13° Le voleur démasqué ?

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C O L I N

J'observais les téléphones dans les mains de Martin, l'air hagard. Je n'en croyais pas mes yeux. Émilien et moi avions passé toute une semaine à travailler d'arrache pied pour le coincer, et voilà qu'il avait suffi d'une rumeur pour qu'on réussisse à le trouver... J'étais complètement dépité, mais une chose me fit néanmoins froncer les sourcils.

On avait la preuve que Loïs avait volé les portables, puisqu'on les avait retrouvé dans son sac. Alors pourquoi celui-ci s'entêtait-il à avoir une mine aussi effarée que les notre ? Comme si, à l'instar de nous, il ne s'attendait pas à trouver ces téléphones dans son propre sac. Comme s'il les découvrait en même temps que nous.

— Je vous jure que c'est pas ce que vous croyez ! Sur la tête de ma mère je sais pas ce que ça fout là ! s'exclama Loïs, désemparé.

Martin lui jeta un regard désabusé. Il leva un sourcil, l'air de dire "prend moi pour un con". Je l'imitais sans m'en rendre compte. Loïs pouvait dire ce qu'il voulait, on avait trouvé les téléphones dans son sac. Tout indiquait qu'il était coupable. Il avait le physique correspondant, un antécédent de vol dans son dossier scolaire, et les portables étaient en sa possession.

Ça semblait trop simple, sans doute trop facile, mon instinct me criait que quelque chose clochait dans cette histoire. Mais je savais aussi parfois écouter ma raison. Même s'il n'avait pas l'air de mentir en affirmant qu'il ignorait la présence de ces cellulaires dans son sac, il n'empêche que je ne pouvais que me fier aux faits.

Je jetais un coup d'oeil à Émilien, histoire de voir ce qu'il en pensait. Il fixait ses chaussures, complètement ailleurs. La situation était plus que tendue et sérieuse, et il n'écoutait même pas. Je pinçais les lèvres pour m'empêcher de rire. Il me surprendrait toujours.

— On fait quoi Colin ? On le balance à la CPE ? me demanda Martin, les portables toujours en main.

J'hésitais. D'un côté, si c'était vraiment le voleur, il méritait d'être puni. L'amener chez la CPE était donc la meilleure chose à faire. Mais de l'autre, même si tout pesait contre lui, et que tout semblait l'accuser, le doute planait toujours.

Il y avait toujours la possibilité que le voleur soit suffisamment malin pour avoir glissé les portables dans son sac pour l'accuser à sa place. Ça expliquerait pourquoi Loïs avait déclaré ne pas être au courant de la présence de ces téléphones. Soit il disait la vérité, soit il jouait très bien la comédie. Parce que j'aurais juré qu'il ne mentait pas.

— Martin, Colin et machin, pitié, me dénoncez pas ! Je vous jure sur ma vie que j'ai rien fait ! Je savais même pas que c'était là ! C'est un complot !

Je soufflais. Je n'étais pas sûr que ce que j'allais annoncer soit juste, mais j'avais pris ma décision.

— On ne l'amènera pas à la CPE, conclus-je. On va rendre ces portables à leurs propriétaires, sans balancer Loïs.

Martin prit une mine offusquée, presque outrée. Émilien se contentait de fixer ses pieds, tandis que Loïs afficha soudain un air soulagé.

— Merci Colin ! Toi tu me crois, pas vrai ?!

— Je ne vais pas te cacher que je suis complètement contre ton choix, mais c'est toi le patron. Je ferais ce que tu dis, déclara Martin en tentant de dissimuler sa moue contrarié.

Je hochais la tête. Je donnais un léger coup de coude à mon acolyte pour le ramener sur Terre et m'emparais des portables. Loïs me remercia une fois de plus, m'assurant qu'il n'avait rien à faire dans cette histoire, et nous nous mirent en quête des propriétaires de ces téléphones. Émilien récupéra le sien, sans grand enthousiasme, comme si il se fichait pas mal de le retrouver.

Martin fila vite à l'anglaise, prétextant que nous n'avions pas besoin de lui pour distribuer les portables, et qu'il n'était de toute façon pas trop tard pour donner un coup de main à Ambre pour l'impression du journal. Ne restait donc plus qu'Émilien pour me tenir compagnie.

— Il est parti depuis quand Martin ? me demanda-t-il en fronçant les sourcils, comme s'il venait de sortir de ses pensées.

Ce qui était sans doute le cas, d'ailleurs. J'esquissais un sourire amusé.

— Il a dit qu'il nous laissait parce qu'il ne voulait pas tenir la chandelle, lui répondis-je, d'humeur taquine.

Il réagit au quart de tour. En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, il avait viré au cramoisi.

— Je blaguais !

— Je te déteste, souffla-t-il.

— Non, je sais que tu m'adores.

Il rougit de plus belle. Je riais sans m'en cacher, complétement sous son charme.

— À qui appartiennent ces portables déjà ? me demanda-t-il une fois mon fou rire calmé.

— À Sarah et Rémi à qui nous avions parlés mardi dernier.

— Ah oui...

Arrivés au forum, je remarquai directement Rémi, de dos, qui parlait justement avec Sarah. Nous allions faire deux pierre d'un coup.

— J'ai une surprise pour tous les deux, les accostais-je en les entourant de mes bras.

— C'est quoi ? Tu vas nous annoncer que tu déménages ? Ce serait le plus beau cadeau de ma vie, me dit Sarah, un sourire malicieux aux lèvres.

Je lui tirai la langue. Elle rit. Émilien restait en retrait, il semblait gêné par notre proximité.

— T'as retrouvé nos portables ? me demanda Rémi, qui était visiblement le plus perspicace des deux.

— Eh oui. Mais c'est aussi grâce à Émilien ! m'exclamais-je en me détachant d'eux pour rejoindre mon acolyte préféré.

Je sortais de ma poche leur téléphone, et les leurs tendis. Rémi le saisit calmement, en me remerciant simplement, tandis que Sarah se jeta dessus comme un lionne se jetterait sur sa proie, me l'arrachant des mains.

— Merci d'avoir sauvé mon bébé Colin, je ne serais plus jamais méchante avec toi, geint-elle en embrassant exagérément son Iphone. Et merci à toi aussi, Émilien. Du coup, c'était qui le fils de pute qui nous a chourré nos smartphones ?

Je jetais un regard hésitant à Émilien. Il secoua la tête de gauche à droite. Je compris que j'allais devoir leur mentir. Je n'aimais pas ça, mais tant qu'on n'était pas sûr de l'identité du voleur, c'était la meilleure chose à faire.

— On les a retrouvé abandonnés dans un casier qui n'avait pas de cadenas. D'après la vie scolaire, il n'appartient à personne. Donc on n'a aucune piste pour le voleur, mais le principal, c'est qu'on a retrouvé vos portables, mentis-je.

Je n'aimais pas cacher la vérité, même si j'avouais être très doué dans ce domaine. Je discutai encore quelques minutes avec Sarah et Rémi avant de les délaisser pour Émilien. J'appréciais la compagnie de mes amis, mais je crois que j'aimais encore plus être avec Émilien.

— On retourne voir Ambre et Martin ? lui demandais-je.

— Je te suis Sherlock.

Je souris. Je crois bien que jusque là, personne ne m'avait jamais autant plu que lui.

Les apprentis détectives Where stories live. Discover now