INVISIBLE OBSESSION

• Chapitre 25 •

Toria rit, nerveusement.

— Oh, tu sais, l'inspiration parfois...

— Pas à nous. Julia la fixe, sérieuse.

Le silence retombe. Toria baisse la tête, puis avoue dans un souffle :

— Y'a quelques semaines... j'me sentais observée. Vraiment. C'est pour ça que je restais tout le temps au studio. Là-bas, je pouvais respirer. Mais maintenant, ça va mieux.

Ses mots me déchirent le ventre. C'est ce que je ressens. Exactement. Le froid. Les murs lourds. L'ombre dans la lumière.

Toria me regarde. Julia aussi. Elles comprennent.

— C'est ce que tu ressens aussi ? me demande doucement Julia.

Je hoche la tête.

— Oui... sauf que moi, j'ai eu les photos pour me le confirmer.

Un silence. Long. Lourd. Les goûtent de pluie s'écrasent contre les vitres. À ce moment-là, tout semble figé.

Et au fond de moi, une intuition sourde commence à s'enrouler. Quelque chose dans cette toile, dans cette phrase peinte... ce n'est peut-être pas qu'une coïncidence. Quelque chose en Toria savait déjà. Même si elle ne voulait pas le voir.

Puis Julia sursaute.

— Attendez ! Et ton nerd là ? Celui que tu croises tout le temps !

Je fronce les sourcils. Mon cœur bat fort.

— Nickolas ? Non...

Toria ajoute :

— Ils ont dormi ensemble sur le canapé y'a deux semaines.

— QUOI ?! Julia explose. Et tu me dis ça maintenant ? Vous avez couché ensemble ?

— NON ! criai-je trop rapidement.

Mes joues brûlent. Elles rigolent. Moi, je voudrais m'enfoncer sous le tapis.

— Mais c'est lui qui te dit pas ce qu'il fait dans la vie, non ? demande Julia, plus sérieusement.

Je réfléchis. Oui. Mais...

— Il s'est un peu ouvert à moi. Et... je sais que c'est pas lui.

— Méfie-toi, souffle Toria.

— Parle-lui, insiste Julia. Tu verras sa réaction.

— C'est peut-être trop tôt...

— Trop tôt ? Toria éclate de rire. T'es sérieuse ? Meuf, tu te fais stalker la, et ça fait deux semaines que tu le ghoste. finit-elle en s'adressant à Julia.

Elle a raison. Je baisse les yeux. Je pense à ses messages. Nickolas m'a écrit chaque jour. Pas des messages d'amour, non. Des questions simples. « Est-ce que ça va ? » « J'ai fait quelque chose de mal ? » « Je peux passer te voir, si tu veux. » J'ai juste... lu. Lâché des vus comme des poignards. Une seule réponse : ça va, envoyée la semaine dernière. Tous les jours. Courts. Inquiets. Respectueux. Et moi ? Silence. Juste un "ça va" envoyé la semaine dernière.

Je me referme. C'est mon problème. Je fuis. Je m'enferme. Ce soir, c'était déjà un miracle qu'on soit toutes ensemble. C'est Toria qui a insisté. C'est elle qui a appelé Julia. Moi, j'aurais continué à faire semblant. Jusqu'à imploser.

— Appelle-le, dit Julia.

— J'ose pas. Il a peut-être déjà tourné la page...

— Pardon ? Toria se redresse. Deux bouquets de pivoines blanches cette semaine. TES pivoines. Et tu crois qu'il est passé à autre chose ?