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Lila


Je retrouve Nikko et Valentina vers 16h20 à la plage d'Argent. Le jeune roumain est encore en train de parler de CJ à notre tête de mule. L'usure, j'ai dit... l'usure...

- Hola ! dis-je en arrivant à leur niveau.

- Hola querida ! Tu peux pas dire à Nikko qu'il me lâche la grappe avec CJ ?

- Naaaann ! dis-je en étalant ma serviette à côté des leurs.  Je le soutiens à 200%.

- Pffff... t'es nulle como compañera* ! Et d'abord, c'est quoi ce sourire tout niais que t'as sur ta tête ? ajoute-t-elle avec son accent espagnol. (*comme copine)

Oh merde !  J'ai vraiment un sourire idiot sur le visage ?

- Dios mio !   Y a un mec là-dessous ! C'est qui, c'est qui ? Je le connais ? Allé c'est qui ?

Rohhhh !

- Y a peut être un mec là-dessous, dis-je résignée. Je l'ai revu... le gars de la supérette... La 28...

- Oh my god ! Et alors ? dit-elle en se mettant en tailleur en face de moi.

- Bah y a rien à dire. C'est un client de l'hôtel c'est tout.

- Il t'a parlé ? demande-t-elle tout excitée.

- Bah, vu que j'étais dans sa chambre quand il est rentré, oui, il m'a parlé.

- Oh ce que t'es chiante ! Je sais ! Raconte ! 

- Mais y a rien à dire Val. Il s'appelle Dimitri. C'est un client. Point.

Et il a aussi dit qu'il avait hâte de te revoir...

C'est vrai que moi aussi, ça me plairait assez de le revoir. Qui ça ne tenterait pas ?  Il est si beau... si sexy... bourré de charme. Dimitri est tout simplement magnifique. Mais c'est un client qui va bientôt quitter l'île alors bon... Je ne vois pas à quoi ça servirait d'aller chercher plus loin. Et puis, je me remets tout juste de mon histoire longue et turbulente avec Charles ; je ne sais pas si c'est judicieux de me remettre un mec dans la tête, aussi canon soit-il. Même si, j'avoue, l'idée est sérieusement tentante. 

Je supplie donc Valentina d'arrêter de me parler de lui. En contrepartie, je dois cesser de la pousser dans les bras de CJ. Ça fait chier, mais Nikko est toujours sur le front, alors tout n'est pas perdu.

×××

Rentrée à la maison, je prends mon téléphone pour appeler mon frère. On est mercredi...
Nous nous téléphonons tous les mercredis pour prendre des nouvelles de l'autre. Je n'ai jamais dit à mon frère où j'étais. Ce n'est pas que je ne lui fasse pas confiance, mais je préfère qu'il ne sache rien au cas où Charles l'interroge.  Je ne veux pas qu'il ai à mentir pour moi. Et je ne sais que trop bien comment réagirait Charles si mon frère osait se moquer de lui.

- Salut Raf ! dis-je heureuse de pouvoir lui parler.

- Salut, murmure Rafael la voix triste.

- Oh toi, ça va pas... Relata querido*. (*raconte chéri)

- Écoute, ça sert à rien d'en parler. T'es pas là...

- Raf ! Dis-moi ce qu'il se passe, dis-je impatiente. 

- Por qué ? ! Tu t'en fous bien de ce qu'il peut se passer à la maison !

- Rafael ! Au lieu de me faire des reproches, accouches !

J'entends mon frère soupirer longuement.  Quelques chose ne va pas du tout et je n'aime pas ça.

- C'est les parents...

- Quoi les parents ? Ils ont perdu un zéro à leur compte en banque ?

- Se divorcian*... (*ils divorcent)

- Oh...

- Tu vois, t'en à rien à foutre ! Et tu sais quoi ? C'est la merde, depuis que t'es partie !

- Écoute, c'est quand même pas de ma faute !

- Bah va savoir !

- Bueno, c'était pas le moment pour parler. Je te rappellerai plus tard, quand tu seras calmé.

- Sí, on va faire ça...

Rafael me raccroche au nez. J'ai immédiatement les larmes qui me montent  aux yeux. Jamais mon frère ne m'avait parlé de la sorte. Une boule énorme grandi dans mon ventre et je tremble nerveusement. J'inspire et j'expire profondément pour tenter de me calmer. Rafael a tort de s'en prendre à moi. Si les parents divorcent, je ne vois pas en quoi ça serait de ma faute.  Et puis, ils peuvent bien faire ce qu'ils veulent, je n'en ai plus rien à foutre. Rafael a raison sur ce point. La seule chose qui me contrarie dans leur séparation, c'est que Rafael va voir une fois de plus sa famille éclater. Mon départ est une chose qu'il a tout de même eu du mal à gérer, et là, il va devoir faire face à leur séparation, seul. Je regrette tellement de ne pas pouvoir le soutenir à cet instant. Mais je ne peux pas rentrer à la maison. C'est ici chez moi, loin de Charles, loin de mes parents, et loin de mon frère.

Depuis que les parents m'ont renié quand j'ai quitté Charles, j'ai clairement fait une croix dessus. Depuis des années, ils voyaient en Charles le gendre idéal.  Le genre de gendre qu'on n'a pas honte de présenter à ses amis pour se faire mousser.  Si je n'étais pas partie, je crois qu'ils auraient trouvé un moyen pour me marier de force.  C'est si compliqué à comprendre ? Charles n'est pas un homme pour moi !

De toute façon, le simple fait de ne pas être amoureuse de lui aurait dû leur suffire pour accepter mon choix. Mais au lieu de ça, ils m'ont jugé, et repoussé. Pas très glorieux tout ça ! Du coup, je crois que leur petite réputation miteuse en a pris un coup.  Leur fille indigne a remballé le Prince Keller et a pris la fuite comme une lâche, en prenant bien soin d'envoyer chier tout le monde avant de partir. A mon avis, les "desperate housewives" de notre quartier ont du y aller franco sur les ragots. Mes chers parents ont surement moyennement apprécié de voir leur vie raconter dans toutes les bouches de leur si précieuse sphère superficielle. Leur couple a dû en prendre un coup. Ma fois, je m'en tape royalement !

Les paroles de mon frère tournent en boucle dans mon crâne. Les larmes menacent une nouvelle fois de couler. Sentant mes yeux brûler de plus en plus, j'enfile un short ample par-dessus mon maillot de bain ainsi que des baskets. J'ai besoin d'aller me détendre un peu. Et le seul moyen que j'ai de calmer mes nerfs, c'est d'aller  courir sur la plage pour me vider la tête et respirer l'air marin de la Méditerranée. 

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Rafael

Strictement professionnelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant