L'ANTI-HÔTE [Partie 1]

17 : Bercés d'illusions (2)

Torielle s'éclipsa un instant pour aller s'habiller. J'en profitais pour faire discrètement le tour des lieux. Tout était rangé, sobre, en harmonie avec l'atmosphère générale de l'appartement. Seulement, pas un tableau, très peu de cadres avec des photos. L'un d'eux, posé sur une commode près de la télévision attira mon attention. Torielle, plus jeune, avec des cheveux très longs dans le dos. Elle était entourée d'un groupe d'amis souriants qui se tenaient par les épaules. Il devaient avoir à peine une vingtaine d'années. Le côté droit m'intrigua d'avantage. La photo était déchirée, et seul un bras autour des épaules de Torielle subsistait. Le reste de la photo avec le cinquième personnage avait disparu.

- Je suis censée travailler aujourd'hui, m'interpella alors Torielle en attachant ses cheveux de jais en queue de cheval. Mais comme mon travail consiste à te retrouver, on peut dire que je prends mon jour de congé.

Je me reculai instinctivement en la voyant, mais elle avait bien vu que j'étais penchée sur la photo.

- Ce sont mes amis du lycée, m'expliqua-t-elle en souriant.

Elle n'ajouta rien, mais pencha la tête en arrière. Les marques violettes en bas de son cou me provoquèrent un frisson d'effroi.

- Je...je suis désolée, balbutiai-je en baissant les yeux. C'est à cause de moi.

Comme je me massai moi même instinctivement la nuque, elle comprit que je parlais de la sienne.

- Non, c'est à cause de mon travail, et c'est moi qui l'ai choisi.

Je ne bronchai toujours pas.

- Viens t'asseoir.

Je n'eus qu'à contourner une petite table basse pour franchir la distance entre la télévision et le canapé. Elle s'assit délicatement près de moi. Elle ne me touchait pas, le canapé s'affaissa à peine sous son poids.

- Tu...tu es spéciale Athéna. Je suppose que tu l'avais compris.

Elle sourit et j'hochais timidement la tête.

- Et ton hôte aussi. Pourpre m'a fait une brève description de la relation qu'elles avaient toutes les deux sur le Nuage.

Elle plongea alors son regard dans le mien, mais ce n'était pas moi qu'elle cherchait.

- Ravie de te rencontrer Ambre, au fait.

J'aquiesçai à la place de mon hôte. Je n'arrivais pas à me faire à l'idée qu'elle ne s'appelait pas Lara.

Torielle prit une grande inspiration, tout en essuyant ses mains sûrement moites contre son pantalon.

- Je suppose que tu n'es pas prête à tout entendre aujourd'hui ? m'expliqua-t-elle gravement.

- Non, en effet.

- Je suis d'accord pour y aller par étapes. Mais je dois être sûre que tu me fais bien confiance.

Elle arqua un sourcil.

- Vous êtes une des rares personne à vouloir m'aider, si je ne me trompe pas.

- Non tu te ne trompes pas. Athéna, je t'attends depuis près de dix ans, je n'ai pas l'intention de te faire fuir.

Je ravalai des paroles précipitées que j'aurais pu regretter. Tellement de questions fusaient dans ma tête que j'avais l'impression d'exploser intérieurement. Si seulement tout était plus simple.

- Commençons par l'essentiel, coupai-je en secouant mes boucles brunes.

Elle croisa les jambes.

- Je t'écoute, que veux tu savoir ?