3 - Enchantée

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Arrivée devant le numéro 114 avec son portable coincé entre son oreille et son épaule, Maddie fouilla dans les poches serrées de son short. Elle sortit sa clé et en la glissant dans la serrure, constata que la porte n'était pas verrouillée. Elle la poussa de la pointe du pied et tomba nez à nez avec une fille en sous-vêtements.

Grande avec des jambes fuselées interminables, ses cheveux blonds vénitiens bouclés cascadaient librement autour de son visage fin. Son teint pâle faisait ressortir des sourcils bien marqués et l'éclat bleu-gris de ses prunelles. Sans une once de maquillage, sa beauté était simple et naturelle.

Surprise, Maddie resta immobile. Sa colocataire écarquilla les yeux, lui lança un sourire et un petit « salut ».

— Je te rappelle, lâcha simplement Maddie à l'attention d'Anthony avant de raccrocher.

— Je suis trop excitée de te rencontrer ! s'exclama la jeune fille en enlaçant Maddie, sacrément mal à l'aise.

En remarquant sa crispation, elle recula en pouffant.

— Je vais me mettre quelque chose sur le dos !

Elle sautilla avec grâce à travers la pièce et farfouilla au milieu de la montagne de vêtements sur son lit. Elle enfila un long tee-shirt et revint vers Maddie en arborant un sourire amical. Son attitude dénotait une douceur et une amabilité non feinte.

— Je suis Élise Beaumont. Ravie de faire ta connaissance !

— Madeleine Harrington et je suis très contente aussi !

Elles échangèrent deux bises. 

— Alors Madeleine...

— Je préfère Maddie.

Élise sourit.

— Ok ! Et tu peux m'appeler El. En arrivant ce matin, je me suis installée là.

Elle désigna du menton le lit et le bureau qui croulaient sous un désordre indescriptible.

— Mais on peut échanger si tu préfères. Moi, honnêtement, je m'en fous !

Élise parlait à cent à l'heure, le visage lumineux. Maddie la trouva pétillante et pleine de vie. Cette fille dégageait quelque chose de solaire.

— On peut rester comme ça, lui répondit Maddie en souriant aussi.

Peu lui importait quel côté de la pièce elle occuperait. Du moment qu'elle pouvait prendre ses quartiers tranquillement, le reste lui était égal.

Élise déballa une quantité incroyable de paires de chaussures. Maddie en resta bouche bée. Où allait-elle bien pouvoir les ranger ? Élise en poussa la majeure partie sous son lit et tenta ensuite d'entasser ses vêtements dans sa commode. Elle tripota quelques tee-shirts qu'elle s'efforça de plier pour les mettre dans un tiroir. Elle pesta.

— Sérieusement ! C'est quoi ces minuscules espaces ? Je peux à peine ranger mes pantalons !

Maddie ne risquait pas de rencontrer le même problème, elle n'avait emporté que le strict nécessaire. Le tout tiendrait aisément dans l'armoire qui se dressait face à elle.

Élise leva les yeux au ciel.

— Ça me saoule.

En soufflant d'exaspération, elle se laissa tomber sur son matelas. Elle s'assit en tailleur, les coudes appuyés sur les cuisses, le menton entre les mains.

— Tu viens d'où ? demanda-t-elle.

— Une petite ville perdue, tu ne connais surement pas. Et toi ?

— Notre chère capitale ! Et tu étudies quoi ? enchaina Élise.

— La psychologie et toi ?

— Le journalisme. Je veux être un grand reporter ! J'aime écrire. Plus que n'importe quoi d'autre. J'ai l'intention de m'inscrire au journal de la fac et de traiter de vrais sujets, et certainement pas de récupérer ceux dont personne ne veut ou les petites annonces ! Je suis peut-être qu'une petite nouvelle de première année mais je suis motivée ! Et le blog m'intéresse aussi, il est trop bien !

Elle parlait sans s'interrompre, reprenant son souffle entre deux tirades. Elle parlait tellement que Maddie avait du mal à la suivre. Elle se tut subitement et éclata d'un rire sonore.

— Désolée, je dois te fatiguer avec tout mon blabla, mais je suis surexcitée ! Je suis tellement heureuse d'être là !

Élise trépignait de joie à l'idée d'entamer sa vie universitaire. Elle ne supportait plus d'avoir constamment ses parents derrière son dos. Elle étouffait. Toute sa vie était organisée, millimétrée même. Maddie découvrit que sa colocataire descendait d'une longue lignée de riches aristocrates et que sa famille était très connue dans le monde des affaires.

Élise se confiait naturellement.

— Papa n'a pas arrêté de me bassiner pour que je suive la même voie que lui et que je reprenne son business mais je n'en veux pas ! Mon frère va prendre la relève mais moi, y'a pas moyen ! Je ne veux pas travailler avec eux.

Élise devint silencieuse et son regard se perdit dans le vide, comme si elle était soudain plongée dans ses pensées.

— Ça ne te fait pas bizarre ? demanda Maddie en regardant autour d'elle.

Elise fronça les sourcils.

— De quoi ?

— Eh bien, d'être ici. Que ce soit si petit et de partager ta chambre avec une personne que tu ne connais pas...

Elise éclata d'un rire franc.

— Au contraire ! Si tu savais comme j'avais hâte de quitter la villa et de venir à Felice ! Je vais enfin pouvoir respirer et vivre ma vie !

Elle esquissa une petite moue amusée.

— Effectivement, je ne te connais pas mais tu m'as l'air d'être quelqu'un de très sympa. Déjà, tu supportes mon débit de paroles ! Mais je te rassure, je ne suis pas tout le temps comme ça !

Maddie se mit à rire. Elle ouvrait les tiroirs et enfournait ses vêtements sans même les trier. Elle n'avait pas fini de vider une valise entière qu'elle s'arrêta et s'assit sur le lit aux côtés d'Élise. Plus détendue, sa langue se délia et elles firent amplement connaissance.





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