Chapitre 07 - Dorian ♛: À visage découvert.

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Elle commence à réellement m’énerver avec ses questions à deux cents francs, six sous. En quoi est-ce son problème ? En quoi dois-je être dans l’obligation de lui révéler qui je suis vraiment au plus profond de mes tripes ? Malgré son joli minois, elle me met hors de moi comme jamais quelqu’un n’a osé le faire. Même Tony n’a jamais été à ce stade. Elle, elle me connaît depuis trois jours et elle se permet de monter sur ces grands chevaux. Pourquoi j’apprécie cela ? Je suis complètement masochiste, qu’on me sorte de cet enfer. 

L’univers m’envoie un signe, j’ai l’impression que c’est le moment ou jamais pour lui dire ce qui se trame sous mes petits mensonges que même un enfant ne prendrait pas au sérieux. Que vais-je faire si elle prend ses jambes à son cou ? Qu’elle raconte à tout Glasgow ce qu’elle a vu, dans les tréfonds du Cold Blood Club ?  Ma petite voix me crie pourtant de la faire disparaître de mon quotidien, de lui interdire l'accès même au rez-de-chaussée. De ne plus retourner chez elle, aussi. Mais c’est plus fort que moi, j’ai l’impression d’engueuler un chaton sans défense au milieu des strigoi. Elle me regarde comme un chien battu, ma seule échappatoire est de tout lui dire, quitte à me prendre une rafale de jurons ou une bonne claque dans la gueule, ça ne me tuera pas. 

Sous les yeux attentifs d’Edgar, conscient de ce qu’il va se passer, j’attrape le poignet de Lamia avant de l’emmener avec moi, silencieusement. Au milieu de la foule de vampires, nous contournons le comptoir, tenu par… Personne, en fait. Je réalise que mes clients se servent comme bon leur semble dans le tire-sang loin d'être frais posé à présent juste à notre droite. J’ai un moment de réflexion avant de lâcher la chair que je tenais fermement. C’est la première fois que je la touche, elle a probablement remarqué que j’étais tout aussi froid que du marbre. 

Mon corps s’abaisse pour ainsi ouvrir la trappe que je pose contre une partie du bar avant de commencer à descendre dans mes appartements. Tout en allumant la lumière sur mon passage, j’entends la malade progresser dans les escaliers d’un pas saccadé, presque hésitant. Une fois retournée, je l’observe s’émerveiller devant l’ambiance luxueuse et la clarté de la pièce à vivre. Ses yeux brillent encore plus de curiosité. 

— Pourquoi m’emmènes-tu ici ? me demande-t-elle en quittant la dernière marche, la main toujours sur la rambarde en bois. 

Elle quitte enfin le passage de sortie, mi-réticente, mi-intéressée. Son corps frêle s’avance encore, et je songe une nouvelle fois à laisser tomber et à lui demander de faire demi-tour, mais maintenant c’est un peu tard. 

— Ce sont nos appartements à Edgar et moi. Là, il y a le salon, au bout du vouloir, une autre pièce, lui dis-je en pointant à moitié du doigt un petit passage dans le coin supérieur de la pièce, non loin des escaliers. 

Elle scrute un peu plus son environnement dans un silence bien trop palpable pour que je sois à l’aise, moi qui d’habitude apprécie le silence. Je décide de prendre les devants, peu en confiance. 

— Ne flippe pas, d’accord ? 

Ce n’est peut-être pas la meilleure des solutions…  Plus trop le choix. Elle me détaille, sceptique. Il ne me suffit que d’ouvrir la mâchoire en grand pour la voir effectuer un mouvement de recul et claquer son dos sur la rambarde brunie. La peau de mon artère radiale se perfore dans les secondes suivantes, mais je ne ressens rien, juste le sang qui s’échappe de mon corps. Je tente de lui épargner les bruits ignobles de succions, mais c’est peine perdu. Mon cou se redresse et mon bras se tourne presque inconsciemment vers moi. Sous mes yeux et sous les siens, la plaie guérit et le sang sèche sur ma peau. Les globes de Tara deviennent proéminents, prête à détaler comme un lapin.  

— Toutes les personnes présentes au sous-sol sont comme moi, même Edgar, voilà pourquoi la porte est toujours gardée, pourquoi l’accès est interdit aux ivrognes du rez-de-chaussée. 

Lamia : La Nuit Du Désespoir. {TERMINÉE}Where stories live. Discover now