Chapitre 16

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Aujourd'hui

LÉO

Je ne pensais pas être capable de me livrer à quelqu'un sur Léna. Je ne pensais pas non plus pouvoir être compris à ce point. Juliette est la première personne qui semble partager ma peine sans la juger.

Je mentirais si je disais que ce matin, je n'étais pas bouleversé. Je n'ai pas fermé l'œil. Les mots de Juliette et mes pensées se mélangeaient. J'étais triste, apaisé, en colère, soulagé. Tout cela en même temps.

Au petit matin, je suis parti marcher et j'ai directement été à la brasserie. Juliette dormait encore lorsque je me suis levé et je n'ai pas osé la réveiller. Je me suis d'abord demandé si elle dormait et j'ai approché mon oreille de la porte, quand j'ai entendu ses ronflements. Elle dort bien, apparemment, me suis-je dit.

J'ai la sensation que la soirée d'hier nous a rapproché. Lorsque l'on vient à partager nos blessures et nos failles avec quelqu'un, cette personne prend un morceau de nous. Ce n'est pas juste des mots, uniquement une discussion, c'est une part de notre histoire. Et avec Juliette, tout me semble tellement simple. Et à la fois si compliqué.

J'ai l'impression de pouvoir tout lui dire. Elle fait partie de ces gens qui trouvent le bon en chacun de nous. Elle ne juge pas, elle écoute, elle essaye de comprendre et elle vous soigne comme elle peut. Parfois grâce à son sourire, d'autres fois avec son rire et aussi avec ses mots.

Cette fille est un ange tombé du ciel. Me l'as-tu envoyée?

Je suis triste qu'elle doive vivre sans sa mère. Dans ses yeux, j'ai vu toutes les fêlures qu'elle en a gardé. Je n'ai pas besoin de savoir le pourquoi du comment pour comprendre que ça fait mal. Juste mal.

Alors que j'essaye en vain de trouver une recette pour la semaine prochaine, je profite de ma pause de midi pour aller la voir. On mange ensemble presque tous les jours et c'est devenu une routine dans laquelle je me complais. Je n'avais plus rien à lui proposer de notre service donc j'ai pensé à l'emmener chez une amie de Louisa qui fait des plats merveilleux selon cette dernière. Quelque part, j'avais peut-être envie de la remercier d'avoir été là hier. De m'avoir écouté et compris, même dans le silence.

Je me dirige vers la librairie quand j'entends son rire de la rue. Ce rire. Je pense qu'elle rigole avec Sylvie quand je vois un homme face à elle.

Léo? demande-t-elle.

– Salut, je te dérange?

– Non, pas du tout.

– Je venais te proposer d'aller manger ensemble ce midi chez une amie de Louisa, dis-je.

– Euh...Eh bien, j'ai déjà accepté de manger avec Alex.

– Alex? demandé-je.

Le type qui me fixe?

– Mon nouveau collègue. Viens, je vais te le présenter.

– Pas la peine, je retourne bosser. Salut.

Je n'ai aucune raison de réagir de la sorte. C'est même très malvenu de ma part. Mais je n'ai pas pu m'en empêcher. C'était impulsif. Et là, je me sens blessé, presque trahi. Alors qu'elle va juste manger avec son collègue. Seulement, c'était notre truc de manger ensemble. Ma réaction est ridicule et enfantine à souhait.

Qu'est-ce qui me prend, sérieux?

J'hésite à faire demi-tour pour m'excuser mais je préfère laisser les choses se tasser. Elle doit me prendre pour un enfant, et elle aurait raison de le faire. J'ai juste peur, je crois. Peur qu'elle s'éloigne de moi. De la perdre. Qu'elle finisse par s'ennuyer de nos moments à deux. C'est ma meilleure amie. Et ça me tue de le dire mais je ne supporterais pas de revenir à l'époque où elle ne faisait pas partie de ma vie.

Je coulerai avec toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant