dos droit, je savais que j'avais une certaine prestance et aujourd'hui je comptais bien l'utiliser à mon avantage. Je voulais montrer que j'avais confiance en moi, même si intérieurement j'étais roulée en boule, effrayée.

J'approchai Ahmed qui était au niveau de la caisse, toujours avec Mia dans mon dos qui suivait chacun de mes pas.

"Rassemble tout le monde en cuisine le temps de cinq minutes, s'il te plaît, je lui demandais, une main posée sur son épaule."

La porte qui menait à la cuisine du restaurant se trouvait juste à droite du comptoir tandis qu'à sa gauche il y avait la porte vitrée qui menait à la terrasse. Je me concentrai sur celle de droite et alors que j'allai la franchir pour mettre un mur entre elle et moi je me retrouvai tout simplement bloquée. Bloquée par mes pensées, par mon cerveau, par mes gestes, par mon cœur; elle était juste là, à quelques mètres de moi, je n'avais qu'à me retourner.

J'avais imaginé ce moment des milliers de fois, je l'attendais depuis le jour où j'étais parti et depuis il n'y a pas eu une seconde où je n'ai pas pensé à elle.

Alors pourquoi aujourd'hui je voulais tant la fuir ? Je pourrais tout simplement lui jeter un rapide regard.

Du coin de l'œil je vis que mes employés commençaient à me rattraper, ainsi je leur ouvris la porte tout en me décalant pour leur laisser le passage vers la cuisine ouverte.

C'est à ce moment-là que je m'autorisai à la chercher du regard et comme-si j'avais un radar en moi qui saurai toujours où elle se trouvera, mes yeux la trouvèrent instantanément et rencontrèrent son regard. Durant une milliseconde, je pus à nouveau regarder dans ces magnifiques yeux puis je refermais la porte tout aussi rapidement, mettant fin à cet échange. Il me fallut quelques secondes avant de parler à mon équipe, pour m'en remettre, pour respirer à nouveau, pour que mon cœur se stabilise.

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