Chapitre 4 - Le discours qui souleva les cœurs meurtris

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Selene


— Nos ancêtres ont mené cette guerre pour nous et nous voilà à la mener à notre tour avec l'espoir, certes fou, de la remporter. Qui d'entre nous n'a pas espéré se lever un matin sous les paroles des braves puresangs chevaliers qui nous annonceraient notre victoire ? Malheureusement, ces dernières années, rien de tout cela n'est arrivé et nous avons vu nos chers Ducs allaient et venir de chaque bataille où le sang versé gorgé un peu plus nos terres.

En écoutant l'Asmérion faire son discours, mon regard déambula sur la foule. Elle semblait portée par ses paroles, pourtant somme toute banale à mon humble avis. Et puis, je vis le doux Anela, le regard brillant et admiratif envers l'Asmérion et je vis que dans son regard, jamais aucun doute ne l'avait effleuré lorsque le chef des villes, de chaque Ducs et de tous, faisait ses beaux discours. Il croyait en l'Asmérion, moins qu'en notre Dieu Rodel, mais il y croyait. Sa pureté et sa foi me faisaient trembler d'excitation.

— Mes frères, mes sœurs, nous tous, enfant de Rodel, je crains avoir à vous annoncer une bien triste et sombre nouvelle. Aujourd'hui et les jours qui viendront, nous devrons faire preuve d'unité et de force plus encore qu'hier. Nos terres sont gravement malades. Les récoltes ne donnent presque plus rien et les animaux se meurent ou... en deviennent monstrueux. L'humanité s'éteint.

La foule se mit à murmurer et la terreur prit peu à peu place sur leur trait, pourtant à nouveau, plutôt que tous ses puresangs, je m'en référai à Anela. Cet être pour le moins curieux, qui avait essuyé des centaines de batailles et des milliers de pertes et qui continuait de sourire et de marcher fièrement, demeurait le visage impassible face à la foule. Il ne laissa rien transparaître alors que j'avais compris la douleur qui inondait son délicieux cœur palpitant.

— Des sacrifices devront être faits pour survivre, pour que les générations de demain demeurent pour l'avenir que les Ducs leur offriront.

Anela dut sentir mon regard sur lui puisqu'il leva la tête pour m'observer. Ses yeux rouges, face à l'un de ses compères, s'exprimèrent enfin sur le chagrin qu'il éprouvait et pourtant... pourtant le même doux sourire candide orna ses lèvres. Je ne décelai aucune envie particulière de sa part, pas les mêmes qui résidaient en mon esprit. Lui n'avait aucun désir. Certainement me voyait-il comme un collègue tandis que je rêvais de le dévorer.

En retrait avec Fratera et Beret, aucun civil ne pouvait voir le visage tendre qu'affichait le Vicaire Sanglant. J'étais seul témoin de cela.

— Dire que Vyl manque ça ! s'exclama Beret d'un ton bourru.

Anela décrocha son attention de moi pour observer Beret, Duc de Noirsang. En effet, Vyl, Duc de Blansang avait dû nous quitter d'urgence. On l'avait informé durant la nuit qu'un mal s'était abattu sur ses terres. Nous n'en avions pas su plus, mais nous avions convenu de nous retrouver à Morsang avant que le jour ne se lève pour débuter notre traversée dans les terres que les mangesangs occupés. Nul n'était vraiment inquiet pour Vyl puisque ce genre d'incident arrivait plus souvent qu'on ne pouvait l'imaginer.

Avoir versé autant de sang sur les terres n'était pas sans conséquence. La malchance venait de paire et plusieurs « incidents » avait frappé Sang tout au long des années. Un nouveau malheur ne serait donc pas nouveau, pour aucun de nous. Et, dans des temps aussi sombres, Anela avait eu raison de demander et de souhaiter l'unité par les paroles de l'Asmérion. Ce dernier, pris dans un discours des plus solennel pour tous, exposa à tous le problème des terres et de la nourriture qui commençait à manquer.

Pourtant, hors mis des murmures et des craintes qui se levaient, les puresangs ne s'indignèrent pas. Nul ne montra de signe de brutalité ou de rébellion. L'Asmérion avait parlé et la foule écoutait et croyait en lui. Il leur assura qu'il fera tout, avec l'aide des Ducs, pour leur donner un « demain » radieux et généreux en mets. Son peuple croyait en lui. À nouveau, je regardai Anela et ce dernier ferma les yeux au même moment. Certainement s'était-il mis à prier. Un air paisible reposait sur ses traits masculins.

LA LOI DU SANG - LES SANGUINAIRES (BL/TERMINÉE)Onde histórias criam vida. Descubra agora