XV

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« Tout bonheur doit sans doute se payer ; sa conquête, du moins, exige toujours un combat. »

Eve Belisle


Tendresse de septembre, caresse qui sillonne les tempes. Les gouttelettes de brume font du tremplin sur les fils d'une toile d'araignée. Un papillon repose délicatement ses ailes sur une fine feuille de tilleul qui de loin devient son lit. La nature se colore. Tout est dans la nuance, du vert en vert scintillant dans la lumière sur l'épiderme de la terre. Septembre, ballet de douceur automnale, entre-deux flamboyant, entrechat de musique et de poésie en pleine harmonie. Infinitude des beaux ors de septembre, les feuilles des arbres se poudrent de rubis et d'ambre. Isabelle affectionne la teinte miel des belles ampélidées. Le distillat émane des cépages dorés. Le soleil d'automne incendie Vaugirard et ses alentours, flambeau d'étincelles rougis de flammes intenses.

En cette fin d'après-midi, l'âme de la comtesse de Vauboyen se tient au seuil du soir qui s'apprête, elle tressaille déjà, ses membres sont transis. Les bras protecteurs de Louis lui offrent un peu de chaleur. La fin de journée étend sur le couple sa cape de fraîcheur. Ô douces caresses sous un ciel bleu et rose.

Les coteaux qui s'alignent, en belles rangées, s'étalent sur les flancs, sombres lignes espacées. Corps contre corps, entre les lignes de feuilles et les parterres de fleurs, Isabelle reçoit la chaleur de l'être aimé. Le monarque du Soleil tient entre ses mains son visage et grave dans son esprit son image, la serrant très fort contre son cœur, oubliant les interdits pour quelques heures. Des orbes grises plongent dans un regard d'azur profond. Troublé par tant d'émotion, l'homme finit par succomber à la tentation d'aimer sa compagne. Elle sent ses lèvres l'effleurer doucement, se laisse désirer inconsciemment. Leurs haleines rapprochées sous un appel impérieux brûlent d'être désaltérées, implorant la source et le feu de l'amour. Et leurs bouches se scellent en un baiser. Si long qu'il les laisse essoufflés mais radieux.

- Ô mon Isabelle. Vous avez fait vôtre chaque battement de mon cœur le jour où je vous ai vu pour la première fois. Est-ce pour cela que je ne peux résister à vos yeux de lac clair ? Que même dans mon sommeil, je sens votre regard posé sur moi ? Que votre âme s'accroche à la mienne, capturant chacune de mes pensées ? Que je sens votre présence à mes côtés, même quand vous êtes loin ? Que je ne vois dans les heures qui s'égrènent que le temps qui me rapproche de vous ?

- Louis, à peine deux semaines que je suis sur pieds et vous voilà déjà généreux de belles paroles. Pensez-vous que mes sentiments pour vous aient besoin d'être cultivés par de tels compliments ? Ah ! Que vous me connaissez mal.

- Non, mon aimée, je ne crois pas que les mots ou les bagatelles que je puisse vous offrir soient nécessaires pour me conserver votre tendresse. Mais la mienne serait blessée si je négligeais aucune occasion de vous marquer mon attention. Et, quand vous ne me voyez point, ces présents me rappellent à votre souvenir.

La confusion cependant s'est emparée de Madame de Langlois pendant ce temps passé à guérir de la poigne mortelle de la cantarelle. Ou serait-il plus juste de dire la poigne de Madame de Montespan ? Oui, cela est sans nul doute le cas.

Il existe différents types d'amour. Le premier est égoïste, méchant, possessif, narcissique et n'est qu'un faire-valoir pour l'ego. C'est un amour laid et paralysant. L'autre est une libération de tout ce qu'il y a de bon en soi : gentillesse, considération et respect. Il ne s'agit pas seulement du respect social des bonnes manières, sinon du profond respect, la reconnaissance d'une personne en tant qu'être unique et précieux. Le premier type d'amour peut nous rendre malade, petit et faible tandis que le second peut révéler notre force, notre courage, notre bonté et même une sagesse que nous ignorions posséder.

L'Amour du SoleilWhere stories live. Discover now