Chapitre 26

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August


« Et donc, tu peux me dire ce que tu fais là exactement ? »

April, étendue sur le ventre sur mon lit, tourne la tête dans ma direction sans interrompre le battement régulier de ses jambes.

« Je suis venue te divertir, quelle question ! »

Il y a à peine une heure, je dormais paisiblement loin de me douter de la tornade qui me guettait. April est entrée en trombe dans ma chambre, a ouvert les volets et m'a délogé, arraché à mon confort. C'est Bleu, qui lui a soufflé l'idée de venir me réveiller alors qu'April s'apprêtait à rebrousser chemin.

« Je n'ai pas besoin de toi pour m'occuper. »

Un sourire narquois étire son visage, peu importe ce que je pourrais dire, elle ne bougera pas.

« Voyons August, je sais très bien que je suis ta seule amie, elle roule sur le dos et pose son poignet sur son front. Comment pourrais-je te laisser à ton terne quotidien ? »

Je ne lui réponds pas. Quelque chose dans ce qu'elle dit m'agace.

« August ? » Elle se redresse et s'assoit au bord du lit. Me détaillant de la tête aux pieds.

« Tu n'es pas ma seule amie, » J'évite son regard sentant le rouge me monter aux joues. « J'ai Gabriel aussi. »

Elle bat plusieurs fois des paupières, comme analysant ce que je viens de lui dire. Puis, pouffe de rire presque imperceptiblement.

« C'est donc ça qui te tracassait ? » Elle approche sa main de ma joue et s'en sert pour diriger ma tête vers elle. « Je suis désolée, je plaisantais. Je ne pensais pas que tu le prendrais sérieusement ».

Nos regards sont plongés l'uns dans l'autre. Mon pouls s'accélère. Je suis désormais beaucoup trop conscient de la vague de chaleur qui me traverse à chaque fois qu'April pose les yeux sur moi. Je me défais de son emprise, de façon sûrement trop brusque. Mais cela ne semble pas la déstabiliser. Depuis ce soir où nous avons déambulé dans les rues, je ne parviens plus à agir normalement en sa présence. Je sais que ce que je ressens pour elle n'est pas de l'amitié. Lorsque je suis près d'elle, j'ai envie de la toucher, de serrer ses mains dans les miennes, de m'abandonner à son contact, mais je ne peux pas. Je ne veux pas l'importuner avec ce que je peux ressentir, car je sais qu'elle ne me voit pas de cette façon. Je le sais, et pourtant, lors de moments comme celui-ci je ne peux m'empêcher de me faire des films. D'imaginer l'espace d'un instant, que ça puisse être réciproque. Et c'est ce genre de pensées qui me mettent si mal à l'aise.

« D'ailleurs, » reprend April, me sortant de sa rêverie. « Je me demandais, qu'est-ce que tu penses de Gabriel ? »

Elle évite désormais de me regarder, fixant les lattes du plancher avec insistance.

« Gabriel ? » je répète son prénom surpris.

Qu'est-ce que je pense de Gabriel ?

« Bonne question. Pourquoi ? »

« Je ne sais pas. C'est juste que vous avez l'air proches mème si parfois tu restes un peu froid avec lui, comme si tu essayais de poser délibérément une limite entre vous. »

Cette fois-ci, c'est à mon tour de battre des paupières. Je ne pensais pas qu'aux yeux des autres Gabriel et moi semblions proches.

« Et bien... à vrai dire je n'y ai jamais vraiment réfléchi. Nous nous connaissons depuis un certain temps et avons souvent patiné ensemble. Il parle beaucoup, et m'a toujours approché le premier. C'est une personne sympathique, un peu naïve, qui ne connaît pas la définition d'espace personnel et qui est trop bruyant, » les mots et adjectifs défilent alors que mes pensées se mettent en ordre. « Mais surtout, je dirais que c'est quelqu'un de profondément gentil. »

August et AprilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant