💎Lettre fermée sur le banc des lecteurs💎

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[Note : J'ai repris deux histoires/idées très courtes pour faire celle-ci, mais à part la phrase écrite comme une citation, il n'en reste pas grand chose.]

Assise sur un banc, elle avait sorti un carnet de sa poche. Griffonnant le papier détachable frénétiquement, la jeune femme raturait ses mots encore et encore. Finalement, elle prit une feuille vierge et écrivit soigneusement ses lignes. Elle se relut en remuant les lèvres silencieusement. Satisfaite, elle plia délicatement le papier et le glissa dans une enveloppe. Elle inscrivit au dos une mystérieuse phrase "Si jamais cette lettre parvient à destination, alors il ne sera peut-être pas trop tard." Elle glissa la lettre sous sa veste et soupira. Elle s'était efforcée jusqu'ici de rester calme, sereine et ce banc, bien à l'abri des regards, lui avait permis de relâché ses larmes sans être jugée. Du moins, c'était ce qu'elle croyait. Mais ce banc à l'ombre n'était pas solitaire. Il y avait, vissé sur sa plus haute planche, un autre banc, minuscule. Très discret et que personne ne remarquait jamais.

Sur cet étrange second banc, une petite fée lisait un livre ridiculement petit. Le petit peuple avait parfois des idées farfelues et l'emplacement du banc des hommes était si parfait, que les petits êtres avaient décidé de placer le leur au même endroit. En voyant la jeunette aux yeux rougis approcher, la fée avait brièvement sorti son nez pointu d'entre ses pages avant de décider qu'elle n'était pas menacée et de se replonger dans sa lecture. Elle avait entendu la femme gratter sur son carnet et avait interrompu sa lecture à cause du son produit. Ses oreilles pointues étaient très sensibles et le bruit avait troublé sa concentration. Alors elle avait posé son bouquin énorme à ses petites mains et s'était penchée au-dessus de l'épaule de la jeune femme.

Les mots, durs, glissaient sur la feuille avant d'être barrés et réécrits à nouveau. La spectatrice frémit en découvrant son histoire morceau par morceau. Mais l'écrivaine en herbe était troublée et finit par n'écrire qu'une surface de mots. Derrière chaque phrase, une larme plus tranchante qu'une lame coupait la vérité, qui n'était dévoilée qu'à demi-mots.

L'eau salée désormais sèche sur sa peau claire, l'inconnue se releva et quitta le banc des lecteurs. Surprise et inquiète par cet élan soudain, la minuscule fée la suivit. La lettre fut glissée dans la fente d'une boîte et la jeune femme quitta définitivement la ville.

Bien longtemps après, le mot arriva dans les mains de sa destinataire. Celle-ci lut et relut les mots tracés au dos de l'enveloppe, ne sachant qu'en penser. Puis, comme dans un éclair soudain de réminiscence, elle comprit. Le passé devait rester au passé. Et la lettre jamais ne fut ouverte car dans les flammes, elle fut jetée.

Les Contes de Maya [Recueil]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant