6 mars 2024 - Djeddah - Arabie saoudite.
Je déglutis avec difficulté. J'ai du mal à réaliser ce qu'il est en train de se passer devant moi. Anthony Hamilton se tient entre Toto et Lewis, son regard me scanne de haut en bas, s'arrêtant sur mon tour de cou aux couleurs de McLaren. Mon rythme cardiaque s'accélère considérablement quand Lewis ouvre la bouche.
Que voulait-il dire en me disant désolé ? Désolé de quoi ?
Mais surtout que va-t-il dire à son père ? « Je te présente Amélia, mon ancienne petite amie qui est en train de me redonner une chance parce que tout allait bien entre nous jusqu'au moment où elle est tombée enceinte et que j'ai quitté lâchement parce que j'arrivais pas à mettre des mots sur ce que je ressentais à ce moment là » ? Ou encore « Je te présente Amélia, la femme qui a hurlé mon prénom pendant que je la faisais jouir avec mes doigts hier soir, parce que je ne veux pas recoucher avec elle tant qu'on aura pas appris à se connaitre plus amplement » ? Comment Lewis va me présenter à son père ?
Je fais les gros yeux à Toto, pourquoi il me fait ça ? Et surtout pourquoi il met Lewis dans l'embarras avec son père ? Il sait très bien la situation entre son pilote numéro 1 et moi.
Je me reconnecte à la réalité quand j'entends Lewis prononcer mon prénom.
- Amélia, je te présente mon père, Anthony Hamilton, mon plus grand supporter et ma plus grande source d'inspiration.
Je souris à Lewis et à son père. George, Toto et Susie assistent à la scène en tentant de ne pas sourire de trop.
- Enchantée de faire votre connaissance monsieur Hamilton. Déclarai-je en tendant ma main pour le saluer.
- Et Papa, tu l'auras compris, Amélia travaille pour McLaren, mais depuis quelques mois, Toto essaye de la débaucher pour qu'elle vienne travailler pour nous ! D'ailleurs, je crois bien que Lando te cherche ! Rigole Lewis en m'indiquant le jeune pilote un peu plus loin dans le paddock.
- Je serai bien restée avec vous pour discuter, mais mon devoir m'appelle ! Bonne journée à vous !
La main du père de Lewis se desserre autour de la mienne, je leur adresse un dernier sourire et je détale à toute vitesse. Sans me retourner, je marche tête baissée jusqu'à Lando. Je crochète son bras au mien et je l'entraine avec moi.
- Retourne-toi discrètement et dis moi si le clan Mercedes est toujours en train de nous regarder...
Lando tourne la tête sans faire preuve de discrétion. Je lève les yeux au ciel, j'avais dit discrètement, mais j'avais oublié à qui je parlais. Quelques secondes plus tard, il me regarde avec un grand sourire.
- Tu as cinq paires d'yeux braqués sur toi. Je sais pas ce que tu as fait, mais apparemment ça à l'air de les amuser. Pouffe le jeune britannique.
- Toto a eu la bonne idée de vouloir me présenter au père de Lewis. Et vu la situation entre lui et moi, c'était pas vraiment quelque chose de prévu...
- Bah pourquoi ? Moi je l'aime bien son père, il parait froid aux premiers abords, mais après il se détend et il est vraiment sympa !
- Oui, sûrement, j'en doute pas même. Mais je sais même pas si on est en couple de nouveau ou non...
- Bah, hier soir, en tout cas, tes gémissements laissaient penser que vous étiez un peu plus que des amis !
Je frappe l'épaule de Lando ce qui le fait éclater de rire. Mes joues s'échauffent un peu quand les images me reviennent en tête.
- Arrête d'y penser, j'ai encore ta voix dans mes oreilles. Ooooh Lewis, ne t'arrête paaaaaaaaas, imite Lando en prenant une voix plus aiguë.
- Mais ça suffit Lando !
- Oui bah la prochaine fois, vous irez dans sa chambre !
- Il y avait son père dans l'une des chambres de sa suite. Alors entre lui et toi, je préfère que ça soit toi qui m'ait entendu...
Quand nous arrivons devant notre motorhome, je me détache un peu de Lando. Mon portable vibre avec insistance dans ma poche.
- Je te rejoins, lui dis-je en lui montrant mon écran.
J'attends que Lando disparaisse à l'intérieur puis je m'assois sur l'une des chaises disponibles sur la petite terrasse.
- Je te jure que je savais pas ce que Toto s'apprêtait à faire, m'informe Lewis dès que j'apporte mon téléphone à mon oreille.
- Oui, ça c'est vu à ta tête ! Rigolai-je pour faire redescendre la pression. Merci...
- Merci de ?
- D'avoir fait diversion avec Lando, puis de ne pas avoir rendu ce moment encore plus gênant en dévoilant la nature de notre relation à ton père.
- J'ai improvisé, tu m'as dit que ça te stressait... Mais faudra bien que je lui dise, il ne va pas croire pendant très longtemps que j'enchaine les entrainements tard à la salle le soir et très tôt le matin.
- C'est ce que tu lui as dit ?
- C'est la seule chose plausible que j'ai trouvé à lui dire.
Nous éclatons de rire tous les deux. Qu'est-ce que j'aime entendre le rire cristallin de Lewis, c'est comme s'il n'avait jamais perdu son rire d'enfant.
- Il faut que je retourne travailler... On se croisera à l'espace média ?
- Moi aussi il faut que j'y retourne, Lando va commencer à s'impatienter. Déjà qu'il m'a fait plusieurs réflexions sur le fait qu'il nous avait entendu cette nuit, je n'ai pas envie de le rendre plus grognon.
- Oups... La prochaine fois, je mettrai ma main sur ta bouche !
Je pouffe de rire puis je finis par raccrocher. Je me surprends à sourire toute seule, je range mon portable puis je vais rejoindre Lando qui m'attend pour notre réunion habituelle avant de passer devant les journalistes.
Je pose ma serviette et ma gourde sur l'un des bancs qui longe la piscine. Je suis rentrée à l'hôtel, un peu avant tout le monde. Après les interviews, je ne me sentais pas très bien. Rien qui ne puisse ressembler aux symptômes d'une quelconque maladie, mais plutôt comme si mes batteries sociales étaient à plat. Je n'arrivais même plus à rigoler aux blagues stupides de Lando.
Quand c'est comme ça, je préfère m'isoler un peu et prendre du temps pour moi. Quand j'ai déposé les deux pass que j'avais promis au réceptionniste, j'en ai profité pour demander l'accès à la piscine. Je suis remontée dans ma chambre pour me changer, vu l'heure et du temps que j'avais devant moi, je me suis installée sur mon lit pour appeler mon père et ma belle-soeur. Avant de partir du paddock, j'avais précisé à Lando que je ne mangerai pas avec lui ce soir. Je voulais pouvoir faire ce que je voulais, quand je le voulais ce soir. Alors que le soleil déclinait dans le ciel, ne laissant qu'un dégradé flamboyant apparaitre entre les nuages, j'ai pris mes affaires et je suis montée à la terrasse où se trouve la piscine.
Je m'assois sur le rebord, il y a quelques personnes qui nagent dans les lignes d'eau, mais l'endroit est plutôt calme. Je glisse doucement mes pieds dans l'eau fraiche, je soupire d'exaltation, il fait très chaud ici et l'air humide n'aide pas. Je prends un peu d'eau dans le creux de ma main et je m'asperge la nuque, puis je glisse totalement dans l'eau.
Je laisse mon corps coulé jusqu'à ce que mes pieds touchent le fond puis, avec une impulsion, je remonte à la surface. Je récupère mes lunettes de natation puis je me lance. La piscine n'est pas très grande, j'effectue pas mal de rotation en peu de temps. Heureusement que ma montre compte pour moi le nombre de longueurs que je fais, car je perds vite le compte, perdue dans mes pensées.
Dimanche après-midi, je prendrai l'avion pour rentrer chez moi, à Monaco. Nous avons une semaine de battement avant de nous rendre à Melbourne. Je ne sais pas ce qu'a prévu Lando, tout ce que je sais c'est qu'on ira à Woking pour assister au débriefing post race comme à chaque fois.
Je ne suis pas retournée dans mon appartement depuis que j'ai pris l'avion pour aller à la Réunion. Maintenant que Lewis est de retour dans ma vie, je me demande comment nous allons nous organiser. Remettre les pieds dans cette maison où nous avons vécu pas mal de choses, des bonnes comme des mauvaises, ne m'enthousiasme pas plus que ça. Mais d'un autre côté, mon appartement n'est clairement pas assez grand pour accueillir toutes les affaires de Lewis. Entre sa salle de sport, sa garde robe ou encore son bureau, nous n'aurons plus de place pour bouger. Mais chaque chose en son temps, nous n'en sommes pas encore là. Même s'il m'a dit que nous aurons du temps pour nous voir, il faut encore que nos agendas s'accordent.
Rapidement, je constate que je suis toute seule dans l'eau. La nuit est tombée et les lumières de la terrasse ont pris le relai. Je fais encore quelques longueurs puis je me laisse flotter à la surface de l'eau, les yeux rivés sur le ciel.
Je rejoins le rebord à débordements de la piscine et je m'accoude dessus. Le circuit, en contrebas, brille dans la nuit. Je regarde la ville qui s'anime, les phrases des voitures forment de grandes guirlandes lumineuses le long de la côte. Je frissonne un peu, mon corps se refroidit vite par mon manque de mouvement.
- Je savais que je te trouverai ici !
Je me retourne en souriant, reconnaissant la voix de Lewis. Il est accroupi au bord de la piscine, les coudes sur les genoux et ses mains maintenant sa tête. Deux tresses retombent sur ses yeux.
- Tu ne peux vraiment plus te passer de moi ! Lui dis-je en nageant pour me rapprocher de lui.
- Que veux-tu ? Quand on apprécie la présence de certaine personne, il est difficile de s'en passer !
Mes mains prennent appuie sur le rebord et je me hisse jusqu'à son niveau. L'eau ruissèle sur mon corps, j'approche ma tête de la sienne.
- Tout ce que j'ai retenu c'est que tu m'appréciais !
- Ah ! Tu as cru que je parlais de toi... Je ne me souviens pas de t'avoir explicitement nommé quand je parlais de certaine personne.
J'hausse les sourcils de surprise, puis je menace d'éclabousser Lewis avec ma main.
- Ok ! Ok ! Tu fais partie de ces personnes ! Même si je pense que c'est plus que de l'appréciation que j'ai pour toi !
- C'est fou ce que tu pourrais dire pour pas que je mouille ta tenue ! Répliquai-je en rigolant.
Je retombe dans l'eau puis je nage jusqu'à l'échelle. Quand je relève la tête, je constate avec plaisir qu'il m'attend, la serviette grande ouverte devant lui. J'essore mes cheveux puis je me blottis contre lui pendant qu'il referme la serviette sur moi. Lewis frotte énergiquement mon dos et mes bras pour me réchauffer.
Je finis par me décoller pour finir de me sécher, Lewis récupère mes lunettes de natation et s'assoit sur le banc à coté de ma gourde. Je ne tarde pas à le rejoindre.
- Qu'est-ce que tu fais en tenue de sport ? Demandai-je en finissant de m'essuyer les jambes.
- J'ai dit à mon père que j'allais faire une petite séance de sport, alors pour être crédible j'ai sauté dans un jogging !
Je secoue la tête de droite à gauche tout en rigolant. Lewis me regarde avec attention tout en reposant son dos contre le mur derrière nous.
- Je suis passé te dire bonne nuit, mais vu que tu répondais pas, j'ai fini par aller voir dans la chambre de Lando. C'est lui qui m'a dit que t'avais demandé à passer la soirée seule... Tout va bien ?
- Oui, oui, ça va... Entre la soirée d'hier et la journée d'aujourd'hui... J'avais juste besoin d'un peu de temps pour moi.
Lewis écarte son bras pour m'inviter à me blottir contre lui, je ne me fais pas prier. Je me décale un peu sur le banc jusqu'à rentrer en contact avec son corps, puis je dépose ma tête sur son épaule. Je veux profiter de ce moment de calme pour aborder certains sujets avec lui. Ce n'étais pas hier dans l'ascenseur, ni dans mon lit que j'aurai pu le faire. J'inspire profondément puis je me lance.
- Lewis ? Est-ce que Charles t'a demandé de me convaincre de signer chez Ferrari moi aussi ?
Je n'y vais pas par quatre chemins, je sens que le corps de Lewis se tend légèrement sous ma question. Mais j'ai besoin d'en avoir le coeur net.
- Eh bien... Il m'en a parlé, c'est vrai. J'aurai pu être un très bon argument selon lui. Mais j'ai refusé d'aborder le sujet avec toi.
Je me redresse un peu pour voir son visage. Il tourne doucement sa tête pour me regarder à son tour, un petit sourire en coin se dessine sur ses lèvres.
- Avoue quand même que j'ai quelques arguments pour te faire flancher, non ?
- Je ne vois pas de quoi tu parles, lui dis-je avec un air de défi.
Lewis se mord la lèvre et attire mon visage vers lui avec sa main. Je risque un regard sur sa lèvre prise au piège de ses dents. Pourquoi est-ce qu'il faut toujours que notre discussion finisse par déraper ? J'avais pourtant poser une question qui me semblait loin de pouvoir déclencher ce genre de situation. Avec ma main posée sur son torse, je le repousse un peu.
- Lewis, je suis sérieuse...
- Mais moi aussi Amélia, c'est bien pour ça que je n'ai pas abordé le sujet avec toi. Si tu acceptes le poste, je veux que tu le fasses parce que tu en as vraiment envie, parce que c'est quelque chose que, toi, tu veux et non parce que je t'aurai convaincu de le faire.
- C'est pour ça que tu prends les décisions pour ta carrière, seul ?
- Entre autre oui, imagine que tu regrettes de signer chez Ferrari, tu finirais par m'en vouloir parce que ce n'était pas vraiment ce que tu voulais. Alors que si tu fais ton choix toute seule, tu pourras t'en vouloir qu'à toi-même. Ça aurait été la même chose, si Toto t'avait fait cette offre et que je serai resté chez Mercedes l'an prochain, je n'aurai pas abordé le sujet avec toi.
Je soupire puis je laisse ma tête tomber sur son torse. Les lumières de la terrasse se reflètent sur la surface de la piscine, les mouvements sont presque hypnotisants.
- Je ne sais pas quoi faire...
- Ne te presse pas pour donner ta réponse, tu as largement jusqu'à la trêve estivale. En fonction, ils lanceront le recrutement ou non à ce moment là. Tu en as déjà parlé avec Lando ?
- Oui, fin j'ai été un peu obligée, parce qu'ils vous a entendu en parler pendant la parade la semaine dernière... Je crois que nous avons dépassé le stade professionnel depuis longtemps lui et moi. Je rigole doucement, puis reprends. Tant que je reste à ses cotés comme amie, je pense qu'il pourrait accepter que je quitte McLaren. Mais tout ça est encore trop vague pour moi ! Bref, tu me raccompagnes jusqu'à ma chambre ?
Je me lève d'un bon, je commence à avoir un peu froid puis je crois bien que ce sujet me rend un peu triste. Peu importe la décision que je prendrai, je sais que soit Lando soit Charles sera déçu et je n'aime pas décevoir mes amis.
Lewis passe son bras autour de ma taille et m'attire vers lui.
- Peu importe la décision que tu prendras, ça sera la bonne, parce que ça sera la tienne.
Sa main vient caresser ma joue, je me hisse sur la pointe de mes pieds pour l'embrasser. La chaleur qui émane de son corps m'enveloppe et me réconforte un peu. Lewis resserre son étreinte autour de moi puis dépose quelques baisers dans mon cou. Je passe mes bras autour de sa nuque et nous restons dans cette position pendant quelques minutes, sans bouger.
Nous finissons par nous décoller l'un de l'autre, je récupère mes affaires et nous nous dirigeons vers l'ascenseur, main dans la main. Je chéris tellement les moments où nous pouvons être juste nous deux, en dehors de notre chambre d'hôtel, sans personne pour nous voir.
Parfois, je me demande comment serait la vie de Lewis s'il n'avait pas été pilote de Formule 1. Comment serait notre vie ensemble s'il n'avait pas été mondialement connu ? On aurait pu se balader main dans la main dans la rue, aller au restaurant, au cinéma sans se soucier d'être vu ou non. Notre vie aurait été complètement différente, mais je serai incapable de dire si j'aurai préféré cette version-là ou celle que nous sommes en train de vivre actuellement.
Dans l'ascenseur, je reste dans les bras de Lewis. Dos à lui, je bascule ma tête en arrière pour la poser contre sa clavicule. Il dépose de temps à autre des baisers là où ses lèvres arrivent à avoir accès à ma peau. Je frissonne quand il arrive dans le creux de mon oreille. Il n'y a de tension sexuelle palpable entre nous à ce moment-là, nous profitons juste du moment que nous partageons ensemble.
Les portes finissent par s'ouvrir. Le couloir menant à ma chambre me parait beaucoup trop court quand nous arrivons devant ma porte.
- C'est ici que nos chemins se séparent... murmurai-je doucement.
- Il n'y a que toi qui peut décider de la suite de la nuit.
Je souris à Lewis.
- Lando va me tuer si on l'empêche encore de dormir...
-Ne t'inquiète pas, puis j'oublie pas qu'à la base, tu voulais passer la soirée toute seule. Me répond Lewis en prenant mon visage entre ses mains.
- C'était agréable d'être seule avec toi. On se voit demain ?
- Comme si j'allais te laisser le choix ! Rigole-t-il. Night Night Sweety-B...
Ses lèvres se posent délicatement contre les miennes. Ce baiser doux en appelle d'autres, mais nous sommes interrompus par une porte qui s'ouvre un peu plus loin. Je souhaite une bonne nuit à Lewis et je le regarde partir en direction de sa chambre. Je salue James, le coach sportif de Lando, qui passe devant moi, un sourire en coin.
Je déverrouille la porte de ma chambre, puis je me dirige directement dans la salle de bain. Je m'empresse de me déshabiller pour me glisser sous la douche, je ne supporte pas la légère odeur que le chlore a laissé sur ma peau. Une fois propre et sèche, j'enfile une culotte et mon t-shirt oversize puis je prends place sous ma couette. J'allume la télé, sans avoir la grande conviction de trouver un programme qui puisse me plaire, je zappe un peu les chaines puis je finis par tomber sur une chaine de musique. Je souris quand je reconnais le visage de Taylor Swift, je suis certaine que Lando connait la chanson par coeur.
Je baisse le son au minimum puis je m'installe un peu plus confortablement dans mon lit, prête à m'endormir. J'avais besoin de passer cette soirée un peu seule pour refaire le plein d'énergie avant la journée de demain.
7 mars 2024 - Djeddah - Arabie saoudite
Une bouillotte chaude coincée entre mon pantalon ouvert et mon ventre, j'attends Lando, allongée en position foetale, sur le canapé de sa room. Mes règles et les douleurs qui vont avec, ont pointés le bout de leur nez en début d'après-midi. Je n'ai pas passé cette fin de journée d'essais libres dans les meilleures conditions. Les crampes à répétitions m'ont empêchées de finir de regarder les derniers chronos de nos monoplaces depuis le garage.
De là où je suis, j'entends le vrombissement des moteurs qui passent au loin à intervalle plus ou moins régulier. La séance ne devrait pas tarder à se terminer. Je suis sur mon écran de téléphone la retransmission des essais avec les commentaires de Julien Fébreau. Lorsque la grille des temps s'affiche, je suis un peu surprise de voir que le trio de tête est composé de Fernando, George et Max en troisième position. Mes yeux balaient rapidement les temps, puis je découvre que Lando a fait douzième meilleur temps, alors que ce matin il était septième juste devant Lewis, encore une fois.
- Tu fais vraiment une sale tête, m'annonce Lando en ouvrant la porte de sa room.
- Merci, c'est un plaisir d'avoir ton soutien, grimaçai-je le temps que la crampe passe.
Je me redresse un peu, tout en maintenant la bouillotte avec ma main.
- Tu veux te changer ou on va directement aux interviews ?
- Non, mais tu n'es pas obligée de m'accompagner, surtout dans l'état dans lequel tu te trouves.
- Ne t'inquiète pas pour moi, ça va finir par passer, puis comme ça, ça te donnera une bonne excuse pour pas trop perdre de temps devant le micro, n'est-ce pas ?
Lando hausse les épaules et récupère sa gourde. Il aspire longuement à sa paille et me regarde me relever avec amusement.
- Ce que ça veut dire c'est surtout qu'on va passer une soirée tranquille devant un bon film. Et rien ne pourrait me faire plus plaisir !
Son raisonnement me fait sourire. Lando n'a pas tord, la soirée sera sans aucune doute bien plus calme que celles des derniers jours. Je repose la bouillotte sur la table, reboutonne mon jean et remets mon polo en place. D'un coup de tête vers la porte, j'indique à Lando que je suis prête à le suivre dans ce rituel post-essais libre.
Nous terminons la tournée des micros en remerciant le journaliste de Skysport, je commence à être sacrément fatiguée. J'ai retenu quelques bâillements pendant les interviews, mais maintenant que nous sommes arrivés au bout, je baille aux corneilles en cachant ma bouche avec ma main. C'est à ce moment-là que nous croisons Pierre, qui vient lui aussi de terminer ses obligations médiatiques.
- Eh Amélia ! Vous faites quoi ce soir ? Me demande mon meilleur ami, en français.
- Vu mon état, je pense qu'on va faire monter le repas dans ma chambre et ça sera diner devant un film. Tu veux te joindre à nous ?
- Quoi ? Je suis enfin invité à vos petites soirées privées ! Bien sûr que j'en suis ! Envoyez moi un message quand vous quittez le paddock !
Je regarde mon meilleur ami quitter le bâtiment puis je fais la traduction de notre conversation à Lando. Même si je le soupçonne de comprendre de mieux en mieux le français, je n'ai pas envie qu'il se sente à l'écart. Je sais que parfois la barrière de la langue peut être clivante.
- Tu n'as qu'à inviter Lewis tant que tu y es ! Me propose Lando quand nous arrivons dans l'allée centrale du paddock.
- C'est vrai ? Je suis surprise que tu le proposes !
- On m'a toujours dit d'être proche de mes amis, mais encore plus de mes ennemies, rigole-t-il.
- Lewis est ton ennemie ? Carrément ?
- Peut-être que j'abuse un peu en employant ce mot. Mais après tout, si y'a Pierre, pourquoi il n'y aurait pas Lewis ?
Je suis un peu étonnée de la proposition de Lando, mais je me retiens de lui demander une nouvelle fois une confirmation, de peur qu'il ne change d'avis. Je pianote rapidement un message sur mon téléphone tout en suivant Lando qui marche en direction de notre motorhome. Sa journée n'est pas encore terminée, il y a encore le débriefing avec les ingénieurs.
Moi : 21h21
Si tu n'as rien de prévu, tu es invité par Lando et moi même
à venir passer la soirée avec nous.Il y aura Pierre également,
on fera monter nos repas dans ma chambre.
Qu'est-ce que tu en dis ?
LH : 21h22
Je ne sais pas trop à quelle heure je vais finir,
Mais j'apporterai le dessert !
Moi : 21h22
Parfait, prends moi quelque chose au chocolat !
LH : 21h23
Compte sur moi ! A tout à l'heure !
Je remets mon téléphone dans la poche de mon jean, puis je remonte dans mon bureau pendant que Lando va rejoindre ses ingénieurs. J'espère juste que sa réunion ne va pas trop durer, j'ai hâte de pouvoir prendre une douche et de m'installer sous ma couette.
Je laisse mes baskets en plan dans l'entrée de ma chambre, je les rangerai plus tard, voir demain, ou peut-être que Lando les rangera, mais j'ai du mal à y croire. Je me précipite dans la salle de bain, il faut que je change ma protection et que je soulage ma vessie.
- Si quelqu'un frappe à la porte, ouvres, je file sous la douche, indiquai-je à Lando à travers la porte.
Je n'attends pas de réponse de sa part et j'ouvre le robinet de la douche pour que l'eau chaude commence à arriver. Un léger voile de vapeur flotte au plafond pendant que je me déshabille. J'attache mes cheveux en chignon vite fait, je n'ai pas le temps pour m'occuper de mes cheveux sous la douche ce soir. Je range un peu mes affaires puis j'entre dans la douche à l'italienne.
L'eau chaude me détend instantanément, j'étire un peu mes cervicales et me masse un peu le bas du dos. J'aurai peut-être dû attendre que Lewis arrive, il aurait rendu ce moment encore plus agréable. Je rigole toute seule en pensant à la dernière douche que nous avions partagé, ça remonte à pas mal de temps maintenant.
J'arrête de perdre du temps, au vu des voix que j'entends de l'autre coté de la porte, il me semble que Pierre est arrivé lui aussi. Je me savonne, me rince et je quitte ce sauna. Je m'enroule dans le peignoir pour me sécher un peu puis j'ouvre la porte en grand.
Pierre et Lando, tous les deux en tenues décontractées, sont sur mon lit en train d'étudier le menu. Je récupère de quoi me changer dans mon armoire et je retourne dans la salle de bain sans rien dire. J'enfile ma culotte, y colle une serviette et je passe un jogging un peu ample dans lequel je suis confortable. Puis j'enfile l'un des pulls de Lewis. Je ne serai pas la plus sexy ce soir, mais je m'en moque, je veux juste être confortable.
Quand je ressors de la salle de bain, Lando lève les yeux du menu pour me regarder. Son jugement est sans appel, il s'écroule de rire.
-Il est bien loin le temps où tu portais ta fameuse robe à paillettes quand on était à Sakhir ! Se moque-t-il entre deux spasmes.
-T'es sûre de vraiment vouloir que Lewis te voit comme ça ? Renchérit Pierre en rigolant de plus belle.
Je lève les yeux au ciel et je vais les rejoindre sur mon lit.
- De toute façon, il m'a vu dans des états bien pires que celui-ci. Puis au pire, ça me permettra de savoir s'il est vraiment prêt à tout pour me reconquérir !
Je tire le menu des mains de Lando et je parcours les plats qui sont proposés dans cet hôtel. J'ai envie de commander toute la carte, mais il faut que je fasse un choix. Alors que Lando est déjà au téléphone avec la réception pour passer la commande, il me presse un peu pour que je fasse mon choix.
- Prends moi une assiette de frites avec de la mayonnaise et... le burger qui va avec !
- Vous voulez un dessert ? Nous demande Lando en éloignant un peu le téléphone de son oreille.
- Non, Lewis a dit qu'il s'en chargeait !
Heureusement que nous avons commandé le repas avant d'avoir choisi le film que nous voulions voir tous les trois, sinon c'est sûr que nous aurions fini par manger froid. Déjà qu'il est difficile de se mettre d'accord avec Lando, mais alors rajouter Pierre dans l'équation, ce n'était pas l'idée la plus intelligente que j'ai eu. Quand Lando finissait par dire oui, c'était Pierre qui n'était pas d'accord.
Pour faciliter les choses, je les ai laissé se concerter. De toute façon, je ne suis pas vraiment en mesure d'imposer mes choix, alors qu'ils choisissent.
Je soupire quand les premières images d'Avatar II s'affichent à l'écran. J'ai déjà vu ce film quand il est sorti au cinéma, au moins je connais déjà l'histoire et je n'aurai pas besoin de lutter pour voir la fin si je viens à m'endormir avant.
Nos repas sont servis peu de temps après que nous ayons commencé le film. J'engloutis littéralement mon assiette, j'avais sacrément faim. Ce midi, je n'ai pas réussi à manger, me sentant trop barbouillée pour avaler quoique ce soit. Je suis en train de lécher mes doigts plein de sels quand mon portable vibre.
LH : 23h03
Je récupère des cuillères au resto et j'arrive !
- Lewis ne va pas tarder à arriver, alors je vous préviens à la moindre pique, vous dégagez de la chambre. Je veux passer une soirée tranquille, sans prise de tête ! Et si jamais l'envie te prend, surtout Pierre, n'hésites pas à t'excuser pour ton comportement de mardi !
Lando pouffe de rire, je le foudroie du regard.
- Ça vaut aussi pour toi, Lando ! Je veux passer une bonne soirée avec vous trois...
Lando se redresse et hoche la tête en signe d'acceptation. Nous reposons nos assiettes sur le chariot pour faire un peu de place. Puis quand on entend frapper deux coups sur la porte, c'est Pierre qui se lève en premier pour aller ouvrir.
Je fronce un peu des sourcils quand mon meilleur ami et Lewis discutent à voix basse dans l'entrée. De là où je suis, je ne peux ni les voir ni entendre clairement ce qu'ils se disent. Lando a profité de l'absence de Pierre pour se faufiler entre les coussins et se faire un petit nid douillet.
- Bah quoi ? Me chuchote-t-il. Qui va ouvrir la porte à Lewis, perds sa place, c'est la dure loi de la vie !
Je le regarde faire en souriant. Mes journées seraient bien ennuyeuses si je n'avais pas Lando dans ma vie, ça c'est sûr !
Les garçons finissent par faire leur entrée dans ma chambre, je me lève et marche sur le lit pour aller accueillir Lewis. Son regard amusé détaille ma tenue. Lorsque j'arrive à son niveau, je plaque mon index sur sa bouche.
- Shhh, je n'accepterai aucun commentaire de ta part !
Lewis rigole doucement, lance le sac de course sur le lit et me prend dans ses bras.
- J'ai le droit de dire que tu es très belle, même comme ça ? Me demande Lewis en remettant une mèche de cheveux dans mon chignon.
Derrière nous, j'entends Pierre qui pouffe de rire et Lando qui imite l'action de vomir. Je dépose un rapide baiser sur les lèvres de Lewis et je me retourne en direction de mon lit. Au passage, je saisis le sac que Lewis a amené. Quand je l'ouvre, je sautille sur place. Il y a quatre pots de glace Ben&Jerry's et quatre cuillère.
Je m'installe à mon tour sous la couette, Lando est à coté de Pierre, qui lui est à coté de moi. Je laisse une petite place à Lewis qui ne se fait pas prier pour nous rejoindre. Je fais la distribution des pots à chacun, donnant bien évidemment le pot estampillé « Cookie Dough Vegan » à Lewis. Je n'ai jamais gouté cette gamme chez eux, ça sera l'occasion d'en voler un peu à Lewis. Je garde pour moi la Fudge Brownies et donne la Vanilla Pecan Blondie à Lando et la Peanut Butter Cup à mon meilleur ami.
Une fois que nous sommes installés tous les quatre dans mon lit, nous remettons le film que nous avions commencé en mangeant.
Blottis dans les bras de Lewis, je sens que je commence à piquer du nez. Le film touche bientôt à sa fin mais je n'arriverai pas à tenir jusque là. Je chuchote un bonne nuit à tout le monde et je me laisse aller contre le torse musclé du pilote aux flèches d'argent.
Je sens le matelas bouger à plusieurs reprises, mais je suis encore trop loin dans mon rêve pour réussir à me réveiller. Le film a dû se finir car j'entends les garçons qui chuchotent au loin. J'ouvre les yeux quand ma tête est posée sur l'un de mes oreillers. Je tends la main pour retenir Lewis.
-Tu ne reste pas dormir avec moi ? Articulai-je les yeux encore mi-clos.
Lewis se rapproche et dégage les mèches de cheveux qui couvrent un peu mon visage.
- Tu veux que je reste ?
J'hoche la tête de haut en bas tout en serrant son poignet entre mes doigts.
- Lewis tu viens ? On t'attend ? Interroge Pierre qui doit être déjà dans l'entrée puisque je ne le vois plus dans ma chambre.
- Je... Je vais rester avec Amélia pour cette nuit, on se voit demain !
Pierre et Lando nous souhaitent une bonne nuit puis j'entends la porte de ma chambre se refermer doucement. Lewis remet un peu d'ordre dans le lit en jetant les pots de glace à la poubelle.
Le matelas s'affaisse un peu quand il finit par me rejoindre. Je quitte mon bas de jogging, j'ai beaucoup trop chaud pour dormir avec et je retrouve rapidement ma place dans les bras de Lewis. Il dessine des ronds sur ma cuisse avec son index et dépose des baisers dans mes cheveux.
- Il faudra rester sage ce soir, j'ai mes règles et-
- J'avais bien compris en te voyant habillée comme ça, me coupe Lewis. C'est très bien aussi les câlins pour s'endormir...
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Hello ! Hello !
Un petit pic de stress en ce début de chapitre !
Mais une chose est sûre, le sujet Anthony Hamilton vous réserve encore des surprises !
On ralentit un peu la cadence pour profiter de ces quelques moments agréables 🫠
Prochain chapitre vendredi et il sera du point de vue de Lewis !
A très vite ❤️
Des bécots !
Writting Firefly ✨