LE JOUR OÙ LES ÉTOILES ONT CE...

By EmmyBlp

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🎶 Nameless, le groupe de musique le plus adulé de sa génération s'est dissout sans la moindre explication, i... More

Avant-propos
Personnages
CHAPITRE 1 - Saïd
CHAPITRE 2 - Sofia
CHAPITRE 3 - Alban
CHAPITRE 4 - Saïd
CHAPITRE 5 - Loup
CHAPITRE 6 - Sofia
CHAPITRE 7 - Alban
CHAPITRE 8 - Saïd
CHAPITRE 9 - Loup
CHAPITRE 10 - Alban
CHAPITRE 11 - Sofia
CHAPITRE 12 - Saïd
CHAPITRE 13 - Loup
CHAPITRE 14 - Alban
CHAPITRE 15 - Loup
CHAPITRE 16 - Saïd
CHAPITRE 17 - Sofia
CHAPITRE 18 - Alban
CHAPITRE 19 - Saïd
CHAPITRE 20 - Alban
CHAPITRE 21 - Loup
CHAPITRE 22 - Loup
CHAPITRE 23 - Loup
CHAPITRE 24 - Loup
CHAPITRE 25 - Loup
CHAPITRE 26 - Loup
CHAPITRE 27 - Sofia
CHAPITRE 28 - Alban
CHAPITRE 29 - Saïd
CHAPITRE 30 - Sofia
CHAPITRE 31 - Saïd
CHAPITRE 33 - Saïd
CHAPITRE 34 - Sofia
CHAPITRE 35 - Sofia
CHAPITRE 36 - Alban
CHAPITRE 37 - Saïd
CHAPITRE 38 - Alban
CHAPITRE 39 - Saïd
CHAPITRE 40 - Loup
CHAPITRE 41 - Saïd

CHAPITRE 32 - Loup

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By EmmyBlp

LOUP

Vendredi 1er septembre 2017
Bruxelles, Belgique


— Et donc vous avez enregistré ce nouvel album alors que vous étiez sur votre tournée, c'est bien ça ?

La journaliste me regarde, dans l'espoir que je réponde enfin à l'une de ses stupides questions, mais ça n'arrivera pas. Je n'ai pas la tête à ça et puis Saïd s'en sort très bien tout seul. Alban et Sofia ne participent pas vraiment à l'interview, eux non plus. Alors qu'on s'était persuadés que tout se passerait pour le mieux sur cette nouvelle tournée, il faut croire que la flamme n'est plus vraiment là.

— Oui, exactement, se lance finalement Saïd après un long moment de silence. On sortait du concert et on retournait directement dans le tour-bus pour enregistrer avec Tony qui gère toute la partie musicale avec nous.

— Ça devait être fatigant tout ça, non ? demande la journaliste en se tournant vers Sofia cette fois.

— Oui, mais excitant à la fois. Je pense que le rendu montre à quel point on s'est investis pour ce projet.

Toujours les mêmes réponses aux mêmes questions...

— Et avec cet emploi du temps très chargé, vous arriviez quand même à vivre une vie normale ?

— Je ne pense pas que notre vie soit normale, par définition, lui répond Alban. Mais on arrive toujours à trouver du temps pour nous, si c'est ce que vous voulez dire.

— Oui, j'imagine bien. D'ailleurs Loup, dis-moi. On vous a vu au bras d'une magnifique jeune femme tout l'été. On dirait que toi tout particulièrement, tu as réussi à séparer ta vie privée de la vie du groupe. Son arrivée n'a pas créé trop de chamboulements entre vous ?

Ça y est, c'est enfin mon moment.

— Non, pas du tout, je réponds, sûr de moi. Je ne pense pas que ce soit une question de séparer ma vie privée de celle du groupe, puisque le groupe fait partie de ma vie. Je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire.

La journaliste me sourit, satisfaite de ma réponse. J'ai bien appris ma leçon : rester vague, tout en étant convaincant.

— Donc tout le monde s'entend bien avec ta copine ? demande-t-elle ensuite en se tournant vers les autres.

— Oui, on l'adore ! s'exclame Alban sur un ton qui sonne faux. C'est la copine de notre pote, donc bien évidemment.

— Ça fait du bien d'avoir une autre fille dans le groupe, poursuit Sofia qui a trouvé la phrase parfaite à ressortir lors de chaque interview.

Tout le monde a appris son discours par cœur, parce qu'une chose est sûre, si on veut s'en sortir, on doit tous y mettre du nôtre. Il n'y a que Saïd qui ne participe pas pendant ce genre de questions. Je comprends tout à fait, mais ça n'aide pas.

— Pourtant, on ne l'a pas vu passer beaucoup du temps avec le reste du groupe. D'ailleurs, on ne l'a pas vue depuis votre retour de vacances. Tout va bien ?

— Oui, tout va parfaitement bien, j'enchaîne. Elle ne peut simplement pas être présente sur la tournée, ce qui peut se comprendre je pense.

— Oui, bien sûr. Et vous vous êtes rencontrés sur la tournée ? C'est une de vos fans ?

— Non, pas du tout. On se connaît depuis le lycée et vous savez comme c'est. Quand on a sorti notre premier album et fait notre première tournée, les choses sont devenues plus compliquées. Là, j'ai pensé que c'était le bon moment pour la faire revenir dans ma vie.

— C'est une très belle histoire Loup ! Et toi, Saïd, tu en penses quoi de cette relation ? Tu n'as pas beaucoup parlé aujourd'hui et j'ai cru comprendre que les fans sont inquiets pour votre relation.

On se tourne tous les trois vers lui, machinalement. Parmi toutes les interviews qu'on a pu donner depuis le début du mois, c'est la première fois que quelqu'un s'adresse directement à Saïd sur ce sujet.

On retient tous notre respiration. Contrairement à nous, il n'a pas de réponse toute faite. Je vois qu'il hésite. Son regard perdu croise le mien, mais sur ce coup-là, je ne peux rien faire pour lui. Il va devoir répondre.

— Euh... non, tout va bien. Aucun souci.

— Bon tant mieux, j'espère que vos fans seront un peu rassurés !

Tout le monde souffle et l'interview se poursuit au sujet du nouvel album. Lorsque la journaliste met finalement un terme à ses questions, chacun se lève pour aller vaquer à ses occupations avant le concert de ce soir. Je suis le premier à quitter la salle, ressentent le besoin urgent de prendre l'air.

À l'extérieur, il fait encore relativement chaud pour une fin septembre. Des dizaines de fans attendent déjà devant les portes de la salle et se mettent à crier dès qu'ils m'aperçoivent. Je les ignore, enfile la capuche de mon sweat et accélère l'allure pour rejoindre l'arrière de la salle au plus vite. Les mains moites et le souffle court, je m'appuie contre le mur. Les cris cessent peu à peu et j'ai enfin la sensation d'être seul.

J'inspire et expire de plus en plus lentement, jusqu'à ce que cette crise de panique se calme. Ce n'est pas la première fois que ça m'arrive, mais ces dernières semaines elles sont se font de plus en plus fréquentes. Je fais tout mon possible pour le cacher aux autres. Je ne veux surtout pas leur apporter une source d'inquiétude supplémentaire. Ils ont assez à faire en ce moment.

Après avoir retrouvé mes esprits, je m'assieds sur le bord du trottoir qui longe la salle et sors de la poche arrière de mon jean mon paquet de cigarettes. J'en place une entre mes lèvres et le petit « clic » du briquet qui s'allume suffit déjà à faire baisser ma tension. Saïd dit que c'est simplement psychologique, mais je m'en fous pas mal, tant que ça me calme. La première taffe est toujours difficile, mais les suivantes sont source de réconfort.

Jamais je n'aurai pensé en arriver là, mais après ma première crise de panique cet été, il me fallait quelque chose pour me sortir de cet état qui devenait de plus en plus récurent. Quatre semaines avec mon père et Lucie ont réussi à détruire le peu d'espoir qu'il me restait. L'espoir de peut-être réussir à me libérer de tout ça un jour. Au lieu de ça, j'ai pris conscience que rien ne sera plus jamais comme avant. Ni pour moi, ni pour Saïd, ni pour le groupe. Toute cette histoire est allée beaucoup trop loin pour qu'un retour en arrière soit ne serait-ce qu'envisageable.

J'ai fini par me faire une raison et je m'accroche comme je peux, grâce à la cigarette, grâce à mes amis, grâce au regard de Saïd qui malgré la peine qu'il ressent en me voyant m'enfoncer un peu plus chaque jour, ne me juge jamais. J'aimerais pouvoir exprimer avec des mots tout ce que je ressens, le vide que je ne parviens plus à combler, mais rien ne sort. Nos conversations sont silencieuses la plupart du temps. Même mes yeux ne parviennent plus à exprimer quoi que ce soit. J'ai de plus en plus de mal à regarder Saïd dans les yeux, car le reflet que j'y vois ne me ressemble plus en rien.

J'écrase mon mégot sous mon pied avant de rejoindre les coulisses pour me préparer à ce nouveau concert. Lorsque j'entre dans les loges, Alban me tend aussitôt un gobelet, rempli de notre mélange favori : vodka et jus de pomme. Depuis le début de la tournée européenne, c'est devenu notre petite habitude, sans qu'on ne sache réellement pourquoi.

— T'es sûre que t'en veux pas ? demande Alban à Sofia en lui tendant un gobelet.

Elle secoue la tête, comme chaque soir. Au début, elle semblait déterminée à nous suivre, mais plus les soirs passaient et plus il lui était difficile de jouer avec cet alcool dans le sang. Il faut dire que son corps n'a pas vraiment de quoi y faire face.

— C'est dommage, ça t'aiderait peut-être à retrouver ta bonne humeur, la pique Alban en buvant le gobelet à sa place.

Sofia le regarde, blessée. C'est vrai que depuis quelques jours, son humeur est très changeante. J'ai bien une idée de ce qui pourrait se cacher derrière, mais jamais je ne me permettrais de faire la remarque à voix haute. Je me trompe peut-être après tout. Il faut dire qu'elle avait placé ses attentes tellement haut concernant le début de cette nouvelle tournée, notre retour sur les routes et par-dessus tout, nos retrouvailles. On ne peut pas dire que tout se soit passé comme elle l'avait espéré.

Finalement, elle s'approche de la table qui tient lieu de buffet et se sert un fond de vodka avant de le recouvrir de jus de pomme. Elle l'avale sans attendre, s'efforçant de ne pas grimacer, pour le plus grand plaisir d'Alban qui la regarde tout sourire.

— Content ?

Il acquiesce fièrement.

— Allez les gars, c'est l'heure, nous annonce Drew.

Je m'empresse de descendre un deuxième verre, sous le regard désapprobateur de Saïd qui nous observe depuis tout à l'heure sans rien dire. On ne se comprend plus trop ces derniers temps, mais j'espère que ça lui passera et qu'il décidera enfin de lâcher prise pour s'amuser avec nous. Comme avant. Même si je sais que plus rien ne sera jamais « comme avant ».

On monte sur scène, comme chaque soir, mais plus rien ne ressemble à la tournée qu'on a connue. Si on pensait que celle aux États-Unis avait été dure, celle-là n'a rien à lui envier. Sofia frappe sa batterie sans vraiment y mettre d'énergie, comme si elle n'en avait plus la force ou tout simplement plus l'envie.

Alban, en revanche, est plus déchaîné que jamais. À lui seul, il représente presque tous les mouvements qui se passent sur scène. Il joue avec le public, le visage ruisselant de sueur, tandis que Saïd et moi restons plantés derrière nos micros. Comment fait-il pour donner autant d'énergie chaque soir ?

Je reste de mon côté de la scène et me contente de chanter mes couplets du mieux que je le peux. Saïd est toujours là pour m'accompagner quand ma voix flanche, mais l'alchimie n'est plus vraiment là. Il reste concentré sur le public devant nous, car nous sommes là pour ça : leur offrir une soirée inoubliable.

Parfois, du coin de l'œil, je vois que Saïd me regarde, espérant sans doute que je fasse de même, mais j'en suis incapable. Je ne peux plus le regarder dans les yeux pour y voir toute la souffrance que je lui cause chaque jour. C'est trop douloureux. Alors je me concentre sur ma basse et ignore ses yeux qui m'appellent, me supplient. Nos voix s'accordent sur les refrains, mais nos âmes sont à deux endroits complètement différents.

Je lutte chaque soir jusqu'à la fin du concert, pour résister à l'envie de me rapprocher de lui, me blottir dans son cou et y rester pour l'éternité. Parfois, la douleur est tellement pénible que j'en vomirais presque. Seule la voix de Saïd parvient à me garder ancré sur scène, ancré à cette réalité que je préférerai oublier.

Quand je suis revenu de mes vacances en « famille », Saïd m'a confié son souhait de profiter de cette nouvelle tournée à fond, de mettre nos problèmes de côté pour profiter du temps qu'on a ensemble. Mais ça ne s'est pas passé comme ça. Car malgré ses envies de tout oublier, moi, j'en suis incapable.

Chaque soir, lorsque je me couche à ses côtés dans notre lit au premier étage du tour-bus, c'est à peine si je parviens à lui accorder quelques mots. Je vois dans son regard, dans ses gestes, qu'il ne comprend pas et qu'il se sent coupable. Mais il n'a pas à l'être. C'est moi le coupable dans toute cette histoire. C'est moi qui n'ai pas trouvé de meilleure solution que de ramener Lucie dans nos histoires. Je pensais que c'était la meilleure chose à faire, mais maintenant je n'en suis plus si sûr. Cette décision était censée nous laisser plus de libertés, mais elle n'a fait que nous éloigner.

J'aimerais me blottir contre le corps de Saïd quand je me couche, mais je ne peux pas lui faire ça. S'il doit endurer la distance qui se trouve entre nous et que je n'arrive plus à franchir, je dois accepter de ne plus avoir son étreinte pour m'aider à trouver le sommeil.

J'arrive à faire semblant devant les fans, les journalistes et même mon père, mais je ne peux pas le faire devant Saïd. J'ai essayé pendant longtemps de lui faire croire que tout irait bien, que malgré les difficultés, tant qu'on pouvait encore être deux ça irait. Mais je ne peux plus faire semblant maintenant. Cette situation me ronge de l'intérieur sans que je ne puisse rien y changer. Le groupe est plus important que tout et choisir Saïd mènerait inexorablement à la fin du groupe. Je ne peux pas faire ça non plus. Je suis coincé. Tout ça à cause d'une seule et même personne...

— Je ne vais pas venir avec vous ce soir, nous annonce Sofia après le concert, une fois de retour dans le tour-bus.

On la regarde tous les trois, pas vraiment surpris. Je suis même étonné que depuis le début de cette tournée, elle soit sortie avec nous chaque soir. Elle a toujours pris sur elle pour nous suivre dans tous ces bars et ces boîtes de nuit, jusqu'à des heures folles, mais ce soir est sans doute le soir de trop.

— Je vais rester avec elle, annonce Saïd.

Alban semble être indifférent, mais je suis bien plus surpris par cette nouvelle. Je sais que ce n'est pas trop son truc les sorties tard le soir, mais il n'a jamais hésité à venir avec nous. Parce que même si en public il ne nous est jamais possible d'être proches, depuis que ma relation avec Lucie est devenue publique, il semblerait que notre statut d'amis ait réussi à convaincre. Ces petites sorties nous permettent de discuter et passer du temps librement. Pourquoi choisir de laisser un de ces rares moments nous échapper ?

Je le fixe froidement. Impossible de deviner ce qu'il a en tête en ce moment. On ne parle plus vraiment depuis quelque temps. Que nous arrive-t-il ?

— Comme tu veux, lui répond Alban, en tout cas nous on va pas s'empêcher de s'amuser, poursuit-il en me saisissant par les épaules.

— Je me fais pas de soucis pour toi, lance Sofia froidement. Quelques paires de culs te suffisent de toute façon.

Choqué par sa remarque, je me tourne vers Alban, mais il ne semble pas choqué le moins du monde, comme à son habitude. Il m'entraîne ensuite vers les escaliers sans que je puisse me retourner pour dire au revoir à Saïd.

— Faites attention, nous lance-t-il doucement.

Sa voix s'évanouit à mesure que nous disparaissons dans les escaliers. J'aurais dû prendre le temps de l'embrasser, de lui demander si ça ne le dérangeait pas de rester au bus ce soir, mais ce pont qui se tisse peu à peu entre nous semble m'en empêcher. Que reste-t-il de nous désormais ?

Je laisse Alban me traîner à travers les rues de Bruxelles où en terrasses, les conversations vont bon train. Il a toujours de bons plans quand il s'agit de boire un verre, alors je le suis sans me poser trop de questions, ma cigarette à la main. C'est la première fois qu'on ne sort pas à quatre. La première fois que je sors sans Saïd. Qui va m'aider à monter les marches jusqu'à la chambre à notre retour ? Certainement pas Alban qui sera sûrement bien plus mort que moi.

On s'installe à la terrasse d'un premier bar et rapidement, un groupe de jeunes s'amasse autour de nous. Je les entends chuchoter, parler de Nameless, sans pour autant oser venir nous parler directement. Je me sens gêné et tandis que j'essaie de me faire tout petit, Alban au contraire parle de plus en plus fort. Il se vante de sa prestation de ce soir — comme bien souvent — et au moment où il se met à évoquer sa guitare, un des jeunes ose enfin s'approcher.

Alban et lui se mettent à parler guitare et d'autres gars se joignent à nous. Rapidement, la table est complète et les bières arrivent par plateaux. J'en bois une, puis deux, puis trois. Je participe à la conversation de temps à autre, mais je m'y connais pas tant que ça en guitares. Si Saïd avait été là, il m'aurait expliqué tout ce qui se raconte, ou bien il m'aurait parlé d'autre chose, m'aurait fait rire et je me serais senti à l'aise.

Les heures passent et le groupe autour de nous s'agrandit. Plusieurs filles se sont rajoutées et elles se font de plus en plus insistantes. J'essaie de les ignorer le plus que je peux, ou bien d'attirer leur attention sur Alban qui a toujours une histoire folle à raconter. Lui, les filles insistantes, ça le dérange pas vraiment et ça m'arrange. Il en profite même, lorsqu'une jolie brune vient s'asseoir sur ses genoux, prétextant un manque de chaise. Le groupe s'agrandit encore, si bien que je ne parviens plus à suivre la moindre conversation, tandis que les verres continuent de descendre.

Une petite blonde tente à son tour sa chance, avec moi cette fois. Elle s'assoit sur mes genoux sans crier gare, faisant mine d'avoir trébuché. Toutes les techniques sont bonnes pour parvenir à son but, n'est-ce pas ? Elle rit très fort et, sous le choc, je la laisse même jouer avec mes cheveux. Je pense que je suis déjà assez saoul pour supporter l'insupportable.

— J'ai toujours trouvé que c'était toi le plus mignon des trois, me murmure-t-elle à l'oreille.

Je me contente de lui sourire, sachant pertinemment ce qu'elle attend de moi, mais je ne lui donnerai pas. Je reporte mon attention sur Alban et fais mine de m'intéresser à ce qu'il raconte, bien que je ne parvienne à capter qu'un mot sur deux.

— Tu devrais laisser tomber, lance un jeune de la bande à la blonde. J'ai entendu dire qu'il préfère les mecs.

Il n'a pas dit ça de manière méchante, mais quelque chose dans sa voix ne sonnait pas juste. Pourquoi tout le monde assume que je préfère les mecs ? Est-ce simplement les ragots qui se propagent à mon sujet sans que personne ne sache pourquoi ? Ou alors est-ce que quelque chose en moi le crie sans que je m'en rende compte ? Comment peuvent-ils savoir alors que même moi j'en sais rien ?

C'est vrai après tout, je n'ai connu que Saïd. Et en même temps, jamais je n'ai vraiment réussi à m'imaginer avec quelqu'un d'autre que lui. Peut-être n'ai-je tout simplement pas encore rencontré cette personne qui me fera ressentir la même chose ?

Au final, qu'est-ce que je ressens réellement pour Saïd ? Est-ce si différent de ce que je peux ressentir pour Alban ou Sofia ? Oui, c'est bien différent, mais je serais incapable de mettre des mots dessus.

La jeune fille — dont j'avais presque oublié la présence — finit par se relever, n'ayant pas obtenu l'attention qu'elle espérait. Alban quitte sa chaise au même moment et je comprends à son grand sourire que l'heure est venue de faire passer cette soirée au niveau supérieur.

La boîte de nuit dans laquelle on se rend se situe à seulement quelques rues de là, mais le trajet est semé d'embûches. Entre le groupe de fans qui nous suit à la trace, les routes à traverser et l'alcool qui fait correctement son effet, tout paraît plus long que prévu.

À l'intérieur, l'ambiance est totalement différente, comme à chaque fois. Tandis qu'au bar nous étions à l'extérieur, à la vue de tout le monde, il semblerait que dans cet espace fermé le temps se soit arrêté. Pendant quelques heures à l'abri du monde extérieur et de leurs tracas, des dizaines de personnes se retrouvent pour danser à l'unisson. Alban se lâche complètement, encore plus que sur scène. Il se fiche bien de ce que les gens peuvent voir et penser de lui, la plupart auront tout oublié demain. Il laisse les filles venir se coller contre lui et ses mains descendent le long de leurs hanches. Ici, il devient important, celui avec qui toutes les filles veulent danser, partager un regard et parfois bien plus.

Pourquoi toutes les relations semblent tourner autour de cette séduction, cette parade gênante, dans le seul but d'en venir au sexe ?

Pourquoi tout tourne autour du sexe ? Comme si c'était quelque chose de vital. Je sais que c'est un instinct primaire, un besoin pour la survie de l'espèce, mais pourquoi je ne ressens pas ce besoin ? Lorsque je visualise tous ces gens autour de moi, je n'ai aucunement envie de me retrouver dans un lit avec eux et encore moins de les voir nus. Avec Saïd, c'est différent. L'envie vient lorsqu'il me regarde, lorsqu'il me touche et m'embrasse. Avec Saïd c'est différent parce que c'est Saïd, tout simplement.

Les lumières flashent dans tous les sens et je danse sur la musique avec mon verre à la main, perdu dans l'espace et le temps. Par moment, j'accepte de partager ma danse avec une jeune fille qui ne demande que ça, mais mon esprit est ailleurs. On danse côte à côte, mais pas vraiment ensemble. Dès qu'une pensée me vient, je prends une gorgée pour la faire partir. Je ne suis pas là pour penser. C'est le seul moment de la journée où je parviens réellement à les effacer, le temps de quelques heures, avant que les effets de l'alcool ne se dissipent.

Ici, je ne me pose plus vraiment de questions. Je me laisse simplement porter par la musique et la foule qui se meut autour de moi.

*****

N'hésites pas à laisser une petite étoile pour me signifier que tu as lu ce chapitre et un commentaire pour me dire si ça t'as plu ☺️

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