Chapitre 1

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Île de Genova, État du Michigan

Il pleuvait à torrents en ce samedi soir. Elle rechigna à sortir de son taxi, mais elle ne pouvait plus reculer : aujourd'hui, elle avait trouvé un travail et, en ces temps si difficiles, elle ne pouvait se résoudre à refuser cette offre providentielle.

–  Vous descendez ? insista le conducteur, tapotant nerveusement sur son volant.

Comme si ces quelques minutes supplémentaires sur son compteur allaient le déranger, pensa-t-elle hargneusement. Elle déglutit, espérant une accalmie avant que le chauffeur ne la jette dehors.

–  Ça fait quatre-vingts dollars, conclut-il, impatient.

Que croyait-il ? Que parce qu'elle était vêtue comme une vagabonde, elle n'avait pas l'argent pour le payer ? Elle haussa un sourcil avant d'ouvrir son sac et d'en sortir ses derniers billets. Malgré l'attitude de l'homme, elle le gratifia de cinq dollars de pourboire. Elle lui tendit les billets qu'il attrapa sans ménagement. Il les recompta avidement avant de s'arrêter sur le pourboire qu'elle venait de lui laisser. Il haussa un sourcil et fit une moue mi-déçue, mi-boudeuse. À présent, il n'attendait qu'une chose : qu'elle sorte de son taxi afin qu'il puisse dépenser cette maigre récompense dans le premier bar venu. Elle leva les yeux vers le ciel qui semblait s'assombrir de plus en plus, pour son plus grand malheur.

– Bon alors ! s'impatienta le chauffeur qui, s'il n'avait pas eu aussi peur de se mouiller, serait lui-même sorti pour lui ouvrir la porte et la mettre hors de son véhicule.

Elle soupira et ouvrit la portière, laissant s'engouffrer une brise fraîche qui la fit frissonner. Elle sortit et se hâta de prendre sa valise dans le coffre, de grosses gouttes s'immisçant dans son col de veste, collant ses cheveux sur son visage et réduisant sa vision à un mètre seulement. Avec difficulté, elle extirpa son bagage et, ce dernier à peine libéré, la voiture démarra en trombe, éclaboussant la jeune femme au passage en mouchetant son pantalon de taches de boue.

–  C'est pas vrai ! maugréa-t-elle, essayant d'atténuer les traces en passant sa main dessus, ce qui eut pour résultat d'étaler les éclaboussures. Parfait, soupira-t-elle sarcastiquement.

Elle se posta devant les immenses grilles de l'entrée. Jamais elle n'avait vu pareil portail. Elle chercha un interphone, mais ne trouva rien. Elle pria alors pour que les portes soient ouvertes et qu'elle n'ait pas besoin de s'époumoner pour demander l'autorisation d'entrer. Elle tenta de pousser les lourdes grilles et, avec soulagement, constata que ces dernières n'étaient pas fermées.

Elle ne prit pas le temps de regarder autour d'elle, et aperçut à peine l'immense allée devant le manoir. Elle courut aussi vite qu'elle put en traînant sa valise jusqu'au porche d'entrée. Elle observa pendant de longues secondes la grandeur de la demeure devant laquelle elle se trouvait. De larges portes en bois massif, sculptées aux armoiries de la famille vivant ici. Elle n'avait jamais vu de manoir auparavant. La bâtisse semblait tout droit sortie d'une autre époque : du lierre et des lézardes au mur témoignaient de l'érosion et des années passées.

En l'absence de sonnette, elle se résigna à frapper à l'entrée. Mais ses faibles poings semblaient ne faire aucun poids face à l'épaisseur de la porte. Elle prit l'anneau dont le métal était rouillé pour marteler lourdement le battant.

Sanglotant de froid, elle pria pour que quelqu'un se presse pour l'accueillir, imaginant trouver chaleur, réconfort et salut dans ce manoir. Au bout d'une trop longue minute, la porte s'ouvrit dans un grincement lugubre. Elle pencha sa tête et sursauta lorsque celle d'un homme âgé émergea.

– Bonjour.

– Wow ! Bon... bonjour. Je... Je suis Camila... Camila Cabello, je suis att...

Journal d'une Confidente - CamrenWhere stories live. Discover now