27 - Franchise

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— Je suis désolé, s'excusa Anthony.

Maddie se rapprocha de lui et encadra son visage de ses deux mains.

— Tu n'as pas à t'excuser. Je suis contente que tu me le dises.

Assis face à face sur le lit de Maddie, les deux amoureux restèrent un moment en silence.

En retrouvant son téléphone le lendemain de la soirée et en écoutant le message de Maddie lui demandant qu'ils parlent sérieusement, Anthony n'avait pas hésité une seule seconde à se rendre à Felice. Il était grand temps qu'il se vide le cœur et soit honnête avec Maddie. Leur relation était en train de se détériorer et il était convaincu que c'était surtout à cause de lui.

Retrouver Maddie à Reggio Hall lui allait très bien, Anthony n'était plus vraiment emballé par le fait de recevoir sa petite amie au sein de la résidence de sa fraternité. Plus les jours passaient, moins il assumait en faire partie. Et après la fête de la veille, la maison était dans un état déplorable. Difficile de faire un pas sans buter dans des ordures.

Anthony soupira longuement et posa son front contre celui de sa petite amie.

— Je ne sais pas pourquoi je ne t'ai pas tout expliqué plus tôt. J'avais honte, je suppose.

— Tu ne devrais pas, le coupa Maddie. Il n' y a aucune honte à avoir. Tu avais envie d'appartenir à un groupe, je le comprends tout à fait. Après c'est juste dommage qu'il ne te corresponde pas.

Anthony acquiesça.

— Les choses ont toujours été plutôt simples pour moi, pour me faire des amis, expliqua-t-il. En arrivant à Stanfild, j'ai réalisé que cela n'avait plus rien à voir avec le lycée. Je ne connaissais personne et personne ne me connaissait. Pas de réputation de garçon sportif, populaire. Je devais me recréer un groupe d'amis en étant juste moi, Anthony Ryan-Tate. Un petit nouveau parmi tant d'autres. Et je crois que je ne me suis pas rendu compte de combien cela pouvait être difficile.

Ses mots résonnaient chez Maddie de façon douloureuse, ils lui rappelaient ce qu'elle avait vécu au lycée : sa solitude, ses difficultés à se faire accepter et à être appréciée. À ces pensées, la tristesse l'envahit et elle lutta pour contenir ses larmes.

— Enfin, tout ça pour te dire que j'ai rencontré des gens sympas dans cette fraternité, surtout un d'ailleurs, mais je ne me sens pas vraiment à ma place. Je ne suis pas sûr de vouloir être réduit à un simple membre des Alpha Delta ni de supporter la réputation de cette fraternité.

— Qu'est-ce que tu veux faire ? La quitter ? s'étonna sincèrement Maddie.

Anthony haussa les épaules.

— Je ne sais pas. Je suis un peu perdu, là.

Maddie l'embrassa tendrement avant de murmurer.

— Fais comme tu le sens. Et je t'ai suffisamment dit ce que je pensais des Alpha Delta, je ne vais plus te saouler avec ça. Fais ce qui te rend heureux.

Anthony se laissa tomber en arrière sur le lit et resta allongé, silencieux, à fixer le plafond. Maddie l'imita puis posa sa tête contre son torse. Elle écouta les battements réguliers de son cœur, savourant leur complicité retrouvé. Elle respirait l'odeur chaude et familière d'Anthony.

Elle s'en voulait d'avoir été si insistante sur le sujet maintenant qu'elle comprenait comment Anthony s'était retrouvé dans cette fraternité. Elle réalisait que son petit-ami cherchait à cacher son mal-être et elle regrettait de n'avoir pas été suffisamment attentive pour s'en rendre compte.

Elle était triste de penser qu'il n'osait pas se confier à elle, créant ainsi un climat de tension entre eux. Rien ne valait la franchise. Pour que leur couple continue de fonctionner, et compte tenu de la distance qui les séparait, ils devaient être honnêtes l'un envers l'autre.

Maddie repensa aussitôt à la soirée de la veille. Et surtout à ce qu'il s'était passé avec Nate et sans réfléchir, elle lâcha :

— Hier soir, un garçon m'a embrassée.

Anthony tourna le visage d'un coup sec vers sa petite amie et plongea son regard dans le sien. Les sourcils froncés, son corps s'était tendu.

— Quoi ?

Maddie ne regretta que quelques secondes ce qu'elle avait dit, car elle n'avait rien à se reprocher.

— Je préfère te le dire plutôt que tu ne l'apprennes par je ne sais qui, je ne sais quand et que tu te fasses des idées, ajouta rapidement Maddie.

Anthony déglutit difficilement et se dressa sur un coude, le visage fermé.

— Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Là, Maddie douta. Est-ce qu'Anthony aurait même eu connaissance de ce baiser un jour ? Mais il était trop tard pour reculer. Elle devait assumer son honnêteté jusqu'au bout désormais.

— Il est venu me parler et il s'est fait des idées car il m'a embrassée sans que je m'y attende. Je l'ai tout de suite repoussé et je suis partie.

Anthony était muet, sans expression. Maddie caressa sa joue délicatement.

— Hé ? Ce n'est pas comme si j'avais souhaité quoi que ce soit. Et si je te le raconte, c'est bien pour te prouver.

Anthony était plongé dans ses pensées car ce que racontait Maddie faisait clairement écho à ce qu'il avait vécu la veille. Lui non plus n'avait rien cherché et lui aussi avait repoussé la fille.

Il se dit alors qu'il devrait avoir le même courage que Maddie et lui raconter ce qu'il avait vécu.

— Je te crois, finit-il par dire. Je te fais confiance.

Maddie lui sourit tandis que le silence s'installait. Anthony s'apprêtait à lui raconter également ce qu'il avait vécu la veille quand la porte de la chambre s'ouvrit avec fracas. Élise passa le seuil, l'air catastrophé.

Maddie se leva d'un bond pour aller à sa rencontre.

— Qu'est-ce qui se passe ?

— Il y a eu un accident... chez les Lions.

Maddie se raidit.

— Oh mon dieu, les filles vont bien ? Meredith, Kristen ?

Élise opina.

— Elles sont choquées, bredouilla-t-elle avec des larmes dans la voix. La coach est partie à l'hôpital avec l'ambulance.

Muette, Maddie retint un hoquet choqué. Elle entrelaça ses doigts à ceux de son amie, lui laissant le temps de reprendre sa respiration avant de poursuivre.

— C'est Sally. Et c'est grave.

Le silence tomba comme une chape de plomb.

Anthony était toujours sur le lit, incapable de dire le moindre mot. Il détestait Sally pour tout ce qu'elle lui avait fait vivre à lui et à sa petite amie au lycée mais il ne lui avait jamais souhaité plus que de recevoir la monnaie de sa pièce. Même s'il l'avait souvent maudit, il ne lui avait jamais souhaité d'accident.

Maddie était figée, les mots d'Élise tournaient en boucle dans sa tête. Tiraillée par des sentiments contradictoires, elle avait la nausée. Sally et elle avaient un passé compliqué mais elle ne pouvait pas se réjouir d'apprendre une nouvelle pareille. Qui le pourrait ?

— Elle est... blessée ? demanda Maddie en formulant difficilement la fin de sa question.

Élise resserra ses doigts autour de ceux de son amie en répondant à voix à peine audible.

— Elle est dans le coma.


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