Hadley

20- Manhattan Beach

Pourquoi avait-il fallu que j'accepte cette foutue invitation ? Franchement j'avais beaucoup mieux à faire que passer mon après-midi entourée d'hypocrites ! Bon Dieu, je n'y étais pas encore et je regrettais déjà d'avoir dit oui.

Le lendemain de notre soirée qui avait viré au cauchemar, alors que je sortais de cours, j'avais senti mon téléphone vibrer dans la poche arrière de mon jean. Lorsque j'avais vu son nom sur l'écran j'avais cru halluciner. D'ailleurs je me demande encore ce qui m'avait décidé à décrocher. Peut-être qu'avec la fatigue je n'étais pas dans mon état normal. Toujours étant que j'ai répondu.

— Allô Hadley ?

La voix de ma mère avait résonné dans le combiné.

— Pourquoi tu m'appelles ?

Je n'y étais pas allé par quatre chemins. Pour la politesse, on reviendra. Mais je n'avais pas spécialement envie de lui parler. Après tout, c'est elle qui avait choisi de nous abandonner.

— Euh Beverly m'a dit qu'elle t'avait vu hier soir.

Évidemment, cette gourde ne pouvait-elle pas se la fermer deux secondes ? J'avais eu un pincement au cœur lorsque je les imaginais se parler comme mère et fille, et ce dernier avait laissé place à un sentiment de dégoût. Ma mère m'avait remplacé par cette pimbêche ayant abusé des séances UV.

— J'ai pensé que... pourquoi tu ne viendrais pas avec Céleste me voir  un week-end ?

Sa proposition me laissa sur le cul. La dernière fois que j'y étais allé remontait à plusieurs mois et ça s'était très mal passé. Avais-je envie de retenter l'expérience ? Voir que ma mère vivait très bien la séparation avec ma famille n'était pas facile à encaisser. J'aurais préféré qu'elle en souffre, comme nous.

En entendant, le son de sa voix à nouveau j'avais eu envie de l'envoyer paître.

— Je ne t'obliges pas si tu ne veux pas ou que..

— C'est d'accord, m'avais-je entendu répondre en la coupant.

Je n'avais pas de suite compris la raison de ce soudain accord. Mais après réflexion, j'avais repensé à Céleste. À cette journée au parc où nous étions à la balançoire et qu'elle m'avait demandé si notre mère me manquait. Je savais que ma petite sœur avait envie de la revoir. Elle avait envie de retrouver notre maman, de repartager de bons moments avec elle. Voilà pourquoi j'avais accepté.

En repensant à tout ça, je me retourne vers Céleste qui désormais se mâchouille les lèvres. Elle, qui d'habitude est très bavarde, se terre dans un silence pesant. Je vois bien à sa petite bouille déconfite qu'elle est très anxieuse. Je sers un peu plus sa petite main dans la mienne pour lui signifier que je suis là.

— Tout va bien se passer, la rassuré-je.

Ses yeux verts me fixent avec espoir. Ma mère n'a pas intérêt à la décevoir ! Sinon, qu'elle soit de la famille ne changera rien, elle aura affaire à moi.

Après avoir pris la ligne 126 et s'être arrêté à Manhattan Beach/Meadows, nous nous étions retrouvé sur Manhattan Beach Boulevard qui menait tout droit à la plage. Après quelques pas, nous avions bifurqué sur Meadows Avenue. Les maisons s'alignaient toutes parfaitement. C'était du typique américain comme on voit dans les films. Chaque bâtisse à son petit jardin devant et chaque terrain fait la même taille. Malgré cela, la personnalité des propriétaires permettaient de diversifier un peu les lieux. Sur certains mûrs se trouvaient un panier de basket au-dessus du garage, certains avaient tout misé sur la beauté et l'entretien du jardin avec une petite fontaine parfois, d'autres encore avaient leur pelouse remplit de jouets d'enfants ou alors un drapeau américain flottait fièrement devant leur maison.