CHAPITRE 28 • MILA

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   Cinq mai. Deux ans que mon père est parti, deux ans que je ne reconnais plus ma famille, deux ans que je tente de sortir ma tête de l'eau mais que personne ne le voit. Et je crois que pour la première fois en deux ans, j'arrive à bien m'en sortir. C'est toujours compliqué de me lever le matin et de m'imaginer l'avenir, je ne vois que de la fumée lorsque j'essaye d'y penser, mais sa présence apaise les choses.

   Je souris et lève la tête du comic que je suis en train de lire pour regarder le garçon à mes côtés qui fredonne un air tout en essayant de créer une mélodie avec sa guitare. Il est tellement concentré qu'il ne fait pas attention à moi, il est dans ce monde et j'aime le voir comme ça, dans son élément. Il finit par s'arrêter de jouer et il se tourne vers moi. Il me sourit et se penche vers ce que j'ai dans les mains.

   — Où tu en es ? Il se passe quelque chose d'intéressant ?

   — Deadpool vient de tuer des gens dans une morgue.

   — Il a toujours pas sauvé sa fille ?

   — Pas encore.

   Il acquiesce et lève son regard sur moi. Nos visages sont à seulement quelques centimètres l'un de l'autre et j'en profite pour déposer un rapide baiser sur ses lèvres. C'est encore tout nouveau ce genre d'attention. Je ne sais pas trop comment ça fonctionne mais ce n'est pas aussi désagréable que ce que je pensais. Il sourit avant de cacher son visage un peu rosé avec ses mains. Je peux l'entendre marmonner :

   — Paboya.

   Je ris légèrement avant de lui embrasser la joue. Il finit par libérer son visage et ses yeux se posent sur mon épaule dénudée. Il esquisse un sourire avant de poser ses lèvres sur celle-ci. J'arque un sourcil et l'interroge du regard.

   — J'avais envie.

   J'acquiesce en mordant ma lèvre pour retenir un sourire et retourne à ma lecture. Je sens Jisung poser son menton sur mon épaule pour qu'il puisse suivre l'histoire. Le silence dure un certain temps avant qu'il ne prenne la parole :

   — J'ai pris mon billet pour La Rochelle d'ailleurs. J'en ai parlé à ma mère et elle était super contente de voir que ça se passe bien pour nous. Et toi, tu en as parlé à ta mère ?

   Je me stoppe et souffle. Je ferme le livre entre mes mains et me redresse pour faire face à mon copain. Il fronce ses sourcils alors que je prends ses mains dans les miennes.

   — Je lui ai rien dit.

   — Quoi ? Mais Mila, le concours c'est ce soir !

   — Je sais, mais ça servirait à rien de lui en parler, elle s'en fout de toute façon. Elle se fout de tout ce que je pourrais faire. Tout ce qui l'intéresse c'est sa petite personne.

   — C'est quand même super important pour nous, ce serait bien de lui en parler non ? On pourrait faire un enregistrement, tu te rends compte ? Je suis sûr que ta mère serait fière de toi et contente de le savoir.

   — Tu connais pas ma mère, Ji. Tu connais le personnage qu'elle montre à tout le monde, le masque qu'elle porte en permanence.

   Il acquiesce sans pour autant me répondre. Il sait à quel point je n'aime pas parler de ma mère. Je caresse doucement ses mains à l'aide de mes pouces et dis :

   — Mais j'ai quand même pris mon billet de train, t'en fais pas. Je suis bien décidée à tout donner sur scène et gagner cet enregistrement.

   Il me regarde et rigole avant de lâcher mes mains et recommencer à chercher un rythme avec sa guitare. Je me remets sur le ventre et prends de nouveau mon comic pour le lire. Il reste très peu de temps avant de partir.

VIVRE C'EST POUR LES IDIOTS - 𝘢 𝘩𝘢𝘯 𝘫𝘪𝘴𝘶𝘯𝘨 𝘧𝘢𝘯𝘧𝘪𝘤𝘵𝘪𝘰𝘯Where stories live. Discover now