- Maman ! Je vais bien. Tout va bien. Regarde...Je suis là.

- Oh Gabriel !

Elle se jette sur moi et j'ai soudain l'impression en passant mes bras autour de sa taille que ma mère a perdu un peu de poids par rapport à cette fois où je l'ai quitté sur le quai de la gare.

- Tu m'as fait peur sale petit con !

Forcément, après le câlin, vient le claque.

- Je suis désolé...Je suis vraiment désolé.

Crois-moi, je suis le premier qui regrette, car au final, je n'ai rien pu faire. Je n'ai rien pu changer. Je n'ai même pas pu sauver une vie et je...

- Est-ce que je peux parler à Basile ? Je ne le vois pas.

- Il est parti voir ta grand-mère. Je vais le chercher. On va échanger.

- Merci.

Avant qu'elle ne passe la porte, je lui souffle alors :

- Je t'aime maman. Je t'aime, je t'aime, je t'aime. Je ne te l'ai pas dit assez souvent.

- Je me le tatouerais sur les fesses si tu veux !

Quoi ? Non! J'ai du mal à imaginer....Ah vision d'horreur !

Pardonne-moi maman. Pardonne ton unique fils du mensonge honteux qu'il vient de dire devant toi sans même sourciller, mais tu sais, ça ne va pas. J'ai mal. Vraiment mal. J'ai mal au cœur plus qu'à la tête et je me demande si quelque chose ne clocherait pas chez moi. J'ai mal comme si on me l'écrasait, me le comprimait. C'est étouffant.

Quelques minutes plus tard, la porte s'ouvre à nouveau suivi d'un grand fracas. A peine ai-je le regard au sol, que je vois Basile, étalé de tout son long, face contre terre et pieds en l'air.

- Aïe...

- Est-ce que ça va ?

Il se retourne sur le dos en roulant et semble totalement à bout de souffle comme s'il venait de courir le 100m.

- J'ai couru, tu sais ? J'ai vraiment, vraiment couru de toutes mes forces. Mais j'ai bousculé tout le monde, je me suis mangé une plante en plastique et un grand-père m'a donné un coup de canne aux fesses. Mais j'ai couru. J'ai couru aussi vite que je le pouvais.

- Je sais...

Il se redresse et en une fraction de seconde, bondi sur le lit, me prenant dans ses bras et manquant de m'arracher ma perfusion.

- Tu m'as manqué ! Bienvenue parmi nous.

- Je suis désolé Basile...De ne pas t'avoir écouté. De ne pas avoir...

- Chut. Ne parlons pas de ça maintenant, ok ? Je n'ai pas envie de parler de ça. Le médecin nous a dit que tu as besoin d'un repos absolu et je suis du même avis, mais avant j'ai quelque chose à te dire et je veux que tu m'écoutes jusqu'au bout, sans m'interrompre.

- La dernière fois que tu m'as demandé ça, ça n'a rien présagé rien de bon.

Je ne partirais pas Basile, tu le sais ça ? Est-ce que tu t'en rends compte maintenant ? Je ne m'en irais pas loin de toi. Pas comme ça. Pas d'un claquement de doigts.

- J'ai beaucoup réfléchi à tout ça. J'ai eu quelques jours pour et j'ai quelque chose à te dire Gabriel. Quelque chose que j'ai sur le cœur et qui me fait mal. Mais c'est un mal qui me fait du bien. Je n'ai jamais été un garçon très honnête, tu vois ? Je me suis caché derrière une façade, derrière un masque en essayant de me protéger. Je ne suis qu'un lâche. Un faible. Je me suis fermé à beaucoup de choses parce que j'ai voulu penser à moi sans prendre les autres en considération. Et puis, tu es arrivé et t'as tout chamboulé. Genre vraiment. En plus de laisser traîner tes caleçons de mon côté de l'armoire dans l'espoir que je les mette, je...

- Alors ça, c'est faux ! Moi ? Laisser traîner mes affaires dans un but aussi vil et perfide ? Jamais de la vie !

Si, je l'ai fait.

- Laisse-moi parler, je n'ai pas fini.

- Pardon...

- Et entre nous, on sait très bien que tu l'as fait exprès. Donc, voilà, je voulais te dire que...que...que...

Je le vois se contracter de partout comme s'il essayait tant bien que mal de retenir un prout ou quelque chose d'aussi dangereux.

- Si tu veux me dire que tu m'aimes, je le sais déjà. Je n'ai pas besoin de l'entendre. Tu sais Basile, je n'ai pas envie que tu te sentes forcer à faire quoi que ce soit et je n'ai pas envie de perdre mon temps avec ça non plus. Je sais ce que tu ressens et tu sais ce que je ressens aussi. On n'est pas obligés de se lancer dans de grandes déclarations et des discours épiques. Tout ce que je souhaite, c'est que dorénavant...

Que dorénavant on reste tous les deux. Tu crois que c'est égoïste ? Que c'est trop demandé ? Tu sais, honnêtement et je ne vais pas te mentir, j'ai peur. Peur de ce qui pourrait arriver. Peur de ce que je ressens là. De ce mal qui me ronge malgré tout et qui m'attire. Qui s'accroche à moi alors que je suis avec toi. Je n'ai pas envie de repartir de là où je viens, là-bas dans une obscurité sans nom. Je veux rester. Rester là, contre toi, sentir tes mains sur mon visage. Voir ton sourire s'étirer lentement. Sentir tes lèvres sur les miennes et je veux te sentir tout entier corps et âme. Est-ce égoïste que de ne demander que ça ?

- Basile ?

- Hmm ? Quoi ?

- Je t'aime.

Je le vois se redresser et me dévisager les sourcils froncés.

- Tu as dit qu'on était pas obligés de le dire ! Tu triches !

- Moi je peux le dire. Regarde : Je t'aime. Je t'aime à la folie et passionnément.

- Gabriel !

- Je t'aime !

Je t'aime, alors je t'en prie, retiens-moi. Ne me laisse pas repartir là-bas.

Vingt mille lieues dans tes yeux (BxB) - Tome 1Where stories live. Discover now