chapitre 31

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Il remonta son sac sur son épaule, cherchant les mots qui pourraient justifier son comportement. Mais n'en trouvant aucun, il se contenta de la dévisager, coupable d'avoir encore une fois tout gâcher.

-Je suis désolé. Dit-il finalement d'un ton plus que sincère. Il ne savait pas pourquoi il faisait ça constamment. Pourquoi il gâchait sans cesse tout ce qui se passait de bien dans sa vie.


-Je me doutais que ça finirait ainsi Derek, je ne t'en veux pas. Et s'il te plaît, ne me fais pas un discours mielleux comme quoi je suis une fille super et toi un sale con. On sait tous les deux que c'est bien plus compliqué qu'une histoire d'adolescent à l'eau de rose et qu'il n'y a ni gentil ni méchant.

Il hocha la tête en baissant son regard sur le sol.

-J'ai besoin de m'excuser, je fais tout de travers, encore une fois.

Elle souffla en levant les yeux au ciel.

-Je te pardonne, alors maintenant sois gentil et déguerpis de mon appartement. C'est jamais agréable de se faire larguer, mais je ne vais pas pour au tant de tirer dessus. S'exclama-t-elle en taisant le fait que cette idée lui avait traversé l'esprit quand il lui avait dit de but en blanc qu'il la quittait.

Il ne répondit rien.

- Et toi, qu'est ce que tu vas faire? Demanda-t-il.

- Moi? Toujours la même chose. Que tu sois là ou pas, ça ne change rien.

Pour être honnête, cela allait changer beaucoup de choses dans la vie de Breden. Elle avait fini par prendre l'habitude de rentrer chez elle en étant attendu, de quitter à regret les bras d'un homme au matin et d'être aimée. Elle avait fini par adoré se sentir aimée et choyée.
Elle aurait voulu goûter un peu plus longtemps à cette délectable sensation, elle aurait voulu qu'il reste.
Mais elle savait que c'était tout bonnement impossible. Derek était un esprit libre que personne ne pouvait dresser, et le jour où il décidait de détruire l'infime part de bonheur qu'il s'était jusque-là accordé, rien ne pouvait l'en empêcher.
Il se refusait au bonheur, se sentant coupable d'actes qu'il n'avait pas commis.

-J'ai besoin de rentrer. J'ai besoin de retrouver Beacon Hills. J'aurais dû rester quand Lydia est morte, j'aurais dû rester pour les idiots qui formaient ma meute. J'ai fui comme un lâche, prétextant la poursuite de Kate. Mais désormais, cette dernière est morte, et je ne peux plus me cacher, je n'en n'ai plus le droit. C'est mon devoir d'être au-près d'eux.

-J'ai toujours su que ta vie se trouvait là-bas. Tu avais besoin de temps et de réconfort. Maintenant que tu en as suffisamment eu, tu dois repartir. Je sais. Je sais pourquoi tu fais ça. Je ne t'en blâme pas.

Il eut un petit sourire triste. Il avait sincèrement apprécié la compagnie de Breden, mais leur couple n'était qu'un passage dans sa vie. 

-Fais attention à toi Derek. Ne laisse pas ta stupide culpabilité gâcher les moments qui te sont accordé. Tu mérites d'être heureux, crois moi.

Derek lui jeta un dernier regard avant de sortir de l'appartement.

Il était temps qu'il accepte son incapacité à quitter la ville qui l'avait vue naître, et qu'il se décide à la protéger.
Il était temps qu'il rejoigne là où se trouvait sa place.


***

Il marchait d'une démarche gauche dans la rue plongée dans le plus profond des noirs. Cela lui faisait du bien de pouvoir dégourdir ses jambes. Il avait faim, tellement faim... Mais plus il s'aventurait loin du groupe, plus il prenait de risques, il en était conscient. Mais il avait trop faim. Il en avait marre de ça. Depuis qu'il était né dans la grotte, il n'avait jamais pu se nourrir convenablement. Et se contenter de la risible peur des rats ne lui suffisait plus. Il avait envie de quelque chose de plus sucré, de plus excitant, même si pour trouver son butin, il devait désobéir aux ordres. 

Il ouvrit la bouche et une fumée noire s'en échappa avant que son corps ne se disloque, prenant l'aspect de cette même fumée.
Il erra dans la ville en évitant soigneusement de trop s'approcher des boules de lumières. Une personne apparue soudainement dans le coin de la rue, proie de choix.
C'était une jeune fille qui devait avoir une vingtaine d'années. Perchée sur ses talons et les yeux rivés sur son téléphone, elle serait une victime parfaite. Il l'encercla sans qu'elle ne remarque rien. Quand enfin elle releva le nez de son portable, sa gorge se noua. Un noirceur non-naturelle l'entourait. Elle ne voyait absolument rien, comme si le noir l'avait avalé. Elle lâcha son téléphone et ce dernier se brisa au sol. Sa respiration s'accéléra tandis qu'elle avançait à tâtons dans le noir, sans avoir de destination. Il se délectait de l'odeur âcre de la peur qu'elle dégageait. Elle commençait à paniquer et lui à s'amuser.
Son esprit s'insinua dans celui de la fille. Il parcourut les méandres de sa conscience, observant les moindres recoins de son cerveau. Et enfin, il la trouva.
Sa plus grande peur. La chose qui la terrorisait plus que tout. 

Il inspira une grande bouffée de cet air chargé d'anxiété. Il se mit à fredonner une comptine. Cet air entra par les oreilles de la fille et se bloqua dans son esprit. Des larmes se mirent à couler le long de ses joues tandis qu'elle plaquait ses mains sur ses oreilles.

Il lui apparut alors, tel un mirage sortit de nul part. Son visage peint de blanc, ses cheveux rouges tenus au-dessus de sa tête et sa salopette orange. Ses dents jaunes et inégales étaient découvertes par ses lèvres qui s'étiraient dans un sourire effrayant. Il s'approcha d'elle tandis qu'elle l'observait d'un air terrorisé.

- Tu veux que je te montre un tour? Dit il d'une petite voix.

Elle secoua vivement la tête pour lui dire non et tenta de s'enfuir, mais il lui agrippa le bras.

- Où comptais-tu aller? Je suis ton ami, et tu vas jouer avec moi!

Un rire machiavélique sortit de sa bouche et elle se mit à hurler. Elle tenta de se débattre, sans se rendre compte qu'elle se battait contre une illusion.

- Tu vas rester avec moi, pour l'éternité! Hurla-t-il avant que la brume noire n'entre par la bouche les yeux, le nez et les oreilles de la fille. Ses cris furent étouffés tout comme ses sanglots. Ses yeux devinrent noirs et elle resta immobile quelques instants avant que d'étranges marques apparaissent dans son cou et qu'elle tombe raide morte au sol.
Quelques minutes plus tard, la fumée sortit de son corps.

Il retrouva sa forme humaine.

Ses yeux toujours ouverts exprimaient une terreur indescriptible. Il s'agenouilla à coté d'elle et lui caressa la joue.

- Pauvre petite... Tu n'aurais pas dû te promener seule dans la rue à une heure pareille. Il souffla. Dommage pour toi.

Il se releva, vérifia que personne ne l'observait et resserra sa veste. Le chef ne serait certainement pas content, mais il s'en fichait.

Il était rassasié.


Parce que l'erreur est humaineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant