Chapitre 18

Depuis le début
                                    

- On ne s'est pas échangé nos noms. Je suis Marlone. Affirme-t-il soudain de sa voix grave et rocailleuse.

- Et moi Mily.

- Pourquoi est-ce que tu es ici ?

Je ne peux pas lui dire, non ? Enfin, mes raisons restent dans l'intérêt de la résistance, alors ce ne serait pas si catastrophique qu'il les sache.

- Je voulais aider la résistance de l'intérieur. Comprendre des choses sur la base scientifique.

Je déblatère toutes ces demi-vérités sans aucune honte, préférant garder pour moi le reste. Son regard se fait méfiant, puis il détourne son visage et se mure dans le silence.

*

Lorsque les freins se mettent à crisser, nous relevons tous deux la tête en direction de la porte. Au vu du bruit, nous sommes arrêtés sur une surface lisse, sûrement a l'intérieur d'un bâtiment. Les conducteurs arrivent bruyamment, se vantant de leur mérite après avoir attrapé "deux" rebelles. La lumière m'aveugle soudain alors qu'ils ouvrent la voiture, laissant voir un décor peu habituel. La pièce est assez peuplée, séparée par une grille derrière laquelle se trouvent quelques personnes en train d'attendre quelque chose. Plusieurs autres véhicules sont garés, comme si c'était un genre de station de relais.
Un des hommes attrape mes menottes sans précautions et déverrouille ma ceinture avant de me tirer. Je crispe mes poignets avec agacement et descend, suivie par Marlone qui garde un visage impassible. Peut-être a-t-il déjà été ici ? Personnellement, j'observe avec attention l'endroit, intriguée. Ceux qui attendent derrière la grille ont eux aussi des menottes, ils doivent être les autres personnes appréhendées. Une porte fermée se trouve au fond, sûrement là pour faire entrer les détenus dans le complexe un par un.

Les effacés nous conduisent vers la grille et nous font entrer sans rien dire, laissant les doutes s'installer. Je leur demande ce qu'il va nous arriver après ça, mais ils ne me répondent pas et s'éloignent en nous ignorant royalement. Au moment où je m'apprête à les appeler, une main m'arrête.

- Ne te fais pas remarquer. Ils n'ont pas le droit d'adresser la parole aux prisonniers à partir de maintenant.

Je dévisage le vieil homme avec étonnement. Alors il est donc bel et bien venu ici auparavant.

- Qu'est-ce qu'il va sa passer ensuite ? Tu le sais ?

- Il y a un entretient rapide pour chaque prisonnier. Il faut qu'ils sachent comment les traiter.

Je commence à m'inquiéter un peu. Apres tout ils vont bien voir que je suis une extérieure, il doit y avoir un dossier sur moi. Alors si ils l'examinent et décident de finir ce qu'ils avaient commencé l'année dernière, je suis morte. Mon projet était sûrement beaucoup trop précipité, mais ils écouterons dans aucun doute ce que j'ai à dire concernant Jorus. C'est en quelques sortes la seule chance que j'ai de gagner leur confiance et de m'infiltrer.
Dans la petite cage improvisée se trouvent avec nous trois hommes. Les yeux de Marlone se sont posés sur chacun d'entre eux à son entrée, pas de "Shey" en vue. Ça ne fait pas longtemps depuis notre opération mais elle a déjà du être emmenée et interrogée. J'ai une boule au ventre concernant cet interrogatoire. Est-ce qu'ils vont nous faire souffrir ? Je sens mes jambes commencer à trembler rien qu'en y pensant. Est-ce qu'ils ont des moyens de faire avouer la vérité contre son gré ? Ce serait bien la pire chose qu'il pourrait arriver. Je vendrai Zéra et tout le reste de mes compagnons aux effacés sans même le vouloir.
Voyant mon état d'anxiété, l'homme s'assoit tranquillement au sol et m'invite à faire de même.

- Ce n'est rien de physique normalement. Mais reste prudente quand tu répondras. Ils trouveront tes failles, ne les laisse pas te piéger.

Je souris nerveusement, mais ne répond rien.
Ce n'est pas vraiment rassurant...
De plus, l'accueil sera sûrement different avec une extérieure. Ce n'est pas pour rien que ma mère adoptive est morte. Pour éliminer les extérieurs, ils sont prêts à blesser et tuer leurs propres voisins.
Une rage amère monte soudain en moi. On pourrait en fait dire que Lydie était simplement une "victime collatérale". Je suis écœurée par cette pensée, et perds immédiatement le sourire que j'avais réussi à arborer. Mes failles... ce sera sûrement ça. J'espère me tromper, mais je suis pratiquement sûre qu'ils parleront du meurtre de ma mère. Et je ne pense pas réussir à rester docile et calme s'ils partent vers ce sujet là.

Plusieurs heures passent et l'attente devient rude. Aucune des personnes présente ne daigne s'adresser la parole, et chacun reste dans son coin à regarder les autres du coin de l'œil, l'air mauvais.
Quand la porte en fer s'ouvre enfin pour nous appeler, les paroles du vieil homme me reviennent en tête.

Ils trouveront mes failles, je dois être extrêmement prudente et je ne dois surtout pas me laisser piéger par ce qu'il vont me dire.

Autant pour moi que pour ma sœur.

Nucléaires 3 : TirailléeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant