40. Les tribulations d'une libraire

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Catastrophe, c'est le cas de le dire : Minette a tout foutu en l'air. Tout. Les pots de plantes, la télé, les épices de la cuisine, le canapé... Même la boîte de thon que Gégé avait laissée à son attention a valdingué à l'autre bout de la maison !

Il ne m'en faut pas plus pour fondre en larmes, complètement dépassée par la situation. Je n'ai même pas encore repéré l'emplacement du balai !

Bien sûr, la coupable en profite pour s'échapper.

— EH ! REVIENS ICI, ESPÈCE DE SAC À PUCES PUTRESCENT !

Mais dans un vain élan pour la rattraper, je bute contre la table basse et écrase la patte de Pépette, qui pousse un hurlement qui déchire mon cœur de l'intérieur.

— Nom d'un clic-clac cassé ! Pardon, mon toutou d'amour !

Je ne vais pas pouvoir cohabiter avec ce chat pendant deux mois.

Pourtant, il faut impérativement que je nettoie ses bêtises avant d'aller me coucher. Gérard serait capable de m'avoir prankée et de se pointer comme une fleur au petit matin, sous prétexte de tester notre compatibilité amicale ou je ne sais quel concept qu'il a découvert dans le dernier numéro de Marie Claire – il y est secrètement abonné depuis 1987 !

Pour les poils de son chien, en revanche, je ne peux rien... Raison de plus pour retrousser mes manches et lustrer ce parquet pourri pour qu'il brille comme une boule à facettes à son retour, demain comme dans deux mois.

Oui, enfin... Ne soyons pas trop optimistes, quand même.

🧡🧡🧡

Quatre heures d'aspirateur et de serpillière plus tard...

Je peux enfin aller dormir.

Bon, je dois me lever dans deux heures pour me rendre au travail, mais ce n'est qu'un détail, pas vrai ? J'ai quand même le droit de profiter de mes cent vingt minutes de sommeil restantes !

Cent dix-neuf, à présent.

Par chance, je ne mets pas longtemps à grincer des dents en pensant au corps sans vie de Minette, tragiquement écrasée par l'une des voisines de Gérard. Ça ressemble plus à un rêve qu'à un cauchemar, mais je ne m'inquiète pas : bons comme mauvais, mes songes ne se réalisent jamais.

🧡🧡🧡

Un jour plus tard, samedi 15 juin 2024...

Par (mal)chance, je retrouve ma némésis féline à l'arrêt de bus. Elle me nargue depuis l'autre bout de la chaussée, les poils hérissés et les pupilles rétractées, comme si elle aussi cherchait un moyen de me tuer.

Nous sommes visiblement animées par la même envie de meurtre.

— Tu ne perds rien pour attendre, sale cloporte nécrosé ! beuglé-je en étouffant un bâillement.

Une fois arrivée au Leclerc, je pâtis rapidement des effets secondaires de ma micro-insomnie : mon dos me fait un mal de chien – désolée, Pépette –, et mes paupières se ferment chaque fois que j'ai le malheur d'aller chercher un livre dans la réserve.

— Zzz... Zzz...

— ÉMILIE.

— Hein ? Que ? Quoi ? Quiche ?

Je me réveille en sursaut et découvre la tête de Jade à seulement quelques centimètres de la mienne.

La tête pas contente de Jade.

Non, pas contente du tout.

— Tu étais en train de sucer ton pouce, commente-t-elle en arquant l'un de ses sourcils parfaitement épilés.

LES AMOURS ÉPONYMES 1Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin