My Breeze of Hope

Chapitre 15 - Selena

Après ma rupture avec Bastian, j'ai cru que je ne serais plus jamais capable d'ouvrir mon cœur de nouveau. J'ai eu le sentiment que l'amour ne pouvait que décevoir, blesser. Qu'il était vain de placer en lui le moindre espoir.

Et puis les réactions de James à mes origamis, ses lettres, m'ont prouvé qu'il y avait encore un faible espace en moi qui n'avait pas été atteint par la tristesse. Un germe de lumière et de chaleur prêt à fleurir à nouveau avec du temps et de la patience.

Je n'ai même plus ça. Cette cavité dans ma poitrine jusque-là préservée semble d'être emplie de verre pilé. J'ai mal, ça saigne sous mes côtes. De l'extérieur, pourtant, je ne sais si mon trouble est visible : je suis si choquée que je reste seulement là, immobile, mes larmes elles-mêmes prises au dépourvu et incapables de couler.

J'avais baissé ma garde, je ne m'attendais pas à ça. Mais James est là, à quelques mètres de moi, en train d'embrasser passionnément une autre fille.

J'ai conscience qu'il ne m'a rien promis. Que nous n'avons échangé que quelques messages griffonnés sur des bouts de papier ; qu'au fond, il ne me doit rien. Mais je m'imaginais... que ses mots signifiaient plus à ses yeux. Autant qu'aux miens. Que lorsqu'il me disait que je lui étais précieuse, c'est parce qu'il commençait à éprouver des sentiments pour moi. Qu'était-ce, alors ? Juste de la gratitude ? Ou peut-être que je l'ai mal jugé, que les apparences étaient trompeuses. J'ai cru le connaître, mais au fond, que sais-je de lui ? Peut-être qu'il est du genre à papillonner d'une fille à l'autre sans remord. La seule vérité, c'est celle que j'ai sous les yeux : il m'a demandé de venir à sa compétition de natation, m'a dit que cela compterait énormément pour lui... Et à présent, c'est entre d'autres bras que les miens qu'il se trouve. D'autres lèvres qu'il goûte.

J'observe la fille qu'il serre contre lui avec envie. En elle, je vois tout ce que je n'ai jamais réussi à être. Elle paraît si assurée, si pleine d'un désir brûlant... Moi, si je m'étais trouvée face à James, j'ignore si j'aurais réussi ne serait-ce qu'à lui parler, muselée par l'émotion. Elle, elle sait ce qu'elle veut, et elle ne le cache pas, elle n'hésite pas à aller le chercher. Elle n'a pas eu besoin de passer des semaines à s'approcher de lui pas après pas, origami après origami. Elle s'est juste jetée dans le vide. Et cela a fonctionné : c'est elle qu'il embrasse. Bien sûr qu'il n'allait pas perdre de temps à m'attendre...

D'autres scénarios catastrophe me torturent l'esprit. Je n'y aurais pas accordé le moindre crédit il y a encore dix minutes, mais maintenant, je suis perdue. Est-ce que James flirtait déjà avec elle alors que je lui ouvrais mon cœur dans mes lettres ? Est-ce qu'il s'est dit que cela ne lui coûtait rien de jouer sur les deux tableaux ? Est-ce qu'en réalité, il se moquait de la naïveté de mes écrits auprès d'elle, ou même de ses amis ? Je voudrais affirmer que non, mais sa main qui se perd dans les cheveux de l'autre fille comme s'il venait d'y retrouver un trésor perdu balaye mes certitudes.

Un hoquet me soulève. J'ai envie de vomir. J'ai besoin de m'appuyer au mur derrière moi pour ne pas tomber ; m'étant décalée, je n'aperçois plus James à travers le hublot de la porte des vestiaires. C'est sûrement pour le mieux : mon cœur n'a pas besoin d'être brisé davantage.

Et dire que j'avais réuni assez de courage pour me dévoiler à lui... J'étais en train de le chercher quand je suis tombée sur cette vision qui m'a déchirée de l'intérieur. L'ambiance du meeting de natation me portait. J'ai pu me gorger de la présence de James, là où je ne le croise d'habitude que bien trop brièvement. Lorsque son regard a balayé le public juste après chacune de ses courses, j'ai cru que c'est moi qu'il cherchait...

Simple coïncidence, sans doute. Je n'aurais pas dû me donner tant d'importance.

Sur le coup, j'ai été électrisée, pourtant. L'après-midi avançant, mon attirance pour lui n'a fait que grandir, jusqu'à en devenir douloureuse. Je n'avais plus peur : j'étais tellement certaine que si je le rejoignais, il continuerait à être celui dont je rêvais... Mes désirs m'ont aveuglée, une fois de plus.