Chapitre 20 : Évanescence

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Inspire. Expire. Encore. Lentement. Voilà ce que je m'intimais à faire depuis un temps que je n'aurais pu déterminer. Ce processus ayant pour but ultime de retenir tant bien que mal l'irritation de plus en plus intense que je ressentais. Je tâchais de faire abstraction de l'endroit où je me trouvais. Difficile à faire alors que je sentais le fer dur et inconfortable du banc sur lequel je me tenais allongé me rentrer douloureusement dans le dos, me mordant d'un froid des plus désagréables même à travers mon pull. Je me trouvais en effet bien malgré moi de nouveau étendu de tout mon long, enfin plutôt avec les jambes repliées vu le manque de place, sur le banc de ce couloir d'hôpital froid et aseptisé. Je posais un bras sur mes yeux clos pour tenter d'ignorer au mieux les trop nombreux visiteurs, infirmières, docteurs et autres personnels hospitalier en tout genre. Sans vraiment de succès toutefois puisque je pouvais toujours les entendre. Tout ce que je voulais pourtant c'était oublier cet endroit mais c'était déjà trop demandé visiblement.

- Monsieur ?

Perdu dans les tréfonds de mes pensées, une petite voix fluette émergea de tout ce bruit incessant qui m'entourait. Je n'y prêtais pas la moindre attention, persuadé que cette voix enfantine ne s'adressait pas à moi. Après tout, pourquoi un enfant me parlerait ? Pourquoi quiconque hormis Arnaud ou sa famille m'adresserait la parole ?

- Monsieur ? Répéta la même voix mais avec plus d'insistance cette fois, accompagnant ses mots d'une légère secousse sur mon bras, si faible que je faillis la manquer.

Il semblerait que c'est à moi qu'on parlait finalement. Ou plutôt qu'on essayait de parler. Peu enthousiasmé par l'idée d'être dérangé dans mes élucubrations, certes inutiles mais préférable à toute discussion avec un inconnu dans un hôpital, je grognais durement tout en ôtant le bras recouvrant mes yeux pour ouvrir les paupières sur le plafond blanc se trouvant au dessus de moi. Je pivotais la tête pour aussitôt tomber sur un jean et un tee-shirt rose m'indiquant que j'avais probablement affaire à une petite fille. Typique des parents d'habiller leur « petit princesse » de cette couleur. Hypothèse validée dès que je relevais un peu mon regard puisque je tombais aussitôt sur un visage poupon assez pâle auréolé d'une crinière blonde et bouclée si ébouriffée qu'elle en devenait digne d'Arnaud lui-même ce qui n'était pas peu dire. Bien qu'elle soit vêtue d'habits on ne peut plus classique, je repérais un bracelet à son poignet m'indiquant qu'elle devait être une des nombreuses patientes de l'hôpital. Vu sa silhouette, elle devait avoir entre six et huit ans. Bien. Je me trouvais face à une gamine malade se baladant seule dans les couloirs de l'hôpital. Bizarrement, je la sentais pas cette histoire. Une fois mon examen terminé, je prenais enfin le temps de plonger mon regard dans celui de la gamine, m'immergeant dans deux immenses yeux bruns.

- Qu'est-ce que tu veux ? Grommelais-je peu aimablement.

Voilà qui n'allait pas aider à remonter ma côte de popularité auprès des enfants. Je n'avais rien contre eux, bien au contraire, mais c'était pas le moment pour venir me parler, qu'on soit un enfant ou un adulte. En revanche les gosses ne m'aimaient pas en général, c'était un fait prouvé à de multiples occasions. Surtout ceux ayant déjà vu un de mes sketchs. D'ailleurs, lors de mon one man, vous ne trouviez que rarement des ados de moins de quinze ans et aucun de moins de dix. Trop jeune pour comprendre que je ne faisais que jouer un rôle sur scène et que je n'étais pas ainsi dans la vrai vie. Pas que j'étais spécialement agréable au quotidien non plus. J'avais un caractère de merde. J'en avais conscience et l'assumais.

- T'es malade ? Me demanda la gamine sans se formaliser de mon ton ou de l'expression peu accueillante clairement lisible sur mon visage.

- Non, grognais-je de manière à peine audible étant toujours aussi peu coopératif.

Dépendance | ⚠️EN PAUSE⚠️Where stories live. Discover now