Chapitre 91 bis

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J'étais en train de feuilleter un énième bouquin à la recherche d'une mention de voyage à travers le temps. J'avais déjà épluché plus ou moins en diagonale les ouvrages axés sur le chamanisme pur et je ne faisais que vérifier dans des livres annexes par acquis de conscience.

La seule chose qui m'avait interpellé était une obscure mention dans un vieux livre d'annales d'un étranger dont on n'avait pu déterminer d'où il venait au début de la période Goryeo. Mais il était écrit que celui-ci avait la peau d'une couleur étonnante, presque noire, ce qui, en un sens, était aussi le cas de l'étrangère Ri Ah sauf qu'à l'inverse, elle avait une peau étrangement pâle et rosée. Et en fait, même s'il y avait pu avoir un rapport entre eux, ce qui me semblait improbable, ça ne m'aurait pas aidé car l'homme avait fini par mourir ici de maladie.

De ce que j'en savais, ça pouvait aussi bien être une anomalie de naissance, comme ces gens qui naissaient avec des altérations physiques. On les cachait aux yeux du monde mais ils existaient bel et bien.

Et si je faisais des recherches en vain car ce que je me démenais à trouver n'existait tout simplement pas ? Si l'étrangère avait juste inventé une histoire sortie tout droit de son imagination ?

« Décide-toi sur quoi penser d'elle une bonne fois pour toute. » explosa de rire la Piri.

Mais je n'y arrivais pas. Il y avait trop d'éléments contradictoires à son propos. En pensant à elle, j'avais du mal à imaginer qu'elle puisse être malhonnête et j'avais envie de l'aider mais... De toute évidence, certaines de ses actions n'étaient pas claires, en particulier ses intentions envers San. Et son histoire... Était tout à fait singulière. Elle pouvait être vraie. De ce que je savais du monde des esprits -et surtout de la sournoiserie de la Piri et par extension de tous les esprits- elle était crédible. Mais elle était aussi inédite. Et puisque c'était ainsi, cette situation pouvait effectivement se présenter pour la première fois ou être inventée de toute pièce. Ça en devenait invérifiable.

« Trois... Deux... » commença à étrangement compter la Piri. « Un ! »

La porte du bureau s'ouvrit brusquement et je sursautai tandis que l'étrangère qui occupait mes pensées entrait et s'inclinait devant moi. Elle avait l'air décidé et sa coiffure n'était visiblement pas faite du matin. Elle avait couru ici ? C'était spontané et mignon.

« Oh misère... » se plaignit la Piri en riant à moitié.

« Bonjour, votre altesse. » se reprit elle après son entrée fracassante, se rappelant les règles de la politesse.

Je me ressaisis aussi vite que je pus après la surprise qu'elle m'avait provoquée et fis de mon mieux pour prendre une expression sévère, ce qui n'était pas mon fort. D'autant que son entrée était inattendue mais mignonne. Cependant, si j'avais demandé à la voir chez elle, j'avais mes raisons. Je voulais éviter qu'elle entre de nouveau en contact avec la Piri. Son absence au dernier rendez-vous m'avait au moins permis de réfléchir à cet aspect et j'avais résolu qu'il fallait mieux éviter. Qui savait ce que pouvait lui raconter l'esprit pour la convaincre de la libérer ? Peut être était elle déjà en train de la harceler à ce sujet.

« Je pensais que mon message était clair. » lui fis je donc remarquer sans préambule. « Tu n'as rien à faire ici. » essayai je d'être intransigeant.

Difficile de paraitre contrarié quand on était heureux de voir quelqu'un. L'opacité de ses intentions m'effrayait mais elle m'intriguait tellement qu'elle dissipait mon ennui. C'était suffisant pour apprécier sa présence.

« Pauvre de toi... » soupira la Piri, condescendante.

« Pardonnez-moi mon impolitesse. » dit elle en baissant la tête avec toute la grâce d'une véritable repentante. « Je craignais que vous ne puissiez changer d'avis si notre rencontre ne se faisait pas sans délai. » me fit elle part de son souci.

Le souhait du roiWhere stories live. Discover now