Chap. 17 : Lettre à Elise

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Le surfeur raté m'embrassa un peu maladroitement sur les deux joues avant de me conduire dans ma chambre. Quittant la terrasse, nous sommes repassés par le salon, avant de nous engouffrer dans le couloir et de monter l'escalier en bois patiné qui faisait face à l'entrée. Rico me précéda, me donnant une vue imprenable sur son board short et, comme il était vraiment trop large pour lui, sur la raie de ses fesses.  Au bout de cinq marches,  mon supplice visuel pris fin puisqu'il s'arrêta brutalement, se retourna et me dit :

- Alors t'es la petite fille de Gisèle, c'est ça ?

- Euh oui...

Il repris sa lente montée vers l'étage et, six marches plus tard, fit volte-face.

- Je ne t'avais jamais vue ici, c'est la première fois que tu viens la voir ou quoi ?

- Euh, non, je suis venue il y a quelques années et euh...eh bien, je ne sais pas si tu vivais déjà ici...euh, tu vis bien ici ?

- Un peu que je vis ici ! Ah ah ah, elle demande si je vis ici !

Il partit d'un grand éclat de rire avant de reprendre son ascension. Je plongeai dans un abîme de perplexité. Je me ressaisis cependant avant de le rejoindre sur le palier. Il m'attendait, accoudé sur la balustrade, mimant l'impatience en levant les yeux au ciel. L'escalier était particulièrement raide et j'avais le souffle court, je n'aurais jamais pu monter aussi vite que lui.

Il me conduisit jusqu'à la porte de ma chambre et, avant que je puisse lui demander qui il était, il redescendit en trombe au rez-de-chaussée.

Je poussai la porte de bois blanc et découvris ma chambre, quasiment telle que je l'avais laissée la dernière fois.  Située juste au-dessus du salon, la pièce bénéficiait de la même exposition et surtout de la même vue. Mais de cette hauteur, on aurait pu croire être dans la cabine d'un paquebot en route pour la Corse. Seuls les murs avaient réellement pris un coup de jeune et affichaient maintenant une couleur taupe, sobre et élégante, remplaçant le vieux papier peint à fleurs rose que j'avais connu. Sur le lit, recouvert d'un édredon mauve pâle, était soigneusement posée une pile de magazines féminins. Ma grand-mère s'était souvenue que je les aimais. Cela me fit sourire.

J'ouvris ma valise sur le lit et y piochai le bikini deux-pièces que j'avais emporté. Je me déshabillai rapidement, après avoir tiré les voilages de la fenêtre et l'enfilai devant le miroir du dressing qui prenait un pan entier de la pièce. Ca aussi, c'était nouveau. 

J'avais beaucoup changé depuis mon burn-out : le séjour à l'hôpital m'avait fait perdre une dizaine de kilos et si j'étais un peu ronde avant cet épisode, je faisais maintenant partie de la catégorie des filles minces, voire maigres. Mes hanches, qu'on aurait auparavant pu qualifier pour être gentil de "voluptueuses",  étaient maintenant aussi décharnées que celle d'une ado. Mon ventre, autrefois un peu bombé, était complètement plat et je nageais dans mes soutiens-gorges. 

Même si j'avais toujours rêvé d'être filiforme, comme la plupart des filles, je ne me reconnaissais plus dans le miroir. Ce n'était pas moi cette fille svelte, à la silhouette gracile, un peu fragile. D'ailleurs mes fringues étaient devenues trop larges pour moi. Mes pantalons slims s'étaient transformés en baggy et mes tee-shirt moulants semblaient tailler en XXL. Seuls mes longs cheveux blonds et lisses me rappellaient la fille que j'étais avant. 

Je flottai un peu dans mon bikini, mais je me plaisais bien, finalement. J'enroulai une serviette de toilette autour de moi et, tongs aux pieds, je descendis l'escalier. Au bout de quelques secondes, je me figeai sur place et tendis l'oreille. Quelqu'un jouait La Lettre à Elise au piano, et merveilleusement bien. 

J.F cherche bonheur, désespérémentNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ