Chapitre 18

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Il ne s'était passé que trois jours depuis la rencontre au bar de Pierre et Sylvain. Le patineur était resté enfermé chez lui sans donner signe de vie à qui que ce soit. Le libraire, lui, s'était concentré sur son travail pour occuper le plus possible son esprit. Mais ce n'était pas possible de faire semblant. Il avait été horrible avec Sylvain et la culpabilité le bouffait bien plus qu'il ne l'aurait cru. Il se torturait depuis ce soir-là, se maudissant d'avoir agi ainsi. Pierre se sentait perdu, ne sachant pas comment retourner vers son ami. Avait-il créé un fossé entre eux ? Est-ce que Sylvain voulait encore le voir ? Est-ce qu'il allait pouvoir revenir vers lui ? Plusieurs questions tournaient en boucle dans son esprit, ne trouvant bien évidemment pas de réponses. Il fallait qu'il y aille. Il devait le voir, lui parler, lui expliquer, s'excuser.

Alors après avoir fermé la boutique, Pierre grimpa dans son véhicule. Son cœur battait trop vite, ses mains étaient trop moites et sa respiration trop irrégulière. Pierre avait peur. Et il détestait ça. Il avait peur que Sylvain ne lui échappe. Cette idée lui donnait la nausée. Il ne s'était jamais autant torturé pour quelqu'un que ces derniers jours.

Pierre s'était posté devant la porte de l'appartement numéro 03. Il ne bougeait pas, il fixait juste la poignée. Une grande inspiration, puis deux, il sonna. Sylvain lui ouvrit, mais resta dans l'encadrement de la porte. Ses yeux étaient marqués par les larmes et son visage tiré du manque de sommeil. Pierre prit la parole.

"Salut, euh... Écoute, je vais essayer de faire vite pour ne pas te déranger. Je voulais m'excuser pour l'autre soir. Je n'ai vraiment pas été correct avec toi. Je t'ai fais peur, je t'ai fait pleurer et je m'en veux énormément. J'aurais préféré en avoir eu rien a foutre d'agir comme ça mais c'est pas le cas. Et ça aussi, ça me bouffe. Parceque putain je me suis jamais pris autant la tête pour un gars. J'ai jamais eu peur de blesser quelqu'un. Parce qu'en général je m'en branle des autres et personne n'avait jamais été assez important pour que ça soit le cas. Avant. Tout ça, c'était avant. J'ai peur d'avoir tout foutu en l'air et je ne sais pas quoi faire...

-Je pense qu'on a tous les deux nos torts. Je n'ai pas été correct non plus. J'ai même été très grossier envers toi et désolé. Je pense qu'il y a eu une accumulation de pleins de choses et que l'alcool a tout fait ressortir. Pas de la bonne façon.

-Je m'en fiche. Vraiment Sylvain, ton comportement ce soir là c'est le dernier de mes soucis. Je ne t'en veux pas. Ce qui me blesse le plus c'est de savoir que j'ai été horrible avec toi. Je me suis énervé et je t'ai crié dessus, c'est bien pire. Et rien, vraiment Sylvain, rien ne justifiait ça. J'ai voulu te laisser rentrer dans le noir, alors que putain je sais très bien que...

-Tu ne l'as pas fait... Puis je me suis mêlé de ce qui ne me regardait pas, avec l'autre garçon. Et le reste.

-C'est passé et oublié. Ne te prends pas la tête avec ça, je voudrais qu'on passe à autre chose. Qu'on reprenne comme avant...

-J'aimerais beaucoup aussi... Entre."

Sylvain s'écarta de l'encadrement de la porte pour laisser passer son ami. Pierre obéit et observa un instant l'appartement habituellement ordonné. Mais ce soir, ce n'était pas le cas. Il y avait du bazar dans le salon et la salle à manger. Des restes de nourritures, des emballages vides et dans la cuisine, de la vaisselle sale. Le patineur s'excusa du désordre mais Pierre s'en fichait. Il s'approcha de lui pour l'observer un peu et ça lui faisait du mal de le voir comme ça, les traits tirés par l'épuisement.

"Tu n'as pas beaucoup dormi toi.

-Pas vraiment.

-Faudrait que tu te reposes.

-En fait, j'aimerais sortir. Prendre l'air. Juste une promenade.

-Tu as une idée ?

-Surprends moi.

Libéré, Délivré...Where stories live. Discover now