Chapitre 35

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LÉO

Aujourd'hui

Je suis dans un noir complet. Il fait si sombre. La seule lumière perceptible est le feu. Toutes ces flammes autour de moi. Cette couleur orange-rouge qui me fait mal aux yeux. Cette odeur de fumée. Ça me rappelle le bacon cramé de Juliette.

Juliette. Ma Juliette. Est-ce qu'elle va bien ? L'avez-vous sauvée ?

J'ai tellement envie d'ouvrir les yeux. De parler. Je crois entendre des voix autour de moi. Je crois sentir son odeur. Je pense qu'elle est venue ici. Cela signifie-t-elle qu'elle est en vie ? Je ne sais pas si j'hallucine ou non. Mon crâne me fait un mal terrible, j'ai la sensation qu'on enfonce un poignard dedans toutes les minutes.

Les bruits deviennent de plus en plus audibles. Ça ressemble à un cardioscope. Je vois de la lumière blanche. Blanc. Trop blanc.

C'est à ça que ressemble la mort ? J'ai du mal à le croire.

Je me demande comment ça s'est passé pour toi, Léna. Je me demande aussi si tu peux me voir de là où tu es et de ce que tu penses. Es-tu fière de moi ? Ou me prends-tu pour un fou ?

Tu sais, je crois que c'est le propre de l'amour de faire des folies.

Je t'avoue aussi que je n'ai même pas pris le temps de penser à la suite. J'ai imaginé Juliette parmi ses flammes. J'ai imaginé sentir son dernier souffle. J'ai imaginé mon monde sans elle. Et j'ai couru. Il est possible pour moi d'imaginer qu'elle ne puisse jamais me donner son cœur mais il est impensable pour moi qu'elle ne soit pas dans ma vie du tout.

C'était irresponsable, c'était dangereux, c'était démesuré mais en réalité, je le referais encore. Encore et encore.

Léna, je crois que même si je ne me sens plus coupable, j'ai toujours regretté de ne pas avoir su te sauver. Il était déjà trop tard quand je suis arrivé mais si je n'étais pas parti nager, je serais probablement arrivé à temps. Quelque part, je le regretterai toujours quand bien même c'était ton choix. Je ne voulais pas commettre la même erreur deux fois.

Tu vas me dire que c'est bien différent car ici il s'agissait d'un accident. Un putain d'incendie. Mais j'ai eu tellement peur de la perdre. Je ne savais même pas que je l'aimais à ce point. Je ne le savais pas jusqu'à ce que je sente ma jambe en feu et que ça ne m'empêche pas de continuer d'avancer.

J'ai toujours cru que l'amour, le vrai, ça n'arrivait qu'une fois dans une vie. Et j'ai bien cru que c'était toi et qu'une fois que tu étais partie, cela n'arriverait plus.

Finalement, j'avais tout faux.

Je t'ai aimée tellement fort et tu étais la femme de ma vie. Nous avions notre vie bien tracée, on s'était rencontrés à une soirée universitaire et on avait les mêmes ambitions. Ça roulait entre nous, c'était simple, prévisible et je voyais l'avenir avec toi. J'espère que tu ne le prends pas mal et que tu comprends ce que je veux dire. Nous n'avons pas été amis ou meilleurs amis dans un premier temps, nous nous sommes mis ensemble parce que ça paraissait évident. Et c'était simple.

L'amour que j'ai pour Juliette est différent. Il n'est pas moins fort. Avec Juliette, rien n'était simple. Elle a été mon amie avant d'être ma meilleure amie. Elle a été mon pilier avant d'être l'objet de mes désirs.

C'est arrivé comme ça, en un coup de vent, avec une alchimie qui ne s'explique pas.

Je ne t'oublierai jamais parce que tu as compté pour moi et parce que je t'ai aimée, sincèrement et entièrement. Je suis triste et j'ai mal que tu aies été aussi malheureuse et que je n'ai rien pu faire pour t'enlever cette tristesse. Et je penserai encore à toi.

Je coulerai avec toiWhere stories live. Discover now