Chap.26 : 32, Chemin de l'Estérel

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Le lendemain matin, Lala déboula dans ma chambre alors que le soleil commençait à peine à filtrer derrière les persiennes.

- Rise and shine, sweetie ! L'avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt !

Elle ouvrit les rideaux, la fenêtre et les volets en grand, me laissant juste le temps de réaliser qu'elle était en train de ruiner la grasse matinée que je savourais jusque-là avec délice.

- Non mais ça va pas ! Je dormais, là !

Je me recroquevillai sous mes draps, agressée par la voix de stentor de Lala et par la lumière blanche qui inondait désormais ma chambre. Sans délicatesse, Lala se jeta sur le matelas et vint me chatouiller le ventre. Au bout de quelques secondes de ce traitement, je succombai et partis d'un grand éclat de rire.

- Mais qu'est-ce qu'il y a, à la fin ? 

Je me redressai sur le lit, et calée contre mes oreillers, je regardai Lala d'un air faussement sévère.

- Eh bien figure-toi qu'hier soir en allant me coucher, j'ai croisé ton fameux Rico...

- Attends, attends, ce n'est pas "mon" Rico !

- Peu importe ! Bref, je le croise, on discute et il me dit qu'il t'emmène aujourd'hui chez le docteur Machin Chose et me demande si je veux venir avec vous ! Apparemment, vous deviez partir aujourd'hui à 10 h et ma belle, il est 9h30, là...Alors si tu veux t'arranger un peu, te maquiller, quoi, va falloir se grouiller !

Jonathan ! J'avais failli oublier le rendez-vous le plus important de ces vacances improvisées !

Je me préparai en un temps record : un quart d'heure au total pour prendre une douche, bien fraîche cette fois-ci car les températures étaient revenues aux normales de saison (un souffle brûlant qui s'infiltre sous les vêtements d'été, laissant la peau poisseuse de sueur). Mais aussi pour me faire un rapide bun sur le sommet du crâne et me maquiller un minimum.

Quatorze minutes et cinquante-neuf secondes après que Lala soit sortie de ma chambre, je déboulais l'escalier de bois pour arriver, essouflée, dans le vestibule où m'attendaient Rico, s'inspectant les ongles dans un coin, et Lala ne tenant plus sur place, volubile et déchaînée. Elle avait commencé à raconter sa rupture avec Vincent à Rico, qui, visiblement, n'en n'avait vraiment rien à faire et hochait de temps en temps la tête en mimant un vague intérêt.

Je saluai cet idiot Rico, qui me balaya du regard comme il l'avait fait avec Lala quelques secondes auparavant : comme s'il m'avait dénié le statut de fille digne d'attention. Autant dire que le don qu'il avait de m'énerver atteignit son paroxysme ou presque, ce jour-là. Nous sommes sortis de la maison en fermant délicatement la porte d'entrée derrière nous, car nous ne voulions pas réveiller Gisèle, qui dormait au rez-de-chaussée et profitait de l'été pour faire de grasses matinées.

Nous avons remonté la rue jusqu'au tacot de Rico. C'était une Clio bleue marine sans âge, dont il ne prenait visiblement pas grand soin. Il se mit au volant en attendant que Lala finisse d'envoyer un texto et que je fasse un peu de place pour m'asseoir sur la banquette arrière, jonchée de détritus en tous genres,  dont la plupart venaient du Mac Do.

- On y va ? fit Lala en s'asseyant bruyamment sur le siège passager avant.

Rico démarra et, me jetant un coup d'oeil dans le rétroviseur, me demanda l'adresse. Je sortis mon téléphone de mon sac en paille, où j'avais fourré mon bikini et un drap de plage et lu à voix haute  :

- 32 chemin de l'Esterel. Il faut prendre à gauche du portail vert et sonner, on viendra nous ouvrir.

- Mmmm...répondit Rico.

Ce genre de grognement de sa part ne m'étonna pas, il m'avait déjà fait le coup. Il était le manque d'enthousiasme incarné. Mais à cet instant, je ne m'en souciais pas : j'avais simplement hâte de revoir enfin les yeux clairs de Jonathan Rivière.

J.F cherche bonheur, désespérémentWhere stories live. Discover now