Chapitre 16

25 1 0
                                    

Je fus violemment éblouie par la lumière du couloir quand la porte s'ouvrit. Une silhouette noire se détachait du blanc qui m'agressait les yeux. Elle s'approcha de moi et me pressa délicatement l'épaule en me murmurant que c'était fini, que j'allais sortir. Une larme de soulagement roula sur ma joue.

La personne m'aida à me relever mais, immédiatement, mes jambes se dérobèrent et, sans elle, je me serais retrouvée au sol. Elle me traîna jusqu'au couloir où elle m'assit dans un fauteuil roulant. Je fermai mes yeux pour les protéger des néons ardents. Une couverture se posa sur mes genoux, ma tête dodelina et je sombrai dans un sommeil sans rêves ni cauchemars pour la première fois depuis mon retour.

Je grognai en ouvrant les yeux que je refermai aussitôt. La lumière était trop forte. Je remarquai un bip constant qui résonnait non loin de moi. L'endroit dans lequel j'étais allongée était confortable et sentait le désinfectant. Une voix douce murmura mon prénom et me demanda d'ouvrir les yeux en me prévenant qu'elle avait baissé la luminosité de la pièce. Je relevai donc doucement les paupières et tournai légèrement la tête. Mon corps était trop faible pour que je puisse faire quoi que ce soit d'autre. Une femme rousse me regardait en souriant. Elle me posa quelques questions auxquelles je ne pouvais pas répondre pas. Elle finit par abandonner et m'endormit grâce à un sédatif.

Je réouvrai les yeux. Une nouvelle infirmière était dans la salle et quand j'acquiesçai à son « tu te sens bien ? », elle m'aida à m'asseoir. Ma tête tourna. La femme me proposa un verre d'eau. Je n'avais pas réalisé à quel point ma bouche était sèche.

La troisième fois que je me réveillai, je me redressai seule. Quand une infirmière entra dans la chambre, elle s'inquiéta de mon état avant de sortir pour revenir avec une assiette de soupe que je dus ingurgiter entièrement. Elle me parla un peu avant de me recoucher et de me rendormir.

Au total, je restai deux semaines dans cette chambre blanche où les machines bipaient à longueur de temps. J'avais réappris à marcher sans trébucher. J'avais lu, bien que, parfois, des maux de crâne m'empêchaient de penser. Je m'étais renseignée sur mes amis grâce aux conversations des infirmières qui me pensaient endormie. J'avais appris que j'étais restée dans la cellule d'isolement pendant exactement un mois et deux semaines. J'avais donc perdu deux mois. Deux mois durant lesquels mes amis emprisonnés avaient été transférés d'un laboratoire à l'autre, torturés à cause de leur immunité au virus.

Dès que j'en avais été capable, j'avais annoncée vouloir reprendre mes fonctions. Malheureusement, à cause de ma fuite, j'avais été rétrogradée à un poste mineur qui n'avait pas accès à toutes les informations sur les sujets des Labyrinthes. Je n'avais pas accès à grand chose, à vrai dire. J'avais presque du mal à rassembler les informations nécessaires à la bonne réalisation des tâches que l'on m'avaient données.

Alors, pendant des mois, j'avais entrepris, grâce à des commentaires bien placés et une obéissance sans failles aux ordres, de regagner la confiance de mes supérieurs. Cela avait porté ses fruits car, après trois mois et dix-sept jours de travail, le vendredi 6 juillet 2232, j'avais été transférée à la base opérationnelle de WICKED, dans la Dernière Ville. Comme le taux de contamination au virus avait augmenté d'environ 300%, je reprenais mon poste précédent enfin d'élaborer un vaccin. Pour cela, je devais côtoyer quotidiennement les sujets. J'endossai dès lors le rôle de la scientifique au cœur de pierre. Tous devaient croire que je n'avais plus aucune empathie pour les immuns.

Chaque jour se ressemblait et chaque soir, je retrouvais mon lit avec soulagement et me laissais aller à tous les sentiments que je n'avais pas pu exprimer durant la journée. Les larmes roulaient sur mes joues lorsque je repensais aux airs fatigués des sujets. Ils étaient dix et semblaient tous sur le point de s'écrouler.

Nous étions le vendredi 13 juillet. Selon une superstition liée à la religion chrétienne, ce jour est un jour maudit. Je ne crois pas à la fortune ou au karma mais ce jour-là, il me fut assez difficile de me raisonner. En effet, pour commencer, je croisai mon père dans les couloirs pour la première fois en presque six mois. Par chance, il ne m'adressa qu'un regard chargé de haine avant que je n'accélère pour retrouver ma salle de travail. Ensuite, un immun tenta de fuir mais, n'y parvenant pas, préféra se donner la mort avec l'arme du soldat avec lequel il était en train de se débattre. Ce dernier fut considéré coupable du meurtre et renvoyé de la ville. Par cela, j'appris qu'un convoi véhiculant tous les autres sujets arriverait sept jours plus tard. Tous seraient testés puis séparés en deux groupes. Je ne savais pas dans quelles sections Minho, Sonya et Aris seraient envoyés mais je ne pourrais rien pour eux et cela me tuait.
Pour finir la journée, je me retrouvai face à Térésa qui semblait sur le point de quitter le bâtiment, probablement pour la nuit. Avant qu'elle n'ait pu dire quoi que ce soit, je m'éloignais rapidement avant de m'enfermer dans ma petite chambre blanche et silencieuse.

Quand j'avais fuis, mon père avait détruit toutes mes possessions. Et quand j'étais arrivée ici, il y avait une semaine, il avait pris un malin plaisir à mettre les morceaux brisés de mes disques et livres au centre de la pièce. J'avais pleuré longtemps sur les débris du vinyle de Lana del Rey, une des dernières choses qui me rattachait vraiment à ma mère. Depuis ce jour, j'étais de nouveau retombée dans mon mutisme, n'ayant plus rien à tirer de possibles relations.

Les mêmes jours défilèrent pendant encore une semaine, jusqu'au vendredi où le convoi des immuns était censé arriver. Mais il n'arriva pas. Par les bruits de couloirs, j'appris qu'il avait subit une attaque et qu'un wagon entier avait disparu. Grâce à la base de données, à laquelle j'accédai facilement dès que je réussis à entrer sans me faire repérer dans une salle dont les ordinateurs étaient connectés à tout le réseau de WICKED, j'appris que Sonya et Aris faisaient partis de la quarantaine de libérés. Cela m'enleva immédiatement un poids des épaules. Je pourrais me concentrer sur Minho. Ce dernier serait emprisonné dans ces locaux dès le lendemain bien que je ne saches pas encore la section dans laquelle il serait envoyé. Ce qu'ils avaient prévu de faire subir aux enfants, peu importe leur affectation, m'horrifiai. Mais il y en aurait une qui le tuerait à coup sûr. Je ne pus malheureusement pas me pencher plus sur le sujet par manque de temps et quittai la salle avec empressement une fois tous les appareils éteints.

Cette nuit-là, mon sommeil fut peuplé de cauchemars.

WICKED is good....Where stories live. Discover now