Chapitre 19 - Il y aura mille vies qui précéderont sa renaissance

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Anela


— Beret... c'est Anela.

Mes pas s'immobilisèrent en regardant Beret. Allongé sur un genre d'hôtel de sang cristallisé avec un bras manquant, son teint était livide. Son état s'était tant détérioré en quelques heures... il allait mourir, d'une seconde à l'autre. J'avais failli à le protéger. Sa respiration sifflante me parvenait et des grimaces de pures douleurs agrémentées son visage. Ce fut idiot, mais en voyant son air blafard, je me souvins de la première fois que je l'avais, des préjugés que j'avais eus à son encontre.

Cela m'amusa brièvement et je sus que Beret serait un souvenir dont j'allais aimer me souvenir. Cette réalité, ô combien douloureuse et triste, étreignit douloureusement mon cœur. Je m'approchai de lui, le palpitant en vrac sous l'angoisse de le voir disparaître. Ses yeux s'ouvrirent difficilement, comme s'il avait senti ma présence plutôt que l'entendre. Afin qu'il n'ait aucun effort à faire, je me penchai au-dessus de lui, une main sur sa poitrine ; sur son cœur au rythme si lent.

— Je... je ne voulais pas mourir seul, haleta-t-il.

Je déglutis, une boule se formant dans ma gorge et m'empêchant toute parole. Je plongeai mon autre main dans ses cheveux courts et les caressaient dans un geste réconfortant. Je lui souris, piteusement, mais cela voulut tout dire pour moi. Je souhaitais lui donner du courage, de l'amour et du soutien. Mon sourire voulait dire tant de choses. Je savais qu'il serait le dernier que j'offrais sincèrement. Les larmes gorgèrent mes yeux sous le sifflement qu'il laissa échapper.

— Je reste avec vous Beret, soufflai-je la voix faible. Jusqu'à votre dernier souffle.

Il acquiesça et une larme glissa sur sa joue, suivie d'une seconde et puis d'autres encore. Je retirai mes mains de son corps et montai sur l'hôtel, à l'arrière de sa tête. Je relevai cette dernière pour la poser sur mes genoux. J'enveloppai son visage, les mains posées sur ses joues, et reniflai, le cœur si gros que j'avais du mal à respirer convenablement.

— Comment vont... Fratera, Pero... et Selene ?

Il était inutile de gâcher ses derniers instants. Lui dire que Selene ne l'était en réalité pas ne serait qu'une raison de plus de s'indigner, de s'énerver et de souffrir. Je ne voulais pas cela pour lui. Je ne voulais pas que sa dernière pensée aille à Rune. Non. Je voulais sa paix.

— Ils vont bien. On ne nous a fait aucun mal, assurai-je.

Son mouvement de tête fut fébrile.

— Anela, gronda-t-il dans la douleur, ce monde... ne peut plus être sauvé. Trop de sang a déjà coulé. Ne... restait pas prisonnier d'une utopie. Ne luttait pas pour les autres.

— Beret, reposez-vous, murmurai-je.

— Non. Non... vous devez l'entendre. L'humanité... survivra. Désolé d'avoir... d'avoir dit que vous deviez être notre figure de proue. L'humanité survivra. Elle le fait toujours.

Je pris une vive inspiration, presque douloureuse sous ses mots. Beret était sur le point de mourir, mais il se souciait de moi. Ses derniers mots m'étaient adressés. D'une douceur que je ne me soupçonnais pas, mes pouces glissèrent sur sa peau dans des gestes réconfortants.

— Beret, reposez-vous, dis-je plein de gratitude. Vous le méritez. À votre réveil, vous serez au côté de notre Dieu Rodel et vous vivrez. Oui, vous vivrez près de mille vies à ses côtés et vous ne connaitrez aucun chagrin ni aucune douleur.

LA LOI DU SANG - LES SANGUINAIRES (BL/TERMINÉE)Where stories live. Discover now