CHAPITRE 13 • JISUNG

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<< I wanna be the one you dream of, pull me into the flame >>
boys club, ivory hours

Je tape frénétiquement mon pied sur le sol, alors que ma mère finit de se préparer. Si découvrir des choses qui me sont inconnues me terrifie, le faire avec Mila me rend
moins nerveux. Je ne sais pas pourquoi la savoir à côté de moi me rassure. Même si elle est froide, qu'elle effraie certains et qu'elle ne parle pas beaucoup, cela me va. Parler est trop commun et bruyant de toute façon, le silence me va très bien. C'est sûrement parce qu'elle est comme ça que j'aime être avec elle. Je ne me sens pas dans l'obligation d'ouvrir la bouche pour déblatérer des mots qui n'ont aucun sens, la compagnie de l'un et de l'autre est suffisante. Nous n'avons pas besoin de s'encombrer avec des paroles inutiles, j'ai simplement à savoir qu'elle est à côté de moi pour que mon coeur se réchauffe.

- Jiji, on y va !

La voix de ma mère me ramène à la réalité et je me lève du canapé pour aller dans la voiture. Je trouve que c'est gentil de la part de Madame Bailey de nous faire visiter les endroits importants de la ville. Surtout pour moi, j'avoue me sentir comme un intrus dans cet endroit. Déjà que je ne connais pas beaucoup la culture, ne pas avoir de repère m'angoisse encore plus. Mais ma mère semble comblée depuis que nous sommes ici, alors je suis content de la voir ainsi même si au fond je me sens mal d'avoir tout
abandonné. J'ai tout perdu en voulant tout recommencer avec ma mère, mais est-ce que c'était le bon choix ? Je n'en veux pas à ma mère, ça lui fait du bien d'être partie de la
maison, elle veut se libérer de ces chaînes qui l'emprisonnent, elle veut vivre de nouveau et ça me fait plaisir de voir qu'elle touche au but.

J'aimerais pouvoir en dire autant pour moi, mais je ne sais pas si je suis sur la bonne voie, j'ai envie d'y croire en tout cas.

- Tu sais où on va aujourd'hui ? demande ma mère sans quitter la route des yeux.
- Non, mais tu le sais toi, pas vrai ?
- Bien sûr, nous allons au grand parc de la ville. Il paraît que c'est le plus beau parc du coin, plein de gens y vont !
- Est-ce qu'il va y avoir beaucoup de monde ?

Le volume de ma voix descend au fur et à mesure que je parle. Je ne suis pas sûr de moi en posant cette question et mes yeux ne quittent pas le visage de ma mère qui
conduit. Elle esquisse un petit sourire comme si elle était triste pour moi, avant de me répondre :

- On est le dix-neuf décembre Jiji, il y aura forcément des gens.

J'acquiesce en détournant mon regard sur mes mains posées sur mes genoux. Mes doigts se resserrent contre le tissu de mon pantalon et je pince mes lèvres. Je sais qu'il y aura du monde, je ne suis pas idiot, un parc d'une ville près de la mer pendant les
vacances de Noël ne sera jamais vide. La radio grésille de temps en temps alors que je tente de calmer ma respiration en me concentrant sur la musique.

- Je suis désolée, si tu le sens pas on peut toujours reporter la sortie.
- Non ! Non c'est bon, ça va le faire.

C'est faux. Je n'en ai aucune idée. Je ne sais pas si je vais réussir à tenir le coup cet après-midi, je ne sais pas si je vais me sentir oppressé par le monde qui m'entoure, rien
de ce qui m'angoisse ne peut être prévisible.

Nous arrivons à notre destination et ma mère sort de la voiture pendant que je regarde avec appréhension l'autre véhicule à côté de nous, dans l'espoir de voir le visage qui m'apaise chaque fois que je pose mes yeux sur lui. Je patiente quelques secondes avant que la portière ne s'ouvre sur la personne qui hante mon esprit. Elle a le visage fermé et les bras croisés sous sa poitrine, comme d'habitude. Elle porte un pantalon trop long qui
traîne un peu par terre ainsi qu'un t-shirt oversize lui aussi. Elle a sûrement encore dû prendre des habits qui traînaient dans sa chambre sans grand intérêt pour le résultat de sa tenue. J'ai pu cerner pas mal de choses en allant dans sa chambre, et prendre soin d'elle n'est clairement pas une priorité, je l'ai bien compris. Mais peu importe, qu'elle prenne en compte son apparence, qu'elle soit bien coiffée et maquillée, elle reste la même pour moi, la même fille pour qui j'écrirais des milliers de chansons s'il le fallait.

VIVRE C'EST POUR LES IDIOTS - 𝘢 𝘩𝘢𝘯 𝘫𝘪𝘴𝘶𝘯𝘨 𝘧𝘢𝘯𝘧𝘪𝘤𝘵𝘪𝘰𝘯Where stories live. Discover now