24: Pike

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Nous y voilà pensa Bradford en observant la tapisserie défraichie et les vieux meubles qui trônaient dans cette pièce.

Il le savais, il ne lui manquait que quelques confirmations pour pouvoir dire sans hésitations qui était le meurtrier. Mais ce qu'il ne savait pas, c'est qu'en ce moment même une personne qui avait une indication cruciale à leur fournir toquait frénétiquement à sa porte.

La bouilloire, qui sifflait depuis qu'ils s'étaient installés, s'arrêta soudainement, et quelques instants plus tard, Alfred arriva dans la pièce avec un plateau sur lequel trônait les boissons chaudes.

-Excusez moi de vous avoir fait attendre... Bafouilla-t-il en s'asseyant sur le seul fauteuil qui n'était pas occupé.

Un silence pesant s'installa, et après avoir pris une gorgé de la boisson, il fut brisé par la toux de Victor qui venait de s'étouffer.
Il n'arrivait pas à savoir si c'était du thé, de l'eau de marécage, ou de l'urine. La mixture immonde avait un gout tellement ignoble et fort, que le jeune garçon ne put s'empêcher de faire une moue dégoutée.

Personne n'osa toucher à sa tasse après cet événement, et Bradford pris la parole après s'être éclairci la voix.

-Bonjour monsieur Pike. Je me présente, je suis Andrew Bradford, et voici mes collègues, Victor Smith, et  Adélaïde Cook. Commença-t-il en désignant d'un geste de la main ses acolytes.

Le blond paru surpris d'entendre ces noms. Connaissait-il déjà l'identité de ses visiteurs?

-Nous sommes ici pour vous poser quelques questions....

-C'est par rapport au meurtre d'Henry n'est ce pas? Coupa Pike d'une voix plus dure que précédemment.

-Exactement.

Un autre silence s'installa. Seul le bruit des goutes de pluies qui s'écrasaient contre les fenêtres brisait le calme de la pièce.

-Je n'ai rien à vous dire. Déclara l'homme en se levant de son siège.

Il commençait à tourner les talons pour amener leurs vestes aux visiteurs, signe qu'ils étaient priés de partir, lorsqu'Adélaïde pris la parole.

-Vous aimez Emilia n'est ce pas.

Le blond se figea net, et sans bouger, sans même tourner la tête vers son interlocutrice, répondit:

-Bien sûr. C'est ma cousine.

-Non ce n'est pas ce que je veux dire. Repris de suite la rousse. Vous l'aimez depuis toujours. Vous êtes amoureux d'elle, mais vous ne pouvez pas assouvir votre amour. D'une part car elle est votre cousine, mais aussi car elle est mariée.

-Elle ETAIT mariée. Précisa l'homme en tournant ses yeux verts en direction de la rousse. 

-Exactement. Elle ne l'est plus dorénavant. Maintenant qu'elle est célibataire, qu'est ce qui vous empêche d'aller la voir, et de lui déclarer votre flame.

Un silence toujours plus pesant et intense lui répondit. Un silence lourd de sens. Il se l'interdisait, et c'est normal. Mais qui sait ce qu'un homme qui refoule des sentiments si profonds depuis tant de temps peut faire.

-Je ne l'ai pas tué. Je ne veux pas qu'Emilia soit malheureuse. Chuchota Pike en plongeant son regard dans les yeux noisettes d'Adélaïde.

Cette dernière en fut quelque peut déstabilisée, et dans ce genre de moments de faiblesse, les voix prenaient le dessus, et se déchainaient.
C'était si douloureux! Tout ce qu'elle voulait était que ça s'arrête.

Elle se leva brusquement, s'excusa au près des trois hommes, et pris pour excuse de devoir aller se repoudrer le nez pour pouvoir s'éclipser.
Sur le rebord de l'évier de la salle de bain dans laquelle elle s'était enfermée, un rasoir paraissait l'appeler. C'était comme si on la poussait inexorablement vers la lame.

Intérieurement elle hurlait, mais son corp ne pouvait pas s'empêcher d'approcher. Elle se vit saisir le rasoir, sans pouvoir réagir. C'était comme si son corp était une marionnette, contrôlée par une force aux funestes pensés.

Elle se sentait prisonnière de son propre esprit. Elle se débâtait pour relâcher l'objet, mais son corp ne l'écoutait pas. Le visage baigné de larmes, la main tremblante, elle vit la lame s'approcher de son bras, puis d'un geste brusque le jeter au loin. Elle avait réussi à reprendre le control.

Désespérée, elle se laissa glisser le long du mur, et enfouis son visage trempé de larmes entre ses mains. Encore une fois, elle avait failli succomber sous la puissance des voix.

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A SUIVRE

Tome 2: Les ombres de la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant