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CHŒUR : Le jeu continue, il s'agit de faire semblant. Le sang n'a plus d'importance et ce depuis plusieurs années. L'ichor teinté de détresse de Cassandre tâche le ciel et la robe de ses amants ㅡ Apollon et Penthésilée se partagent la scène ; Soleil et une femme mortelle dont l'existence valait plus que la sienne. Les étoiles sont mortes, Cassandre écrira dans leurs bras ses prochaines prophéties ; tracera du bout des doigts trempés de carmin les constellations d'un Destin auquel nul ne peut échapper.
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Le monde n'est pas un endroit sûr ㅡ et il ne reste qu'un seul lieu où le feu n'a pas pris. Soleil couve la terrasse de la maison Di Blasio du regard, tout le monde le remarque et personne ne le chasse. Une fenêtre est ouverte entre un vieux débardeur et un short de pyjama ; les reins de Sveva apparaissent et elle se rendra compte plus tard de la brûlure. Elle y est habituée, et les vagues salées de cet après-midi ont léché l'empreinte des baisers échangés dans la nuit. Il n'en reste que le souvenir, désormais, et le message de Federico auquel elle doit vraiment répondre. Il y a plus important à faire pour l'instant.
ㅡ Tu comptes jouer ou non ?
ㅡ Je réfléchis. Arrête de me presser, tu me stresses!
L'agacement de Suzana devient tangible, ses iris roulent sous ses paupières et Palmira n'en a strictement rien à faire. Ses lèvres glissent sur une glace à l'eau parfum grenadine ( elles traînent dans le congélateur depuis au moins une semaine de trop, mais la logique est implacable : ce n'est que de l'eau du robinet et du sirop bon marché. Aucun des deux ne peut périmer, alors il n'y a aucun risque ) ; et les yeux de Sveva glissent sur elle.
Suzana a raison de s'exaspérer ; cela fait bien cinq minutes que sa petite sœur examine les pions étalés sur la table de la terrasse et bloque le jeu. Le vent se lasse, il gémit entre le lierre et les murs en pierre. Une bougie jaune parfum citronnelle brûle entre elles, sa flamme danse sur le visage de Sveva ㅡ elle baîlle.
ㅡ J'en ai marre d'attendre, appelez-moi quand elle se sera réveillée.
( Suzana quitte la scène. ) ( Palmira observe brièvement le dos de son aînée, elle disparaît dans la maison. )
