Raphaëlle Pereira voulait une voiture, une voiture rouge. Son frère lui avait toujours répété qu'elles allaient plus vite, qu'elles pouvaient dépasser toutes les autres voitures, qu'elles pouvaient même peut-être voler. Elle n'était encore qu'une e...
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Après un rapide coup d'œil sur son compte bancaire, elle avait préféré économiser ces quelques dizaines d'euros. Alors, elle se retrouvait assise, dans un bus miteux qui devait la ramener à la frontière. Elle avait hésité à le prendre jusqu'à Grenoble, mais cela l'aurait finalement plus retardé que ce qu'elle aurait aimé se l'avouer. Cela lui faisait faire un détour, et elle n'avait trouvé aucun trajet aussi peu cher que celui-là qui lui permettrait d'arriver à temps. Alors même si c'était très long, elle allait profiter de ces heures de bus pour s'occuper. Elle était partie le matin même, vers six heures. Giulia l'avait emmené à l'arrêt de bus, en dehors du centre-ville de Bologne. Ils avaient passé la veille ensemble, avec Emiliano, et l'italienne lui avait rappelé de ne pas hésiter à demander de l'aide à Charles pour arriver à Paris. C'était lui qui avait insisté pour l'emmener à leur destination, son excuse était qu'ils allaient au même endroit. Raphaëlle avait refusé. Elle savait se débrouiller seule, et n'avait pas besoin du pilote pour être indépendante. Et même si c'était toujours le cas, elle regrettait ce choix. Ce bus n'était pas confortable, elle avait mal au dos et son livre ne l'intéressait plus. Elle avait fait le montage de quelques vidéos pour les réseaux sociaux de l'écurie, faisant la promotion du Grand Prix de France sur toutes les plateformes imaginables. Elle aimait ça, heureusement. Cela la maintenait éveillée. Elle avait une première dizaine d'heures de bus, pendant lesquelles elle espérait finir le travail qu'elle repoussait jusque-là. Ces mails ennuyants ou les réponses à des commentaires, ces petites choses si précises à son métier auquel elle ne savait plus combien elle prenait goût. Elle regrettait de ne pas avoir demandé de l'aide à Charles, ou même à Lance. Elle aurait sûrement pu partir plus tard si elle l'avait fait. Pourtant, sa fatigue avait fini par frapper. Son sac était rempli de choses à faire, un livre à lire, son ordinateur portable, une batterie externe et même un livre de coloriage qu'elle aimait parfois faire lorsque l'ennui était trop fort. Là, rien ne l'intéressait. Elle avait fini toutes ses tâches. Essayant de contacter en vain sa supérieure qui devait encore dormir en ce mardi matin. Elle devait arriver le mercredi. Elle se doutait qu'elle aurait de l'avance, et peut-être qu'elle espérait passer un moment avec Lance avant de commencer à travailler pour le week-end de course. Lui aussi, aurait pu l'aider à combler cet ennui, pourtant, il semblait également dormir.
Raphaëlle était souvent bornée, cela lui avait permis de tenir bon jusque-là, de prouver aux gens quand ils avaient tort, mais là, c'était simplement devenu un défaut qu'elle aurait préféré corriger. Elle se retrouvait à jouer à des jeux stupides sur son téléphone alors qu'elle imaginait son entourage dormir paisiblement dans le fond de leurs lits. En plus, elle commençait à avoir faim. Tout devenait pitoyable. Elle n'avait rien de mieux à faire que de laisser le temps s'écouler. C'est ce qu'elle avait réussi à faire jusqu'à la première pause sur une aire d'autoroute. Son téléphone ne captait quasiment pas, elle avait donc choisi d'aller acheter quelque chose à grignoter. Manger ferait peut-être passer le temps plus rapidement. Cela ne semblait toujours pas fonctionné. Lyon paraissait si loin. Alors même si elle mangeait son petit-déjeuner en observant les pleines italiennes illuminées par le ciel du matin, elle n'appréciait en rien le paysage. Elle avait tenté de fermer les yeux, au début, cela n'avait pas fonctionné. Puis quelques heures avaient réussi à passer, et un autre arrêt plus tard, une fille s'était assise à côté d'elle. Elle avait l'air jeune, sûrement plus qu'elle et lui avait directement souri. Dévoilant une série de dents bien rangées et son appareil dentaire, puis Raphaëlle avait souri. L'adolescente, curieuse, avait regardé le livre que la Française avait repris, lançant une discussion sur leurs dernières lectures. Elle arrivait au bon moment, surtout vu son ennui. Elle aussi, devait descendre à Lyon, et elle aussi, devait remonter jusqu'à Paris. Mais cette jeune fille avait été plus intelligente qu'elle, car elle prenait le train pour remonter jusqu'à la capitale. Raphaëlle y avait réfléchi, elle se demandait si elle devait faire la même chose. Elle se sentait mieux avec cette fille à côté d'elle, cela rendait le trajet moins ennuyant.
