Notre périple commençait dans la petite ville de Slane, située à une heure et des broutilles de Dublin, dans le comté de Meath. Là, Siobhan et moi avions rendez-vous avec le conservateur pour la visite d'une bâtisse de renom, prisée et quasiment complète toute l'année.
Arrivées à un croisement sans panneau, le GPS nous somma de tourner à droite, puis de continuer tout droit sur un chemin bordé de forêt. Quelques minutes de suspens plus tard, elle apparut comme par magie. The Millhouse. Siobhan se gara dans la cour devant la maison et, descendant de la voiture, me gratifia d'un sourire de triomphe.
- Je sais que ce n'est pas l'Empire State Building mais quand même, ne me dit pas que tu n'es pas un tant soit peu impressionnée !
- Tu veux rire ? Je suis totalement sous le charme !
Je m'attendais à une sorte d'hôtel, froid et impersonnel, avec un parc mais au lieu de ça, je trouvais une maison sur deux étages, bordée de fleurs sauvages et de roses blanches. La pelouse, verdoyante, faisait magnifiquement ressortir le gris galet de la pierre et donnait à l'ensemble un air de peinture rupestre anglaise. J'étais conquise. Siobhan me regardait en rigolant, s'émerveillant de mon coté « américaine qui découvre l'Irlande». Je lui tirais la langue et me replongeais dans la contemplation de ce paysage à couper le souffle.
Un homme d'un certain âge sortit pour venir à notre rencontre.
- Mesdames, soyez les bienvenues dans notre joli comté. Je me nomme Brenden O'Reilly et je serai votre guide pour cette visite.
- Enchantée, M.O'Reilly. Je m'appelle Siobhan Cavanaugh et voici mon amie, Roxanne Mullighan. Nous sommes mandatées par Liam Donovan et Jamie O'Callaghan pour Devil's Event.
Je fus surprise d'entendre le nom de famille de Siobhan. Après mûre réflexion, j'en arrivais à la terrible conclusion que je savais peu de choses sur elle. Fait inexcusable selon moi et auquel je devrais rapidement remédier. Tirée de ma rêverie par le grincement de la vieille porte d'entrée, je suivis Siobhan et M.O'Reilly dans l'entre de Millhouse.
De son nom complet The Millhouse and the Old Mill, cette imposante bâtisse de style géorgien fut construite au XVIIIème siècle. A la base, il s'agissait d'un moulin à maïs, comprenant à l'étage supérieur un grenier, où étaient entreposées toute sorte de récoltes afin de les faire sécher.
Au fil des années, The Millhouse avait subi d'importants changements. Elle avait notamment été recyclée en fabrique de textiles, qui transformait le coton brut en linge de maison de qualité pour populations très fortunées.
En 2006, après une rénovation et un petit coup de jeune, The Millhouse était devenue un hôtel spécialisé dans l'accueil de mariages de qualité. Réputé pour son cadre idyllique en pleine campagne, elle disposait d'un verger magnifique au bord de la rivière Boyne.
M.O'Reilly nous conduisit dans la salle de réception. C'est là que se trouvait tout l'intérêt de notre visite. Cette pièce, aux murs en pierre de taille, ne semblait pas particulièrement spacieuse mais disposait d'un plafond haut bardé de poutres apparentes en bois, d'un vieux comptoir d'époque et d'un gigantesque lustre en cristal qui éblouissait la pièce. Tous ces détails rendaient la pièce charmante et tout à fait apte à recevoir un mariage comme celui de Pierce et Emily. Sortant de la maison pour nous rendre dans le verger, notre périple fut interrompu par la sonnerie de mon téléphone.
- Je suis désolée Siobhan, je dois répondre.
Je fis quelques pas pour plus de tranquilité et décrochait.
- Allo Maman ?
- Bon anniversaire ma chérie !
- Merci, c'est adorable d'avoir pensé à moi.
- Ma chérie, tu pourrais être à l'autre bout du monde, nous ne raterions jamais une occasion de te souhaiter ton anniversaire.
Une larme roula sur ma joue. Après les émotions de ces derniers jours, j'avais cruellement besoin de réconfort. Et entendre mes parents à l'autre bout du fil me rappelait que je ne pouvais plus sauter dans un taxi, débarquer chez eux et me faire dorloter quand tout allait de travers.
- Vous êtes vraiment les meilleurs. Mais je vais devoir vous laisser, nous sommes en pleine visite avec ma collègue Siobhan.
- En pleine visite ?
- Oui nous devons comparer des lieux de réception pour un mariage au mois de Mai. Et crois moi sur parole, c'est du travail d'organiser tout ça. En plus, c'est une union traditionnelle irlandaise donc autant te dire que parfois j'ai du mal. Heureusement, une bonne partie de l'équipe est là pour me guider.
- C'est vraiment très gentil de leur part. Et je suis sure que tu vas les épater. Aller, ma chérie, je te rappelle plus tard. Bisous de nous tous !
Je raccrochais, le vague à l'âme, et pris quelques minutes pour souffler et faire à nouveau bonne figure. Je trouvais Siobhan toute seule, près de la rivière, appuyée contre une pelle plantée dans le sol.
- M.O'Reilly est parti?
- Oui. Il a fait une attaque, je viens de camoufler son corps quelque part dans le verger.
En voyant ma tête totalement dépitée, Siobhan partit dans un fou rire frénétique. En réalité, M.O'Reilly, parti accueillir des clients, avait laissé Siobhan toute seule pour la visite du cadre extérieur.
- Tu as reçu un coup de téléphone de ta famille ?
- Oui mes parents essaient d'appeler une fois par semaine.
- Et ça va ? Tu tiens le coup ?
- Il y a des jours avec et il y a, comme aujourd'hui, des jours sans.
- Je sais exactement ce qu'il te faut. Finissons les photos pour notre exposé de ce soir et toi et moi, Roxanne Mullighan, nous allons partir à la conquête de l'Irlande.
J'attrapais l'appareil photo dans mon sac, pris quelques clichés du verger bordant la rivière, de la bâtisse dans sa globalité , de la salle baignée de la lumière du jour. Et après avoir salué M.O'Reilly, nous primes la route, direction l'Irlande sauvage.
Siobhan m'emmena d'abord déjeuner dans un petit pub d'une ville voisine. D'après elle, il se faisait là bas les meilleurs fish and chips de toute la côte Est de l'Irlande. Assise l'une en face de l'autre, une pinte de Magners à la main, nous fîmes un rapide débriefing de notre visite.
Rapidement, nous arrivions à la conclusion que le cadre était parfait mais la salle beaucoup trop petite. Je décidais de changer de sujet, pour m'intéresser un peu à ma nouvelle amie.
- J'ai eu honte tout à l'heure quand tu t'es présentée. Je me suis rendue compte que je ne connaissais même pas ton nom de famille. Je fais vraiment une amie pitoyable.
Siobhan fronça les sourcils et, tout en me fixant, bût bruyamment une gorgée de cidre. Elle reposa sa pinte sans me quitter du regard. Je me sentais vraiment mal à l'aise, me demandant ce que Siobhan pouvait penser à cet instant précis. Puis son visage se radoucit et elle me gratifia d'un sourire rayonnant.
- Tu flippes vraiment pour tout, Roxy. C'est tout à fait normal de ne pas encore bien se connaître. Et puis, si j'avais eu la plastique de Jamie, je pense que tu te souviendrais de tout ce qui me concerne haha !
- Mais ne dis pas ça, je ne sais pas tout de Jamie !
- Ah ça c'est sur, tu es loin du compte sur M.O'Callaghan.
- Je n'en doute pas... Par contre, je veux tout savoir de toi !
- Hum par où commencer ? Je suis née en Irlande, il y a 29 ans, au mois de Mai plus précisément. J'ai grandi ici, dans le comté de Meath, dans une petite ville qui s'appelle Duleek. J'ai deux sœur : une plus âgée de quatre ans, Ella et une cadette de cinq ans, Ciara. Mes parents sont mariés depuis plus de trente ans et rien ne semble altérer leur amour. Je pense que mon coté romantique doublé du syndrome du cœur d'artichaut vient en parti de là. Et je pratique la danse irlandaise depuis l'âge de trois ans.
- Sérieusement ? Je serai curieuse de voir ça !
- Quand tu veux, Roxy ! Peut-être ce soir si tu es sage !
Je lui fis mon plus beau visage angélique, ce qui la fit rire une nouvelle fois.
- As-tu d'autres passions en dehors de la danse ?
Siobhan réfléchit un moment.
- Je pense que j'aime l'écriture autant que la danse. D'ailleurs, je travaille actuellement sur un roman , une chronique fantastique inspirée de la mythologie grecque. Mes parents ne comprennent pas pourquoi, en étant irlandaise, j'ai choisi d'écrire sur le roi Midas. Mais pour ne pas renier complètement mes origines, mon héros s'appelle Angus, prénom profondément et indubitablement à consonance celtique.
- Siobhan, je suis impressionnée ! Tu as d'autres talents ?
- Je parle gaélique couramment, comme 80% des irlandais.
Je restais un moment interdite. Siobhan, avec son humour corrosif et sa timidité maladive, était en fait une super-héroïne à l'irlandaise, capable de danser, parler une langue qui me paraissait impraticable et écrire des romans tout en donnant du temps à Devil's Event.
- Comment as-tu été amenée à travailler pour Liam et Jamie ?
- C'est une longue histoire. Comme je te l'ai dit un peu plus tôt, Jamie, son frère Owen et moi nous connaissons depuis que nous sommes enfants. J'allais à l'école avec Owen car nous avons le même âge. Et Jamie est un peu le frère que je n'ai pas. Il a toujours été prévenant, nous défendant contre les autres gamins. Quand Owen a mal tourné, Jamie venait d'entrer à l'université. Malgré les cours, il faisait la navette depuis Dublin dès que son planning le permettait. Liam suivait les mêmes cours que lui. Ils sont devenus amis et Liam couvrait Jamie quand il le fallait.
- Owen a eu des problèmes ?
- En grandissant, il n'a pas géré l'absence de ses parents comme son frère ainé. Quand Jamie est parti faire ses études, Owen a commencé à faire les quatre cent coups, à se bagarrer et un jour, il a vraiment failli rester sur le carreau. Jamie est venu ce jour là, accompagné de Liam. Et c'est lui qui en a remis une couche, expliquant à Owen que son frère faisait des études pour qu'il ait une vie meilleure. C'était une sale période mais ils ont réussi à s'en sortir. J'ai fini par aller à l'université moi aussi et j'ai menée mes études jusqu'au bout. A ma sortie de fac, Jamie m'a offert du travail et j'ai tout de suite accepté.
- Et Owen ?
- Il a trouvé deux exutoires plus productifs : la boxe et le dessin. Aujourd'hui, il dirige un salon de tatouage du côté de Cork. Et il reste loin de toutes formes d'embrouilles, dieu merci !
J'étais scotchée. Jamie et son frère ou le paradoxe à l'état brut. Le jour et la nuit. Il serait intéressant de rencontrer Owen, histoire de. Plus nous avancions dans la conversation, plus je découvrais Siobhan. Cette fille était vraiment fantastique, simple, loin des princesses make-up que je fréquentais chez Parker & Hamilton. Il restait un sujet que je n'avais pas abordé avec mon ami et pourtant, la question me brûlait les lèvres. Aussi décidais-je de me lancer sur le terrain glissant de tourbe des relations amoureuses de Siobhan Cavanaugh.
- Et à tout hasard, tu as quelqu'un dans ta vie ?
- Non, je suis célibataire.
- Un type d'hommes peut-être ?
- Laisse moi réfléchir... Blond ou châtain, les yeux clairs, plutôt grand car je suis loin d'être une naine, musclé, avec une barbe taillée de près. Quelqu'un de gentil, de posé, un homme bien quoi !
- C'est marrant, on dirait le portrait craché de Liam.
Siobhan, sous le coup de l'émotion, bût une gorgée de travers et faillit littéralement s'étouffer. Quand elle retrouva ses esprits, elle leva les yeux vers moi et sa tête me fit exploser de rire. Les joues de Siobhan, rouges pivoine, s'étaient parées d'un masque de chaque coté du nez.
- Roxy, arrête de rigoler, personne ne sait que j'ai un crush pour Liam. A part peut-être Jamie mais il n'a jamais abordé le sujet avec moi.
- Et ce béguin date de quand ?
Nouvelle vague de chaleur sur le visage de Siobhan.
- Tu ne te moqueras pas si je te l'avoue ?
- Bien sur que non ! Promis juré.
- J'ai ce béguin pour Liam... depuis toujours.
Sa voix, si forte quelques minutes à peine, s'était muée en un petit chuchotement plein de douceur.
- Pourquoi tu ne lui as jamais dit ?
- Il était avec quelqu'un à l'université, une fille dont il semblait fou amoureux. Après l'obtention de leur diplôme, ils ont décidé de se fiancer. Mais malheureusement pour Liam, la fiancée en question n'en avait pas après lui mais après sa situation. La famille Donovan est très influente à Dublin et alentour. Quand Liam l'a découvert, il a eu le cœur brisé et depuis, il lui est très difficile de s'ouvrir et envisager une relation avec quelqu'un. Il a eu une histoire de quelques mois avec Sofia et du jour où elle est entrée chez Devil's Event, ça a été terminé.
- C'est vraiment terrible. On peut dire que ni Jamie, ni Liam n'a de chance de ce côté-là. Ne t'inquiète pas, ton secret sera bien gardé.
Mais intérieurement, je pensais déjà à une façon de les coller dans les bras l'un de l'autre. L'opération Roxanne – Entremetteuse venait de voir le jour.
Dix minutes plus tard, Siobhan réglait la note, probablement pour acheter mon silence , et décida de me faire découvrir quelques lieux célèbres faisant la renommée de l'Île d'Emeraude.
Elle me concocta un itinéraire sur mesure. Mon aventure irlandaise commença avec la visite de Mellifont Abbey. Première abbaye cistercienne fondée en Irlande en 1142 par St Malachie, archevêque d'Armagh, elle veillait sur l'essor de l'ordre cistercien. Mellifont était devenue, après de nombreuses années de construction, une référence en matière d'architecture, véritable modèle sur lequel furent érigés les autres monastères et abbayes. Aujourd'hui en ruines, elle fait le bonheur de nombreux touristes, de part le nombres de ses vestiges encore intacts et conservés. J'étais totalement subjuguée par cet endroit, qui selon moi aurait dû être un lieu de désolation laissé à l'abandon. Mais la beauté du paysage alentour donnait quelque chose de noble aux colonnes romanes et autres arches restées debout.
Ma découverte de l'Irlande se poursuivit avec un lieu mythique : Newgrange. Connu sous le nom gaélique de Brù na Boinne ou « palais de Boyne » , cette vallée était, selon les dires de Siobhan, le berceau de la civilisation irlandaise.
- Tu vois Roxy, ce gros tertre en haut en la colline, il s'agit d'une des plus anciennes tombes du continent européen. De nombreuses légendes entourent Newgrange. Pour certains, il s'agirait de la dernière demeure des rois d'Irlande. Pour d'autres, les anciens dieux celtes se manifesteraient dans les couloirs du tertre au lever et au coucher du soleil, s'incarnant dans ses rayons et frappant les murs, pour laisser apparaître des symboles en spirale dont personne n'a à ce jour percer les mystères.
- Ah oui ? Ca c'est intéressant ! Il nous faudrait un lieu comme celui là pour le mariage de Pierce et Emily.
- Ici, tu ne pourras jamais. La vallée de La Boyne est classé site historique de Mellifont à la plaine de Tara. Et qui plus est, avec les nombreux pilleurs qu'il y a eu ces dernières années sur les différents sites, les conservateurs sont frileux à l'idée de faire entrer du public en dehors des visites. Alors pour un mariage, n'en parlons même pas !
- Je me doute bien. Mais je vois vraiment une étendue verdoyante, sauvage, sans limite de maison ou de jardin, pour la célébration.
- Nous finirons par trouver. Mais pour l'heure, j'ai un dernier endroit à te montrer avant de rentrer faire le point.
A quelques minutes à peine de Newgrange se trouvait Hill of Tara. Cette plaine s'étendant à perte de vue, était à ce jour le plus ancien site témoignant des pouvoirs politiques et spirituels de l'Irlande celtique. Pour y régner, 142 hommes, appelés puis choisis pour être Haut Roi, s'étaient succédés. Parmi les monuments les plus importants, quelques uns étaient à retenir. Le Rath Na Riogh, appelé aussi « le fort des rois », était un enclos fortifié abritant le Mont des Otages, dont le couloir était aligné pour capter les lumières du soleil et de la lune lors d'importantes célébrations de l'ancienne religion. Mais la légende la plus mystique tournait autour de la Lia Fâil, « la pierre du Destin ». Selon les dires, cette pierre avait le pouvoir de trouver le prochain Haut Roi. Les hommes défilaient devant elle et cette dernière commençait à chanter quand s'approcher le futur roi d'Irlande.
- Imagine, m'avait dit Siobhan, de grandes tablées de centaines d'hommes, festoyant, rigolant. Une pierre qui chante pour annoncer le prochain roi. Et des processions de druides réunis pour honorer les dieux en fonction des cycles solaires et lunaires. C'est ça, Roxy, l'Irlande. Une terre peuplée de légendes de toute sorte, des monuments en ruines portant encore les traces de batailles épiques et tout un peuple fier de transmettre tout ce patrimoine à qui veut bien adopter l'Eire, comme on l'appelle chez nous.
J'étais émue par tout ce que je venais d'apprendre et surtout par le fait que Siobhan veuille le partager avec moi. A cet instant précis, je ne me sentais plus ni Américaine, ni New-Yorkaise. Je me sentais totalement Irlandaise, Celte et aussi étonnant que cela puisse paraître, je me sentais à ma place. Sur le chemin du retour, je remerciais encore mille fois Siobhan de la journée mémorable que nous avions passé ensemble.
Nous étions les dernières à arriver à l'hôtel. Liam nous attendait devant le cottage fleuri et en le voyant, je ne pus m'empêcher de penser aux révélations de Siobhan au pub. J'allais essayer de faire mon possible pour rendre mon amie heureuse, parole de Roxy !
- Alors Mesdames, comment s'est passé votre journée ?
- Roxanne ici présente est tombée en extase pour l'Irlande. J'ai réussi ma mission, chef !
J'acquiesçais d'un sourire complice. Liam nous expliqua où se trouvaient nos chambres, puis nous donna rendez-vous dans la salle de réception de l'hôtel.
Je montais mes affaires, me douchais et me remaquillais légèrement, troquais mon legging crasseux et mes Docs contre une petite robe noir et des ballerines, beaucoup plus confortable. Puis je descendais dans la salle, que je trouvais plongée dans l'obscurité. Je devais certainement être la première. J'ouvris la porte et la lumière apparut d'un coup.
- SURPRISE !! Bon anniversaire Roxy !
Toute l'équipe de Devil's Event se trouvait là. La salle avait été décorée de ballons et sur la table, un buffet et des boissons avait été préparés. Emue par cette attention, j'étais incapable d'articuler quoi que ce soit. Siobhan s'avança vers moi et me prit dans ses bras.
- Là breithe shona duit, Roxanne. Un joyeux anniversaire en gaélique pour une nouvelle irlandaise.
- Merci, Siobhan. Du fond du cœur, ça me touche beaucoup. Tu m'as occupé toute la journée, n'est ce pas ?
- J'ai entendu une partie de ta conversation avec tes parents et j'avais vraiment envie que tu te sentes chez toi pour ton anniversaire. Aussi ai-je peut-être envoyé en douce un message à Liam et Jamie, je ne me rappelle plus très bien. Quoi qu'il en soit, c'est ta soirée, Miss Mullighan.
Liam s'approcha à son tour pour me prendre dans ses bras e me souhaiter un bon anniversaire, puis ce fut le tour de Nate. Sofia me gratifia d'un signe de main poli mais totalement hypocrite. Et Jamie , qui venait en dernier, me fit une bise discrète sur la joue. A cet instant précis, mes joues et mon rouge à lèvres, toutes deux cramoisies, avaient littéralement fusionnée.
- Merci à tous, vous êtes vraiment merveilleux. J'ai beaucoup de chance de travailler avec vous. Grâce à Siobhan, je me suis sentie bien pour la première fois depuis des semaines. Mais l'heure n'est pas aux longs monologues, trinquons !
Nate mit de la musique traditionnelle et tous ensemble, nous primes place autour de la table. Quelques pintes de cidre plus tard, Siobhan me fit un cadeau inestimable. Elle se leva et je la vis se mettre en position. Jamie, Nate et Liam l'encouragèrent en tapant des mains. Et soudain, elle se mit à danser. Légère et gracile, elle semblait virevolter au dessus du sol, ses jambes et ses pieds possédés par la musique. Je la trouvais sublime et quand la musique s'arrêta, je me précipitais pour la prendre à mon tour dans mes bras et lui dire à quel point sa danse m'avait subjugué.
- Oh ce n'est rien Roxy, je te l'ai dit, j'adore danser.
- En tout cas, quelqu'un à côté de moi t'a dévoré des yeux durant toute ta prestation.
D'un signe de tête, je lui désignais Liam. Siobhan rougit jusqu'aux oreilles. Et son trouble s'accentua quand M. Donovan vint à sa rencontre pour la saluer et la féliciter de cette danse endiablée. Je décidais de les laisser seuls, prétextant un besoin urgent de prendre un bol d'air frais pour me remettre de mes émotions.
Dehors, la fraicheur de la nuit se faisait sentir et je regrettais de ne pas avoir pris mon gilet. Perdue dans mes pensées, j'entendis vaguement la porte s'ouvrir.
- Je veux bien croire que les Américaines ne craignent pas le froid, mais si tu ne te couvres pas, tu vas attraper la grippe.
Je me tournais pour faire face à Jamie, prête à lui faire ravaler sa remarque quand ce dernier déposa sa veste sur mes épaules. Molly avait raison, je ne savais plus sur quel pied danser avec lui et je devais avoir une réponse, même si cela devait me gâcher mon anniversaire.
- Jamie, tu vas jouer encore longtemps comme ça avec moi ? Qu'est ce que je représente pour toi ? Une distraction ? Une jeune américaine que tu penses docile et qu'il t'amuse de troubler dès que tu t'ennuies un peu ?
Pour toute réponse, Jamie réduisit la distance entre nous . Il saisit la ceinture de ma robe, me fit venir jusqu'à lui et m'enlaça tendrement. Le Jamie qui me tenait à présent contre lui n'avait rien à voir avec l'homme arrogant du début. Siobhan avait peut-être raison, je ne connaissais rien du vrai Jamie O'Callaghan.
- Roxy, tu es loin d'être une vulgaire distraction à mes yeux. Mais au jour d'aujourd'hui, je suis obligé d'agir de la sorte avec toi pour te protéger. Quand je le pourrais, je t'expliquerai tout.
- Ca concerne Sofia n'est ce pas ?
Jamie se contenta d'acquiescer d'un hochement de tête. Je m'en doutais. Cette vipère manigançait quelques chose, il ne tenait qu'à moi de découvrir quoi. Jamie et moi restâmes un moment là, son visage dans mes cheveux, ma tête appuyée contre son torse. Puis, je me séparais de lui à contrecœur.
- Nous devrions rentrer avant que les autres ne lancent un avis de recherche.
Jamie eut un petit rire grave qui me fit chavirer. A mon tour j'éclatais de rire. C'est le moment qu'il choisit pour saisir mon visage entre ses mains et déposer sur mes lèvres un baiser chaste mais brûlant.
- Encore un très bon anniversaire, Miss America !
Comment avais-je pu être aussi stupide de croire que c'était un véritable connard. Demain, je devrais en débriefer avec Siobhan et mettre une stratégie en place pour découvrir ce que Miss Peau de Lapin préparait comme sale coup.