CHAPITRE 9 • JISUNG

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<< You’ll never be alone with me, am I the boy you dreamed of ? >>
dream boy — waterparks

    Je parviens à peine à ouvrir les yeux lorsque la sonnette retentit dans toute la maison. Je ne sais quelle heure il est, mais je suis persuadé que je n'ai pas assez dormi. Ça m'apprendra à vouloir prendre des nouvelles de mes grands-parents qui se trouvent à l'autre bout du monde. Mais le sourire de ma grand-mère vaut toutes les nuits blanches possibles. Ils me manquent beaucoup, j'aurais aimé pouvoir les serrer dans mes bras hier soir.

   J'avais vraiment envie de faire disparaître l'écran de mon ordinateur pour qu'ils soient devant moi, en chair et en os. J'aurais pu lire le journal avec mon grand-père et discuter de l'actualité avec lui. J'aurais pu observer ma grand-mère cuisiner et j'aurais proposé mon aide pour préparer le repas. Je ne m'étais pas rendu compte avant de l'importance qu'avait ma famille pour moi.

   Je n'avais pas réalisé la chance que j'avais d'être aussi proche de mes grands-parents. Ce n'est que maintenant que je ne peux plus les voir que j'envie le passé où ils faisaient partie pleinement de ma vie.

   Je n'ai jamais voulu déménager en France. Si j'avais dû décider, je serais resté avec mes grands-parents en Corée. Seulement, je n'aurais jamais pu laisser ma mère repartir par elle-même. Après tout ce qu'on a vécu récemment, je me dois de rester auprès d'elle. Elle s'est occupée de moi pendant dix-huit ans et elle continue encore de le faire. La moindre des choses c'est que je puisse faire de même pour elle. 

   Venir dans un pays que je ne connais absolument pas me terrifiait, et encore aujourd'hui je ne suis pas à l'aise en sortant de la maison. Mais quand je vois ma mère retrouver petit à petit son sourire lorsqu'elle parle avec Mme Bailey et d'autres personnes de la ville, je me dis que c'est un mal pour un bien.

   Je pourrais tout endurer pour que ma mère soit heureuse de nouveau. Alors je resterai ici avec elle aussi longtemps qu'il le faudra.

   — Jiji ? Tu es réveillé ? Il est bientôt quinze heures, mon chéri.

   Ma mère toque à ma porte tout en me parlant à travers celle-ci avant que je ne me lève lentement pour lui ouvrir. Ses lèvres s'élargissent en un grand sourire lorsqu'elle me voit et elle vient passer une main dans mes cheveux ébouriffés. Je plisse les yeux face à autant de luminosité et lâche un petit grognement avant qu'elle ne s'écarte de moi.

   — Je vais devoir aller faire quelques courses mais je t'ai laissé de quoi manger dans le frigo.

   J'acquiesce simplement tandis qu'elle part dans le salon pour enfiler ses chaussures et son manteau. Je mets un peu de temps à reprendre mes esprits et sortir de mon état somnolent. Elle claque la porte derrière elle et je me dirige vers la cuisine, mon estomac commençant à se faire entendre. Je réchauffe la nourriture et sors des couverts avant de m'installer à table. Je sors mon téléphone et lance la chaîne d'information coréenne.

   Cela me permet de garder un contact avec l'endroit d'où je viens. Entendre des gens parler ma langue me ramène à Séoul, je n'ai plus l'impression d'être coincé ici. Bien sûr, ma mère utilise un mélange de coréen et de français lorsqu'elle me parle mais ce n'est pas pareil que de vivre constamment entouré par la langue. Désormais, où que j'aille, c'est le français que j'entends. Alors suivre les actualités coréennes est quelque chose que je fais tous les jours lorsque je mange. Hier soir, c'était Halloween et les sujets reviennent en boucle. Une nouvelle rénovation dans l'aéroport de Séoul, les festivités qui se passaient dans les rues d'Itaewon et Hongdae ou encore les recettes tendances pour réussir un bon repas entre amis. Il ne s'est rien produit de très intéressant la nuit dernière, mais ça me rassure d'avoir un lien avec mon pays, de savoir que même si je n'y suis plus, les choses continuent sans moi.

VIVRE C'EST POUR LES IDIOTS - 𝘢 𝘩𝘢𝘯 𝘫𝘪𝘴𝘶𝘯𝘨 𝘧𝘢𝘯𝘧𝘪𝘤𝘵𝘪𝘰𝘯Where stories live. Discover now