32. Salle d'attente

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J'ai un rendez-vous à la consultation ambulatoire du service d'angiologie d'un hôpital universitaire bien connu dans la région.

Le rendez-vous est fixé à treize heures. La lettre de convocation demande de se présenter un quart d'heure à l'avance à l'accueil. J'arrive donc devant l'accueil à 12 h 45. J'aperçois à l'intérieur quelqu'un qui me tourne le dos, occupé devant un ordinateur. Le guichet est fermé et un rideau à lamelles est tiré.

Je décide de m'installer à la salle d'attente, même si un panneau indique de se présenter à l'accueil avant d'aller à la salle d'attente. La fenêtre est fermée, des chaises en plastique sont disposées le long des murs, l'écran où on diffuse des informations pour les patients est éteint. Depuis que la Covid est passée par là, il n'y a ni journaux ni publications sur la table.

Une jeune femme un peu morose est déjà là. Je la salue et obtiens à peine une réponse. Elle a un pied très enflé et porte des nu-pieds. Visiblement, elle ne peut pas entrer dans des chaussures. « C'est votre pied qui vous fait souffrir ? » Elle acquiesce. Une autre jeune femme s'installe à ma droite et commence à pianoter sur son smartphone, les écouteurs sur les oreilles, sans s'occuper de ce qui se passe autour d'elle. Arrive une dame plus âgée qui prend tout de suite deux chaises. Elle s'assied sur une des chaises, étend ses jambes sur la deuxième, appuie sa tête contre le mur et ferme les yeux. Position « sieste » ? Les yeux fermés, elle commence à ronchonner tout haut : « C'est toujours la même chose. On nous fait venir un quart d'heure avant, il n'y a personne, et après, il faut attendre. C'est un manque de respect pour les patients. » Elle ouvre les yeux et demande : « A quelle heure avez-vous rendez-vous ? » Nous sommes quatre personnes à avoir un rendez-vous à treize heures...

On vient chercher la dame qui continue de manifester haut et fort son mécontentement. La femme au pied enflé dit avec un petit accent de l'est (Serbie ? Kosovo ?) : « Si j'avais su, je ne serais pas venue. » Elle m'explique qu'elle a le vertige. Les abords de ce grand complexe hospitalier sont en travaux depuis des années. Pour accéder à la consultation, il faut suivre le chemin indiqué : des escaliers métalliques, une longue passerelle qui surplombe la rue de plusieurs mètres. « J'ai fermé les yeux. Je ne pouvais plus avancer. J'ai arrêté la première personne qui passait. Elle m'a dit : ''Regardez mon dos et suivez-moi.'' Si j'avais su, je ne serais pas venue. » Elle semble encore sous le choc.

A côté de nous, l'autre jeune femme continue de pianoter sur son smartphone. Un couple prend place. Elle est aux petits soins pour son mari : c'est sans doute lui le patient... On m'appelle.

Au retour de la consultation, je dois encore patienter à la salle d'attente, le temps qu'on m'apporte les ordonnances. Maintenant, je suis seule. La porte est ouverte et j'entends toute une conversation téléphonique entre un employé et un médecin au sujet de la dame au pied enflé... Ce n'est pas très discret !

Et si toute notre vie était une salle d'attente ? Chacun et chacune avec ses douleurs, ses préoccupations, ses soucis, ses espoirs aussi ! J'observe les autres, j'entre en relation – ou non -, je ne fais que passer...


Petites histoires du quotidienWhere stories live. Discover now