Chapitre 34 - James

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— James, mince ! Qu'est-ce qui t'est arrivé ?

Les yeux de Selena se sont écarquillés dès l'instant où elle a grimpé sur le siège passager de ma voiture. Si je m'imaginais qu'elle ne remarquerait pas l'éraflure sur ma pommette, c'est raté... Alors, sur un ton léger, je tente de dissiper son inquiétude par de l'humour :

— Quoi, c'est me voir en chemise qui te fait paniquer comme ça ? C'est ton anniversaire, j'espère bien que tu n'en attendais pas moins de ma part !

— Arrête ça, tu sais très bien à quoi je fais référence. Montre-moi.

Elle se penche vers moi, pose le bout de ses doigts sur mon menton pour que je tourne la tête. Elle fronce les sourcils en découvrant l'écorchure, l'examine attentivement. Moi, je me laisse manipuler sans protester : son contact m'électrise. Et c'est bon de ressentir de nouveau. Selena avait raison, bien sûr. Le mauvais jour que j'ai traversé le samedi du concert de Caliban n'était que ça : un mauvais jour. Un moment de creux que je n'ai pas réussi à éviter, mais pas inéluctable. Sans savoir vraiment comment, j'ai réussi à relever la tête, une fois de plus. Le lendemain du récital, je me sentais toujours vidé, mais un peu moins ; de même le surlendemain, et chaque jour qui a suivi.

Ce matin, en me réveillant, j'ai été ravi que l'enthousiasme que j'espérais pouvoir nourrir pour l'anniversaire de Selena était bien là : pas d'épuisement écrasant, pas d'indifférence incontrôlable noyant tout le reste. Je garde malgré tout une boule au ventre, parce que j'ai le sentiment d'être en sursis. Que ces phases sombres sont comme des vagues me ballottant, me submergeant l'une après l'autre sans que je puisse y faire quoi que ce soit ; entre elles, je n'ai droit qu'à de brèves respirations.

Mais puisque je suis en train de profiter de l'une d'entre elles, autant me gorger d'air autant que je le peux...

— Tu ne t'es pas raté, constate ma petite amie, l'attention toujours rivée sur ma pommette. Comment tu t'es fait ça ?

Je hausse les épaules, avant de déclarer :

— Il se pourrait que j'aie aidé un loup à prendre un bain cet après-midi...

— Hein ?

Face à l'air perdu de Selena, j'explicite :

— Tu te souviens de Wolfur, la peluche qui sert de mascotte à l'équipe de football américain ? Avec le reste des Dolphins, on rêvait de la kidnapper pour lui faire découvrir les joies de la natation. Eh bien, maintenant, c'est chose faite.

— Je vois.

Rassurée quant à mon état, ma petite amie s'écarte de moi pour se caler dans son propre siège. Manifestement, elle n'est pas ravie que je me sois embarqué dans une telle confrontation... Mettant le contact, je démarre en m'exclamant :

— Eh, c'était toute une organisation ! Un plan imaginé et mis en application avec une rigueur digne des plus grands généraux d'état-major !

— Ah oui, j'imagine qu'il fallait au moins ça pour mettre la main sur un loup en peluche...

— Bien sûr que oui ! Déjà, on devait réussir à s'en approcher, parce que les joueurs de foot se méfiaient. Apparemment, la rumeur qu'on comptait s'en prendre à leur précieux Wolfur leur était revenue aux oreilles. Ils continuent à s'entraîner sur les installations du campus pendant l'été, eux aussi, et on avait besoin qu'ils soient présents pour passer à l'action pour que leurs locaux soient déverrouillés – mais du coup, ils montaient la garde. C'est Charlotte qui nous a servi de cheval de Troie – tu sais, la meilleure amie d'Arabella.

My Breeze of HopeWhere stories live. Discover now