You should love for no reason

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Je sors de la salle de bain tout en me séchant les cheveux. Je garde la serviette sur ma tête le temps de boire un verre de lait bien frais. Cela va faire une semaine que je n'ai couché avec aucune autre femme que Éva. Lorsque je pense à elle, les battements de mon coeur ressemblent à des grognements d'excitation. Son sourire et son rire sont gravés dans ma mémoire et lorsque je ferme les yeux, je ne vois que son visage. Putain, je suis gravement atteints par cette idiote. Elle qui refuse de tomber amoureuse alors qu'elle ne cesse de parler d'amour et de lire des romans. Elle est si compliquée mais c'est ce qui la rend si belle. Ses courbes, son sourire, son regard, son rire. Bordel, son rire. Je souris rien qu'en me remémorant cette douce mélodie. Je ferme les yeux et fronce les sourcils. Je suis fou d'amour pour une fille qui vomit ce sentiment. Je pose mon verre dans l'évier et me dirige dans ma chambre pour enfiler un caleçon. Je pose les serviettes dans la salle de bain puis me dirige dans le salon pour mater un film. La main sur le ventre, je baille d'une façon peu charmante. La bouche grande ouverte, la porte s'ouvre. Devant moi, complètement chamboulée, le regard perdu, se trouve Éva. Ses cheveux détachés sont emmêlés, il ne reste qu'une fine couche de son rouge à lèvre et sa robe vintage lui resserre la taille pour s'évaser au niveau des hanches. Elle est magnifique, même dans cet état désemparé. Elle se précipite vers moi, fermant la porte à la volée.


"- Je n'ai aucune idée de ce que je viens faire ici, de pourquoi mon coeur, mes jambes voulaient tant venir. Je ne le désirais pas vraiment. Te voir, passer du temps en ta présence est quelque chose que j'apprécie beaucoup. Tu es gentil, à l'écoute, prévenant, intelligent, tu as de la culture et de la discussion, tu es gentleman, parfois très beauf mais c'est amusant. Tu ne m'ennuies jamais et avec toi à mes côtés, je dis adieu à la monotonie ! Tu me fais me sentir si bien avec moi même, tu.. Je n'ai aucune foutue idée de pourquoi je déballes tout cela mais j'en ai besoin. J'ai besoin de parler, de tout extérioriser, j'ai besoin que tu entendes mes mots. Maxime, je n'ai aucune envie de vivre une histoire d'amour, de dire bonjour aux clichés de la vie, de me marier, d'avoir des enfants maintenant. Tout ce bazar que la société nous impose pour rentrer dans les codes, je n'en veux pas ! Je veux voyager, je veux partir, je veux vivre tout simplement et être heureuse ! J'aime nos moments, j'apprécie ta personne bien plus que je ne le désire, bien plus que je ne l'acceptes mais je ne fais que fermer les yeux sur ces sentiments. Tu arrives toujours au bon moment, ou au mauvais mais cela rend le moment parfait. Parce que c'est toi. Et je n'ai aucune idée de ce que je déballe mais mes mots sortent tels quels et je-"


Et je l'embrasse sans lui laisser le temps de terminer son monologue. Et je t'aime silencieusement, Éva. Nos lèvres se rencontrent avec brutalité. Nos corps s'entre-choquent, nos mains se baladent et nos souffles se mélangent.


"- Disons adieu à cette règle stupide de refuser l'amour.

- Je ne veux pas-

- Je sais. Et nous n'aurons pas d'étiquette, nous ne sommes pas un couple. Simplement deux personnes qui ressentent de fortes émotions envers l'autre. Cela te va ?

- Embrasse-moi."


Je ne me fais pas prier pour retrouver ses lèvres. Je sais combien elle a peur. Ce n'est pas l'inquiétude d'aimer qui la hante, c'est celle de la non réciprocité de ses sentiments, l'affliction de se retrouver seule et remplacée de nouveau, de ne pas suffire. Mais Éva est la seule personne qui me fasse sentir si vivant. Je la déshabille et contemple son corps comme s'il s'agissait d'une oeuvre-d'art. 


"- Ton corps est un chef-d'oeuvre dont je ne pourrais jamais me lasser. Tu es ma Mona Lisa."


Je lui souffle ces quelques mots, sentant sa respiration se couper, son coeur rater un battement avant de battre plus fort contre le miens. Je lève ses cuisses et porte mon preux chevalier jusque dans la chambre, l'allongeant avec douceur sur les draps. Ses mains viennent caresser ma nuque, son regard se plante dans le miens. Comment ne pas tomber pour une femme aussi belle ? Ses pommettes rougies, son regard désireux, ses lèvres entres-ouvertes, ses mains si douces, ce corps si parfait... Et sa voix cassée par l'envie.


"- Je t'embrasse, je te baise. Je suis fou. Si tu étais là, je te mordrais. Oui je me sens maintenant des appétits de bêtes fauves, des instincts d'amour carnassier et déchirant ; je ne sais pas si c'est aimer. C'est peut-être le contraire. Peut-être est-ce le cœur, en moi, qui est impuissant. Lettre de Gustave Flaubert à Louise Colet.

- Quand on veut bien se donner la peine de regarder quelqu'un, de le prendre dans ses bras, de le respirer doucement, d'écouter comment son cœur bat, comment la vie circule en lui, on entend alors beaucoup de choses silencieuses. Jacques Salomé."


Elle me répond par un sourire sincère et léger comme si ma phrase était ce qu'elle désirait le plus entendre. Ce n'est qu'une citation d'amour, des mots pour des mots. Mais cet échange est notre façon à nous de nous exprimer, de nous dévoiler sous des phrases déjà prononcées, lues et écorchées par bon nombres de personnes. Ce sont nos preuves que quelque chose de silencieux existe entre nous. Quelque chose que nous désirons fuir mais contre lequel nous ne nous battons pas. Des sentiments indésirables que nous ne chassons pas. Au contraire, nous les gardons en nous et les laissons s'exprimer librement. Dans un désir non dissimulé, mes lèvres capturent les siennes et ses gémissements se perdent dans les bruits de la ville nocturne. 


Alors qu'elle se lève, je la retiens avec douceur par le poignet. Elle se retourne lentement, légèrement surprise de mon geste.


"- Voudrais-tu rester pour la nuit ?

- Me jetteras-tu au lever du soleil ?

- Je ne le pourrais. Tu seras sans doute déjà partie."


Elle réfléchie puis sourit.


"- Il est vrai. Je suis une femme indépendante."


Sur ces mots, elle m'embrasse puis s'en va en direction des toilettes. Je me rallonge dans le lit et soupire. Cette femme me rend fou. Je le sais. Éva s'en va. Et lorsque la porte d'entrée claque, j'en suis plus que certain. A moitié nue, seulement vêtue d'une culotte et de l'un de mes hauts, mon preux chevalier vient de s'échapper. Il est bientôt vingt-trois heures. Et je me retrouve seul avec mes pensées. 


De Eva : 23:01

"Pardonne-moi. J'ai fuis sans savoir pourquoi. J'ai eu peur. Je ne souhaites pas aimer. J'aime ta personne mais l'amour m'effraie. Je ne veux pas m'attacher de nouveau pour finir blessée bien que ce soit le but même de la vie et de l'amour. Je suppose que j'ai besoin de temps."


De Maxime : 23:07

"Ou ne suis-je simplement pas la bonne personne. Je ne suis peut-être qu'un pansement, une aide pour que tu oublies ta douleur et ta peur. Et lorsque tu seras prête, tu m'arracheras de ton coeur pour vivre pleinement l'amour. Ne t'en fais pas Éva. Tu n'as pas à t'en vouloir puisque c'est ce que tu es pour moi. Un pansement pour oublier qu'un jour j'ai aimé une femme qui m'a brisé. Nous sommes si différents mais si complémentaires. Nous nous utilisons pour soigner notre peur, pour combler nos besoins, nos envies. Souhaites-tu continuer cette aventure dérisoire, chère Éva ?"


Je ne reçois la réponse qu'une demi-heure plus tard.


De Eva : 23:41

"- Je le souhaites de tout coeur. Nous irons mieux ensemble mais nous serons guéris séparément."


Je lève les yeux, scrutant le ciel étoilé. Pourquoi est-ce que je me sens si vide alors que je suis comblé ? Je ferme les yeux à cette douleur. L'amour n'est qu'un caprice.

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