Chapitre 8

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Aujourd'hui

JULIETTE

Je ne pensais pas que Léo accepterait.

Et maintenant, je me retrouve un peu gênée et j'espère que Gaby n'est pas déjà de retour à l'appart' sinon elle va se poser des questions. J'espère aussi que j'ai de quoi lui proposer à boire.

Quelle gourde. J'aurais probablement dû y penser avant.

À vrai dire, j'ai surtout proposé ça car nous avons passé un bon moment et que je me sentais redevable envers lui pour m'avoir ramenée.

J'ai adoré ce moment à la piscine, Ethan est un vrai rayon de soleil et Léo est...indéchiffrable. Je me demande s'il a toujours été comme ça. S'il a toujours été fermé. Si la vie lui a fait mal pour qu'il devienne ainsi. C'est comme si chaque matin, il posait sa carapace sur son dos et que par bribes d'instants, elle se brisait pour nous laisser entrevoir un sourire.

Un magnifique sourire.

J'ignorais totalement qu'il s'agissait d'un nageur, même si cela explique les tablettes de chocolat. Quand je suis arrivée au bord de l'eau, je ne suis pas parvenue à résister à ma curiosité. Lorsque nous nous sommes dirigés vers la piscine à vagues avec Ethan, j'ai tourné la tête et je l'ai vu plonger. On aurait dit un poisson dans l'eau. Ou une sirène. Une sirène homme?

Cette pensée me fait rire. Seulement, j'avais oublié que j'étais accompagnée.

— Ça va ? demande Léo.

La honte. Je me racle la gorge alors qu'on arrive devant ma porte.

— Euh, oui. J'étais juste en train de t'imaginer en sirène.

— Une sirène homme?

— Voilà.

Et nous éclatons de rire tous les deux. Je me rends compte alors qu'il s'agit d'encore un de ces instants. Un de ces instants où il brise sa carapace. Et où il rit.

Nous entrons dans l'appartement et Gaby n'est pas là. Par contre, c'est le bordel. Je me sens rougir de gêne.

— Désolée, c'est vraiment le bazar..., soufflé-je.

— Ce n'est rien.

— Décidément, tu dois te demander sur quel genre de folle t'es tombé.

— Quelque chose comme ça, ricane-t-il.

Il sourit encore?

Je me dirige vers le frigo et je remercie l'Univers pour y avoir trouvé une bouteille de Cava. C'est probablement à Gaby. Elle me pardonnera. Je ne peux pas lui proposer un Caprisun.

— J'ai du Cava, si tu veux.

— Eh bien, je conduis...Alors, je suis obligé de refuser.

— Putain, la conne.

— T'inquiète. De l'eau c'est bien, sinon.

— Hum, ou alors j'ai des Caprisun..., dis-je en grimaçant.

— J'adore les Caprisun. C'est parfait.

Je le lui apporte et effectivement, il a l'air d'adorer. Je le vois regarder ma bibliothèque et pour une des rares fois qu'un homme la regarde, je ne sens pas une once de jugement dans son regard.

— Toi aussi, tu lis? demandé-je.

— Pas vraiment. J'ai dû lire quelques livres pour les cours il y a longtemps mais disons que d'autres choses m'ont occupé depuis.

— C'est vrai que lire dans l'eau, ça doit être difficile.

— Légèrement.

J'avais peur que ça soit gênant entre nous deux ici, chez moi, seuls. Mais je me surprends à passer un moment naturel avec Léo. J'aimerais tellement savoir pourquoi il a cessé de nager, surtout à son niveau. Mais j'ai bien vu sa réaction dans la voiture. Le genre de réaction qui veut dire je ne suis pas prêt à en parler. Et je comprends, donc je ne demanderai plus. Après tout, ce ne sont pas mes affaires.

Je sens l'eau de mes cheveux couler le long de ma nuque et je me souviens que je pue le chlore et que mes cheveux sont totalement emmêlés. J'aimerais vraiment prendre une douche. Mais ça ne se fait pas avec un invité, si?

— Ça te dérange si je vais prendre une douche? Je me sens vraiment puante de chlore et ma peau est plus sèche que le désert du Sahara.

Il quitte ma bibliothèque des yeux et plonge son regard vers moi. Ai-je encore abusé?

— Pas du tout. À priori, tu es encore chez toi. Je peux partir si tu veux.

— Tu ne me déranges pas. Mais si tu souhaites rentrer, tu peux.

— Je peux te prendre un livre pour patienter? demande-t-il.

C'est la première fois que quelqu'un me demande ça. Même Gaby déteste lire. Elle ne comprend pas d'ailleurs comment je peux passer autant de temps "devant des pages avec des mots" comme elle dit.

— Euh, oui...Oui, bien sûr.

Il se lève vers la bibliothèque tandis que je me dirige vers la salle de bain. J'enlève mes vêtements et je sens que j'ai mal aux jambes.

Je ne suis vraiment pas sportive...Même une piscine à vagues m'achève.

L'eau de la douche coule le long de mon corps et ça me fait un bien fou. Je me sens nettement plus fraîche quand j'enfile mon pyjama. J'attache mes cheveux à nouveau en chignon et je rejoins Léo dans le salon.

Il est posé dans le canapé. Avec un livre à la main. Les Contemplations de Victor Hugo.

— Tu aimes la poésie? demandé-je.

— Eh bien, c'est particulier. Et agréable. Mais triste aussi.

— Oui. C'est un recueil qu'il a écrit principalement pour partager sa douleur et ses doutes, notamment sur le sens de la mort après le décès de sa fille.

— Je peux te l'emprunter? demande-t-il.

Je ne comprends pas pourquoi il souhaite lire ce recueil de poésies. Personne ne s'intéresse à Hugo aujourd'hui. Encore moins quelqu'un qui ne lit pas.

— Euh, oui. Mais tu me le rends.

— Je n'oserais pas te le voler, répond-il.

Nous restons là encore un petit moment avant qu'il m'annonce qu'il doit rentrer. D'un coup, j'ai froid. Je ne sais pas si c'est l'effet de la douche ou si la météo s'est vraiment refroidie mais je m'en vais dans la chambre chercher un de mes sweats préférés avant de lui dire au revoir.

Lorsque je reviens dans le salon, le regard de Léo se pose sur mon sweat. Puis moi. Puis mon sweat.

— Tu aimes Spiderman?

— J'aime pas. Je vis pour.

— Les Marvel ?

— Je meurs pour.

Là, son regard s'illumine. On dirait que c'est Noël. Il pose le livre et se rapproche de moi.

— Lequel est le meilleur? demande-t-il sur un ton très sérieux.

— Civil War, sans hésitation.

— Le plus drôle?

— Les Gardiens de la Galaxie.

— Le plus triste?

— Endgame.

— Un personnage sous-côté?

— Hulk et Wanda.

— Un personnage sur-côté?

— Thor. Je préfère Loki.

Il sourit. Il reprend le livre dans ses mains. Puis, il se dirige vers la porte tandis que son sourire n'a pas quitté son visage.

— T'es probablement folle mais t'es aussi très intéressante, souffle-t-il avant de fermer la porte derrière lui.


Je coulerai avec toiHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin